50 km² pour 185 habitants, c’est royal … sauf que justement il y a sur cette commune minuscule un château de renommée internationale qui propulse le nombre de personnes en circulation à des taux de fréquentation comparables à ce qu’enregistre le Mont-Saint-Michel en été. Comme quoi il faut toujours examiner les statistiques avec une extrême attention.
Il est donc normal de trouver à Chambord une église toute proche de la mairie (à droite sur la photo ci-dessous) où l’on célèbre bien entendu des cérémonies qui prennent naturellement une allure princière.
Le site est millionnaire en terme de fréquentation, ce qui le hisse au niveau des monuments parisiens. C’est le château par excellence, celui que nous avons tous en mémoire et que l’on croit avoir déjà visité tant sa stature nous est familière. Si je connais presque tous les édifices qui ponctuent les routes et les cours d’eau des vallées de la Loire et que j’ai beaucoup de plaisir à en revisiter certains c’est incontestablement Chambord qui restera toujours à la première place.
Malgré, ou à cause de ses 440 pièces ce ne serait pas le plus confortable à vivre mais c’est le plus équilibré sur le plan architectural.
Le plus étonnant, le plus surprenant, le plus merveilleux, le plus triomphant, le plus extraordinaire, le plus incroyable, le plus grand, le plus éclatant, le plus majestueux, le plus digne d’envie … tous les adjectifs que madame de Sévigné a employé pour annoncer le mariage du duc de Lauzun et de la Grande Mademoiselle se bousculent pour qualifier l’endroit.
Qu'allais-je vous montrer que vous ignorez ?
Nous allons commencer par ce que vous connaissez sans doute tous mais que l’on aime revoir, pour se rassurer de bien connaitre notre histoire de France : le célèbre escalier, la chambre d’apparat, les terrasses et ses cheminées extérieures.
J’enchainerai par le mobilier et quelques réflexions sur le mode de vie de nos ancêtres. Puis ce sera la classique galerie de portraits.
Nous terminerons par le parc et si vous m’avez suivie jusqu’au bout vous serez récompensés par une petite gourmandise ... Dans quelques jours ce seront un spectacle équestre et la superbe exposition de Manolo Valdès dont je rendrai compte ici.
Ce que tout le monde connait de Chambord :
Le célèbre escalier où la Grande mademoiselle ne se lassait pas de jouer à cache-cache avec son père. A l'âge adulte elle conduisit le duc de Lauzun devant un miroir qu'elle ternit de buée pour y tracer du doigt le nom de son prétendant.
Les hautes cheminées (feraient-elles peur pour qu'on mette en évidence de quoi éteindre un incendie ?)
la chambre de parade dont on dit qu'elle a préfiguré ce que fut ensuite Versailles.
le mobilier précieux comme ce cartel qui est une pendule en parqueterie de cuivre et cet écran de cheminée recommandé par le corps médical pour éviter la vision directe des flammes.
la tour-lanterne, les terrasses
et ses cheminées extérieures où partout rampe l'emblème de François Ier, la salamandre sans craindre le feu fidèle à sa légende. La fleur de lys se dresse sur la tour comme le ferait un coq sur son clocher, une croix sur une église.
La marque royale est partout. Le F de François est sculpté sur les portes de bois avec la fleur de lys. Il alterne avec la salamandre dans les caissons des plafonds.
C'est son fils Henri II qui poursuivit la construction. Son initiale est visible sur les vitraux de la chapelle, orientée à l'Ouest et non vers Jérusalem.
C'est cela Chambord mais c'est aussi des endroits plus modestes où l'on apprend comment l'ont a vécu autrefois.
Un château marqué aussi par le XVII° siècle :
Il reste ce gigantesque poêle de faïence, réalisé en 1749 par la manufacture de Dantzig (Pologne) et ramené par le maréchal de Saxe pour ne pas périr de froid.
Cette tapisserie de haute-lisse est de la même époque. L'écureuil qui apparait dans le miroir, est un fragment de la tapisserie du Paon du début de ce siècle. Les ouvriers travaillaient ainsi pour voir en même temps le modèle et la réalisation sans bouger de leur siège.
Près du lit on trouve fréquemment le Cabinet (devant la tapisserie sur la photo) où l'on range ses effets personnels.
C'était une époque où l'on aimait montrer ce que l'on possédait. Ainsi, dans ce buffet à deux corps du début XVIII° on rangeait les objets courants dans la partie basse et on présentait les objets précieux dans la partie haute dont on laissait les portes ouvertes dès que des visiteurs s'annonçaient.
Le lit peut être "à la duchesse" quand ses colonnes relient directement les pieds au baldaquin.
Il est dit "à la polonaise" quand le baldaquin est plus petit que le couchage", ce qui apparait sous le règne de Marie Leczinska, fille de Stanislas, roi de Pologne, bien connu des lorrains, et épouse de Louis XV. Le tissu est un schintz, originaire d'Inde, très populaire à l'époque dans toute l'Europe.
Les chambres privées de l'appartement de parade sont bien plus sobres. C'est d'ailleurs là que Louis XIV et le Roi de Pologne ont dormi. On remarque aussi un peu plus loin ces chaises, cannées, pour suivre cette autre recommandation médicale, trouvant que les tissus n'étaient pas hygiéniques.Des portraits partout
Les portraits de nos Rois et reines émaillent les chambres.
Marie de Médicis bien sûr, veuve d'Henri IV, mère de Louis XIII. On lui doit d'avoir lancer la mode du collier de perles ... un détail qu'Anne d'Autriche (en robe de deuil sur le accrochée sur la soie rouge) et Marie-Thérèse copieront.
Louis XIV apparait reconnaissable, à ses bas de soie. Son buste, par Coysevox, est moins connu.
Louis XV, immortalisé par Louis Michel Van Loo est accroché majestueusement, près de sa femme et de son beau-père :
Chambord est aussi tout un domaine, le plus vaste parc au monde.
Accéder aux terrasses fait partie de la visite. Cela permettra d'apprécier l'étendue de la forêt que l'on aperçoit à perte de vue derrière chaque vitre:
On s'y balade à pieds, à cheval, à bicyclette, et même en 4x4. Venir une nuit écouter le brame des cerfs est une expérience très forte. Cessons de rêver : il faut redescendre. je n'ai pas encore dit un mot des œuvres de Manolo Valdès, invité d’honneur du château cet été, qui habitent harmonieusement l'intérieur comme l'extérieur. Je vous les montrerai bientôt. Ils méritent un billet à part entière.Un cavalier au loin nous appelle. J'assisterai au spectacle équestre du Roi Chevalier, mis en scène par Mario Luraschi avec sa Cavalerie, dans les anciennes écuries du roi de Saxe. Je vous le raconterai dans quelques jours.
On n'a même plus le temps d'un Chambourdin, cette petite gourmandise que je promettai en début d'article...