Encore une fois, il y a de belles baffes qui se perdent ! D’autant que j’aimerais bien avoir le temps de «m’arpouser» - c’est du Solognot mais je ne pense pas qu’il soit nécessaire de traduire – et vaquer à d’autres occupations, dont le grand remue-ménage d’avant l’automne… j’avance lentement mais sûrement et j’ai déjà fait pas mal de choses depuis dimanche dernier. Depuis ce matin, je suis coincée devant l’ordinateur ! à dépiauter la presse et écrire. Je pensais en avoir terminé lorsque je découvre cette perle sur la Une du Monde en faisant un bref passage sur ma boîte. Vous dire le coup de sang qui m’a prise en lisant le titre ! Brice Hortefeux, les “bien-pensants” et la “gauche milliardaire”. Les abonnés auront droit à la version longue : Brice Hortefeux : “Vous êtes aveuglés par les bien-pensants”
L’on ne saurait en effet comprendre le flot de haine qu’il déverse sans savoir qu’il s’adresse directement à Eric Fottorino qui a eu l’outrecuidance de commettre un véritable forfait, à savoir un édito particulièrement critique à l’égard de la politique de Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux L’amour de soi et la haine des autres et dont j’avoue qu’il m’avait échappé par manque de temps… Edito courageux, humaniste et lucide. Sans concession non plus pour la gauche, trop longtemps coupable d’angélisme à l’égard de la délinquance dans les banlieues.
Eric Fottorino renoue avec Le Monde tel que nous étions nombreux à l’aimer. Mis tant d’années entre paren-thèses par le redoutable duo Jean-Marie Colombani-Alain Minc qui ont servi ad nauseam la soupe à Nicolas Sarkozy. On comprend pourquoi Edwy Plenel s’est tiré ! Si quelque “complot” il y eût jamais, ce fut bien évidemment de leur part ! De là-haut, Hubert Beuve-Méry ne peut que se réjouir de voir Le Monde redevenir le journal indépendant qu’il avait créé. Une fois encore, je ne lui demande pas d’être “à gauche” mais impartial et objectif. Les journalistes n’étant pas des clones chacun(e) s’exprime ensuite selon sa sensibilité.
Nul doute qu’à l’inverse Nicolas Sarkozy ne s’étranglât de rage depuis Cap-Nègre ou le fort de Brégançon : pensez donc ! la «gauche milliardaire» vise bien entendu le fameux trio BNP : Bergé, Niel, Pigasse, repreneurs du Monde – lors même qu’il voulait faire main basse sur le quotidien pour le confier à Lagardère ! - ou Bernard-Henri Lévy qui n’a pas épargné dernièrement ses critiques contre la surenchère raciste et xénophobe voulue par Nicolas Sarkozy et Hortefeux et défendue par la meute des chiens de garde de l’UM/Posture…
Dans l’interview recueillie par Abel Mestre et Caroline Monnot, Brice Hortefeux balaye d’un revers de main méprisant toutes les critiques sur la politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy : associations, journalistes y compris – une fois de plus ! - la presse étrangère, il suffit de penser au New York Times, Commission des droits de l’homme de l’Onu et même – timidement – la Commission européenne. Et depuis ce week-end, l’Eglise catholique : même le Pape !
On a droit à tous les poncifs démago et populistes directement piochés dans la rhétorique du Front National ce qui n’est pas fait pour surprendre depuis que Le Monde (14 août 2010) a dévoilé le pot aux roses qui n’était que secret de Polichinelle : La rhétorique frontiste, un réservoir d’idées pour le chef de l’Etat.
Grand leitmotiv : ces critiques émanent de l’intelligentsia notamment parisienne et encore plus sûrement germano-pratine, élite forcément coupée du peuple qui souffre directement de l’insécurité. Air connu et déjà seriné ad nauseam par Eric Besson lorsqu’il taclait les «élites tordues» au sujet de son ignoble politique contre les clandestins (Nouvel Obs du 11 février 2009). Il ne s’agissait rien moins que de ne leur accorder de papiers que s’ils consentaient à dénoncer les «passeurs»… Selon ce grand humaniste remettant – déjà ! - “l’eau de Vichy” au goût du jour, il ne s’agissait nullement de délation – c’était à ce sujet qu’il parlait des élites tordues – affirmant qu’il fallait sortir de ce «langage de Seconde Guerre mondiale»…
Mais non, Duchnock : c’est tout à fait de cela qu’il s’agissait, comme aujourd’hui ! Eva Joly a parfaitement raison de souligner qu’en appeler à la vindicte populaire contre tout un groupe de personnes en raison de leur origine ethnique cela ne s’était jamais vu depuis le Régime de Vichy et d’ accuser Sarkozy de pratiquer «un racisme d’Etat» (20 minutes, 12 août 2010).
