Musées et Politique ? L'exemple du musée du Tibet libre en Inde

Publié le 15 août 2010 par Musée-Oh!

Le 28 Juillet 2010, l’ONU censurait en Autriche une exposition intitulée The Art of Peace-Making sous pression chinoise. L’objet de la discorde : des photographies de deux artistes canadiens, Sandra Bromley et Wallis Kendal. Les clichés représentant deux religieuses tibétaines possédaient une légende peu convenable selon les autorités chinoises : « emprisonnée et battue en prison » et « enfermée comme un adolescent en raison de ses convictions politiques ». « Deux commentaires qui n’ont pas été du goût des représentants de la délégation chinoise qui se sont plaints auprès des organisateurs de l’ONU. », raconte Artclair. « Les organisateurs décident alors d’enlever les panneaux sur lesquels étaient présentées les photos en prévenant les artistes par simple mail. »

La portée politique des expositions et du musée en lui-même n’est plus à démontrer. L’institution a bel et bien un rôle à jouer depuis ses premiers balbutiements. Elle est vecteur d’identité et son propos, comme ses expositions, peut être engagé malgré le politiquement correct qui règne parfois en maître actuellement.

A Mac Leod Ganj en Inde, terre d’exil du peuple tibétain et du Dalaï Lama, le musée du Tibet est l’illustration parfaite du rôle politique de l'institution. Inauguré au début des années 2000 par le Dalaï Lama en personne, le musée au droit d’entrée symbolique, retrace avec émotion et lucidité la douloureuse histoire du Tibet, de l’invasion à la sinisation, en passant par l’exil, la détention des opposants et la destruction du patrimoine culturel tibétain. Bien conçu, le parcours est largement documenté et illustré d’archives écrites, vidéos et photographiques aux côtés de fragments de culture sauvés de la tourmente (timbres, monnaie, objets usuels, artisanat) et de mémoriaux aux victimes. Une exposition certes factuelle mais instructive et intense où le visiteur n’en ressort pas indemne tant la situation semble urgente pour la survie du peuple et de la culture tibétaine.  Néanmoins, point de pathos mais une vision ouverte sur le passé, le présent et l'avenir de la cause tibétaine. Largement visité par les touristes mais aussi par le peuple tibétain et indien, ce musée outre ses intérêts historiques et patrimoniaux sonne comme un cri lancé à la communauté internationale.

Quel rôle politique les expositions ou les musées peuvent-ils jouer selon vous dans de tels conflits ? Que pensez-vous des musées identitaires et engagés ? Exprimez-vous et donnez votre avis ! Merci de vos contributions à ce Musée-Oh! débat…

Pour aller plus loin :

L'article d'ARTCLAIR : http://www.artclair.com/site/archives/docs_article/77461/l-onu-censure-une-exposition-en-autriche-sur-pression-chinoise.php

Igor Martinache, « Les musées, lieux hautement politiques », La Vie des idées, 2 avril 2008.  http://www.laviedesidees.fr/Les-musees-lieux-hautement.html

Pascal Ratier, «Quand l'institution (ou le politique) verrouille l'exposition», sur le blog Expologie.org http://www.expologie.org/article-la-memoire-est-elle-aux-commandes-des-expositions-d-histoire-45476457.html

Une idée de lecture : Jean-Michel Tobelem (dir.), Politique et musées, Paris, L’Harmattan, 2002, 382 p. Découvrez la présentation  de Phillippe Poirrier sur http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2003-01-0146-009

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