Par Alexandre Roussel - BSCNEWS.FR / Jusqu’ici Pilgrims Progress c’était le titre du flamboyant conte religieux de John Bunyan datant du XVIIe siècle. À partir d’aujourd’hui il devra partager sa postérité avec le nouvel album de Kula Shaker. Sincèrement, je n’y croyais plus. Telle une énième comète rock n’roll qui brilla un peu trop fort dès le début et qui se consuma à l’aune des années 2000, le groupe britannique n’était plus. Quelle heureuse surprise de voir dans les bacs de ce début d’été, un Peter Pan espiègle sonnant le retour aux affaires sonores de la bande à Crispians Mills. Vrai retour, cette fois, après l’opération remise en selle opéré par le dispensable Strangefolk de 2007. C’est du côté de Chimay, dans les Ardennes belges, que fut élaboré ce Voyage du pèlerin au sein d’un studio d’enregistrement construit pour l’occasion. Difficile de décrire la musique du groupe tant celle-ci fait dans le syncrétisme. De leurs deux premiers opus (surtout l’excellent K paru en 1996) sortaient en vrac les influences suivantes : le culte du roi indien Kulasekhara, la moustache de Georges Harrison, le folklore médiéval de Led Zeppelin, le Londres des Mods, le psychédélisme sixties, et les guitares de Deep Purple et du Grateful Dead. Aujourd’hui, un peu moins de tout cela. Les escapades pastorales aidant, le groupe a délaissé le gros son pour des voilures plus légères. Ce qu’il a perdu en énergie, il l’a gagné en raffinement avec en bandoulière ce sacro-saint sens de la pop, propre aux seuls Anglais. Ce Peter Pan RIP et cet Ophelia nous mettent directement dans la marche. Only love est convaincante en chanson summer of love 2010. All Dressed Up nous propose la rencontre folk entre l’Ouest sauvage et le dieu Vishnu. Cavalry et Ruby sont deux bijoux de ballades old school typiquement british. Seules Figure it out et Modern Blues sont d’un registre plus classique au groupe. La plantureuse Barbara Ella et sa parodie sensuelle assumée continue de dévoiler un univers des plus baroques. S’ensuit un instrumental, When a brave needs a maid, digne d’une bande-son d’un road-movie celto-mediévale de Tarantino composée par Morricone (vous suivez ?). Pour terminer le voyage se joue un gospel-blues enchanteur (To wait till I come) et rien de moins qu’un final floydien apocalyptique (Winter’s call). Chers amis, John Bunyan, dans son infinie sagesse, avait oublié que dans le pèlerinage entre la Cité de la destruction et la Cité céleste, il y avait la forêt de Chimay. Kula Shaker est là pour nous le rappeler.