En appeler aux mêmes préjugés racistes et xénophobes… Pour diviser les Français. Qu’ils fussent de souche ou d’origine étrangère. Nicolas est prêt à tout pour être réélu en 2012. C’est bien en ce sens que Jean-François Kahn parlait de «voyou de la République» : il se conduit exactement comme les caïds de banlieue qui défendent leur territoire…
Il fait feu de tout bois sans aucun scrupule – mais qu’attendre d’un individu totalement dénué de Surmoi qui seul permet la distinction du bien et du mal ? - dans la droite ligne du «gros rouge qui tâche» qu’il souhaitait répandu largement au printemps dernier pour la campagne des élections régionales. Malgré les citernes entières qui en furent déversées, tout ce qu’il a obtenu c’est non seulement de les perdre dans les grandes largeurs mais surtout de redonner beaucoup de vigueur au FN ! Il n’a pas retenu la leçon mais tout au contraire en rajoute dans le discours limite extrême droite.
Il obtiendra sans doute ce qu’il mérite : marginalisé par des candidatures de droite dissidentes comme le fut Jospin en 2002 et le FN avec le vent en poupe risquant de passer devant lui au 1er tour de l’élection présidentielle en 2012. Face au 21 avril à l’envers qu’il redoute ! J’ai des oreilles en parfait état de marche et il m’est revenu que certains de ses électeurs du 6 mai 2007, très à droite envisagent de voter pour Marine Le Pen. En effet, pourquoi donner leur suffrage à la copie quand l’original tient le même discours ?
D’autant que celui-ci aura l’avantage d’être congruent : constant dans le temps, contrairement à celui de Nicolas Sarkozy qui n’aura cessé de balancer entre la droite dure et le centre, voire l’électorat de gauche pour “l’ouverture”.
D’ailleurs, selon un autre article d’Abel Mestre et Caroline Monnot (Le Monde du 14 août 2010) Surenchère sécuritaire : l’extrême droite veut récolter ce que sème M. Sarkozy…
Je n’ai la prétention d’appartenir ni à l’intelligentsia ni à aucune élite. A gauche depuis l’adolescence, je le resterai jusqu’à mon dernier souffle. Je fais partie du peuple dont je partage la condition. Pauvre parmi les pauvres. J’ai simplement eu la chance de pouvoir faire des études et d’avoir, outre une bonne culture générale – et particuliè-rement un très grand intérêt pour l’histoire qui éclaire le présent – l’esprit critique fort développé et ce, depuis l’enfance.
Que la taspé qui a pondu un commentaire avec des arguments à la Le Pen sur mon article Déferlement de «racisme d’Etat» tous azimuts contre les Roms & «gens du voyage» passe son chemin. C’est facile de me traiter de gauchiste ! Je préfère de loin avoir été gaucho à 20 ans que facho ! Et “bien pensante” plutôt qu’avoir les répugnantes idées de Sarkozy et Hortefeux… Je suis surtout profondément marquée par l’humanisme chrétien de mes jeunes années passées à la JOC. Seulement voilà : il lui faudrait des lunettes non partisanes pour comprendre le sens de mes engagements au lieu de s’arrêter dans mes écrits à ce qui l’arrange…
Je ne peux que donner raison à Daniel Cohn-Bendit : «Nicolas Sarkozy prend les Français pour des cons» (20 minutes du 16 août 2010) qui reprend l’interview que le leader d’Europe Ecologie a donnée au Monde le 16 août 2010, propos recueillis par Luc Bronner et Gérard Courtois “Stupidité et malveillance” : le sarkozysme selon Cohn-Bendit - dans laquelle il constate avec pertinence que «Stupidité et malveillance sont les deux nouvelles mamelles du sarkozysme» : cette stupidité «s’illustrant par le projet de déchéance de nationalité concernant les criminels portant atteinte aux forces de l’ordre. «Tout le monde sait que quelqu’un qui tue un policier est déjà condamné à la perpétuité. Croit-on vraiment que son problème, avant de passer à l’acte, sera de savoir s’il sera déchu ou pas de la nationalité française?»… je n’ai cessé de le penser, le dire et l’écrire. C’est à peu près aussi dissuasif que naguère la peine de mort !
Il considère non moins logiquement que la politique de Nicolas Sarkozy est malveillante «parce qu’elle produit en perma-nence de l’exclusion. C’est un populisme de l’exclusion pour rassembler la droite dure, la France profonde, sur le dos des minorités»… Sans tomber pour autant dans l’angélisme : «la question de l’échec de l’intégration doit être abordée», estimant toutefois que «c’est la désintégration de la société qui crée les problèmes d’intégration, et non la criminalité extrême». Nicolas Sarkozy confondant à l’évidence l’effet et la cause.
