Je vous livre un secret: chez moi, dans un certain milieu, il est presque de bon ton de renier Xavier Dolan, de se moquer de son jeune âge, de sa supposée inexpérience et/ou de ses origines. Je peux avouer que j’ai moi-même déjà lancé à la blague qu’il m’insupportait, par orgueil, par jalousie, j’imagine surtout par incrédulité. Comment peut-on réaliser et jouer dans un film aussi étoffé que Les amours imaginaires à 21 ans?
Je l’ai vu vendredi en grande première gaspésienne, dans une salle pleine à craquer, et je suis honteusement repentante. Pardon Xavier de t’avoir cru complaisant et surtout, d’avoir douté de ton talent
En fait, le film de Dolan enchante. Il nous plonge dans l’univers raffiné et un brin décadent de deux jeunes montréalais, Francis et Marie, « hipsters » définitifs, éminemment cultivés, qui s’entichent tout deux du même adonis, Nicolas, joué par Niels Schneider. On assiste aux tentatives de plus en plus désespérées des deux protagonistes de plaire au bellâtre qui les repousse tout deux, ultimement.
Dans un univers très cool, bourgeois et vintage, Les amours imaginaires s’attarde surtout au concept du rejet et des histoires que l’on s’invente parfois pour y échapper, à tout le moins pour en amoindrir les effets. Le film est beau, contemplatif et regorge de scènes étirées par le langoureux ralenti dont Dolan se sert constamment. Le jeune acteur et réalisateur présente un film inspiré; des textures, des couleurs chatoyantes, des détails anatomiques en très gros plans qui trahissent certainement une bonne connaissance de l’histoire de l’art européen et contemporain ainsi que du cinéma de la Nouvelle Vague. À vrai dire, le long métrage ( un peu trop long, il faut l’admettre) est immensément stylisé et tout à fait jouissant. Les pièces musicales variées (de Bach à Dalida) savamment choisies rajoutent à mon plaisir. Aussi et surtout, Monia Chokri est époustouflante de vérité. Son jeu est absolument savoureux et le personnage qu’elle compose, tout à fait fascinant.
En somme, Xavier, ton film est éclatant et juste, je l’admets, j’assume et j’attends le prochain avec enthousiasme.
À très bientôt…