Il reconnaît très justement qu’il n’existe pas de «baguette magique» et que la réponse «devra être sociale, éducative et répressive». Nous ne savons que trop bien que Nicolas Sarkozy se fiche totalement des volets social et éducatif. Pour lui, la seule réponse – petite délinquance comme nouveau grand banditisme – est la répression.
N’oublions surtout pas que c’est lui – ministre de l’Intérieur – qui avait démantelé la police de proximité en 2002. La gauche – qui ne l’ouvre pas assez sur le sujet ! – fait bien de rappeler comme hier Arnaud Montebourg à la Fête de la Rose de Frangy sur Bresse (Saône et Loire) le calamiteux bilan de la droite - et surtout ! de Nicolas Sarkozy - depuis dix ans… Non seulement rien n’a changé mais tout s’est considérablement aggravé.
Hortefeux vient de signer l’arrêt de mort du peu de police de proximité que Michèle Aliot-Marie avait remis en place… Feu donc les UteQ (Unités territoriales de quartier). Il ne s’agit pas seulement de les rebaptiser comme le suggère le titre du Monde (18 août 2010) Hortefeux renomme sa police de proximité… Les «Brigades spéciales de terrain» (BST) n’ont strictement rien à voir avec une police de proximité mais nettement plus avec les BAC. Elles ne seront pas attachées à un quartier mais mobilisées en fonction des circonstances.
Le terme “brigades” me gênait déjà par son côté policier quasi militaire – au demeurant pas le moins du monde étonnant sachant que Nicolas Sarkozy ne peut respirer qu’en étant en guerre perpétuelle – mais il y a bien pire dans cette appel-lation d’origine (in)contrôlée. En effet, dans l’Express (19 août 2010) Hortefeux : des “Brigades spéciales” de sinistre mémoire Eric Pelletier rappelle opportunément que le terme désignait sous l’Occupation les unités chargées de traquer «l’ennemi intérieur» - entendre les juifs et les résistants – pour le compte des nazis… Noble ascendance, n’est-il pas ? Pendant qu’il y sont, pourquoi pas “Sections d’Assaut” ! Hein ?
Brice Hortefeux se fout carrément de la gueule des Français et surtout de ceux qui souffrent le plus de l’insécurité. Les plus pauvres, évidemment. Faut pas se voiler la face, ce qu’a fait trop longtemps la gauche. On ne brûle pas les voitures dans les quartiers rupins mais bien dans les banlieues déshéritées. Brice Hortefeux en a supprimé les statistiques sous le fallacieux prétexte qu’elles excitaient une concurrence entre banlieues… Casser le thermomètre n’a jamais fait baisser la fièvre, foi d’infirmière !
Le seul remède qu’il annonce en hausse, ce sont les caméras de vidéosurveillance ! dont il veut triple le nombre pour les porter à 60.000 en 2011… Quitte à me répéter, elles n’ont aucun caractère dissuasif contre des délinquants aguerris et prêts à tout. Leur seul intérêt étant d’élucider a posteriori les circonstances des agressions et autres délits et d’identifier les contrevenants pour autant qu’ils ne soient pas cagoulés. Ça fait une drôle de jambe aux victimes.
Les syndicats de policiers ne sont plus dupes des promesses de Sarkozy : il est impossible de recruter de nouveaux policiers pour former ces unités compte tenu de l’aberrante RGPP (Révision générale des politiques publiques) qui n’a qu’un seul objectif : diminuer de façon drastique le nombre de fonctionnaires. Dans tous les services de l’Etat et autres services publics. Au détriment de leur bon fonctionnement pour la satisfaction des usagers. Pour créer les BST on piochera dans l’effectif déjà maigrelet des commissariats comme cela s’est déjà fait en maintes occasions.
Lors même qu’est prévue une nouvelle baisse drastique des effectifs policiers selon Le Monde du 17 août 2010 Police nationale : 3 500 suppressions de poste envisagées dans les trois ans Brice Hortefeux répond tout à fait à côté de la plaque quand Luc Bronner et Françoise Fressoz lui rappellent que depuis trois ans le gouvernement a supprimé 9.000 postes de policiers et gendarmes : il compare les effectifs de 1981 (143.258) et ceux d’aujourd’hui : 145.100… Pourquoi ne pas remonter à l’An 40 ? Les chiffres de 2002 sont à cet égard les seuls pertinents.
Brice Hortefeux s’enferre dans cette politique : «Sauf à vouloir augmenter les impôts ou y soumettre les ménages qui n’en payent pas aujourd’hui, les contraintes budgétaires nous imposent de maîtriser les effectifs. J’assume cette vérité». Les impôts n’augmenteront sans doute pas mais à moins d’avoir un sacré paquet de peaux de saucisson devant les yeux il est évident que les multiples coups de rabot sur les prétendues “niches fiscales” – celles des pauvres et classes moyennes – auront au bout du compte le même effet sur notre pouvoir d’achat… Peau de chagrin !
Il n’est pas non plus inintéressant de savoir que Brice Hortefeux envisage «plus discrètement» - bonjour la fameuse transparence ! - de «déléguer à des entreprises privées certaines missions de sécurité» : gardiennage de bâtiments publics, transfèrement de détenus. Des premières réunions auraient eu lieu en juin. Toujours selon le même leitmotiv : «L’Etat ne peut pas tout faire» ! Rappelons néanmoins que la police et la gendarmerie comme d’ailleurs l’armée ont toujours fait partie des missions dites “régaliennes” de l’Etat.
Ceci dit, l’idée d’une “coproduction” police-privé n’est pas nouvelle et avait déjà germé dans l’esprit tordu de Nicolas Sarkozy… Comme je suis une “souris d’archives” et dotée d’une bonne mémoire je n’ai eu aucun mal à retrouver dans mes dossiers quelques articles sur le sujet : en décembre 2008 Nicolas Sarkozy préfaçait un «petit livre blanc» rédigé par la Confédération européenne des services de sécurité (Coess) et l’Institut national des hautes études de sécurité (Inhes) avec un avant-propos de Michèle Aliot-Marie avais-je lu dans un article de 20 minutes (13 décembre 2008) Nicolas Sarkozy favorable à une «coproduction» de la sécurité entre le privé et le public.
Pensons toutefois à prévenir “la garde” de Nicolas Sarkozy : ils pourront toujours agiter le “petit livre blanc” en espérant que les problèmes de sécurité seront réglés par miracle en se référant à la pensée du “petit timonier” : ça ne marchera pas plus qu’avec le “Petit livre rouge” de Mao - il m’était tombé des mains dès la seconde page avec ses ridicules «tigres en papier» : direct poubelle ! - qui lui aussi avait fichu un sacré bordel en Chine avec ses «gardes rouges» et sa «Révolution culturelle».
Un autre article de 20 minutes (15 décembre 2008) précisait l’idée (?) sarkoïdale de «coproduction des solution public-privé de sécurité» et le titre est en soit tout un programme ! La «répression» pour la police, la «dissuasion et la prévention» pour le privé ?Ouf ! La dissuasion et la prévention n’étant plus au programme on échappe au pire… De quelles compétences en la matière pourraient se targuer les officines privées de sécurité ? Déjà, il me paraît extrêmement grave de leur confier ne serait-ce que le transfèrement des détenus lors même qu’ils n’ont ni la même formation que les policiers ni moins encore de règles déontologiques.
C’est pour autant ce que «guigne la sécurité privée» alléchée par les calculs du ministère de l’Intérieur : «le transfert des détenus représentant 1,6 million d’heures de fonction-naires» écrivait le 7 janvier 2009 Isabelle Mandraud dans un article du Monde 4.800 emplois seront supprimés dans la police d’ici à 2011. Tout cela au nom de prétendues mesures d’économie ! Etant bien évident que ces officines assureront ces services bénévolement !
Dans sa préface Nicolas Sarkozy précise : «D’ici à 2012, la police devrait ainsi perdre plusieurs milliers d’agents. «La demande et l’offre de sécurité se font plus pressantes et exigeantes, en raison de l’espace laissé par la réduction nécessaire des dépenses des Etats»…
Si pour co-production l’on utilise l’apocope «copro» fort connue dans le milieu médical cela résume parfaitement cette politique de m…
consistant à diminuer les effectifs du public pour ensuite faire appel au privé. Politique de gribouille.Ceci dit, Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux se foutent de la gueule des Français dans les plus grandes largeurs… Ils fustigent l’élite intellectuelle quand cela sert leurs intérêts. Pour eux, la seule élite qui vaille et mérite le respect est celle du fric. Celle des multimilliardaires du COUAC/40. Dont ils défendent les intérêts avec un acharnement peu commun. Et qui, comble de l’ironie s’illustre à merveille dans les méandres de l’affaire Bettencourt-Woerth !
Nicolas Sarkozy, parvenu bling-bling et fasciné au-delà de toute raison par l’argent, est bien de la race des valets. Courbant l’échine devant les possédants mais d’une inflexible dureté à l’encontre des «salauds de pauvres» et des Français normaux. Peu de chances qu’il soit cependant comme le valet Matti de Bertolt Brecht – attentif aux pauvres hères - face à la cruauté de son maître Puntila qui ne flattait démagogiquement le peuple que lorsqu’il était fin saoul.
Comme a priori Nicolas Sarkozy ne boit pas puisqu’il dit détester l’alcool, il doit s’enivrer uniquement d’ambition et de soif du pouvoir : il les a démesurées.