C'est «son» été. Tous les jours, les médias doivent parler de lui, de ses déplacements, de ses déclarations, de ses
mesures. Nicolas Sarkozy en personne lui a demandé. le Canard Enchaîné n'a pas été tendre avec lui, en révélant un propos peu amène du patron de Sarkofrance à son encontre : «je sais que ce
n'est pas le meilleur».
Mais qu'importe, Brice sera là. Il ne doute de rien.
Lundi,
il était à Bobigny. Quelques mots de commentaires sur le décès accidentel d'un jeune deux jours avant: « que faisait un mineur de 15 ans, à plus de minuit, au volant d’une voiture qu’il
conduisait sans permis ? ». Il justifie ensuite ses propos accusatoires contre Lies Hebbadj, qu'il jugeait présumé coupable deux jours auparavant. C'était, dit-il, une opinion personnelle.
Qu'un ministre de la République, de surcroît lui-même condamné en première instance pour injure raciale, prenne une telle liberté avec la présomption d'innocence ne le gêne pas. Finalement, il
lance sa formule choc du jour, comme s'il s'en était préparé quelques-unes à l'avance, reprise en titre du communiqué de presse de la Place Beauveau: «Ma
méthode, c'est l'action et, plus encore, l'action de terrain auprès des policiers et des gendarmes.»
Mardi, il adresse ses voeux à la communauté musulmane pour le début du ramadan. Sa
lettre tient en une phrase: « à la veille du ramadan, mois de jeûne, d’effort, de quête spirituelle, de retour sur soi mais aussi d’ouverture aux autres, de partage et de réconciliation, je
tenais à exprimer mes vœux, à vous-même et à vos fidèles, pour que cette période soit l’occasion de développer des relations de paix et de fraternité entre les habitants, croyants ou non, de
notre pays. » L'homme ne doute de rien. Le lendemain, l'ONU s'inquiète du climat xénophone qui règnerait en France et de l'absence de volonté politique pour y remédier. Doux
euphémisme.
Jeudi, il porte plainte contre un rappeur, Abdul X, auteur d'un
clip polémiste : « Tirer sur les keufs». «Comme à chaque fois que des individus bafouent l'honneur des forces de l'ordre» commente-t-il. Cela ne changera la vie de personne,
mais ce n'est pas grave. C'est bon pour l'image.
En déplacement à Lyon, le même jour, il révèle son plan «contre les vols à main armée commis avec armes à feu»: mise en place de
policiers et gendarmes « référents-sûreté » qui aident les professionnels à se prémunir contre les risques de braquage; définition par les policiers et gendarmes de «plans
d’intervention contre les braquages»; et, suprême mesure, le renfort de moyens «les plus modernes». Hortefeux a pu sortir son arme secrète: des hélicoptères «dotés de caméras thermiques de dernière génération dont les images peuvent être immédiatement transmises aux salles opérationnelles de la police et de la
gendarmerie pour suivre les braqueurs en direct.» La police a en déjà 12. Si le sujet n'était pas sérieux, on pourrait sourire. La police française a-t-elle été à ce point mal
équipée depuis près de 8 ans ? Aux Etats-Unis, les «cop shows», ces émissions de téléréalité embarquée auprès des shériffs locaux, nous montrent toutes sortes d'interpellations filmées
depuis des hélicos... Il a aussi promis 200 dispositifs de lecture automatisée des plaques d’immatriculation (LAPI) à bord des véhicules de police et de gendarmerie. Deux cents, pas plus,
soit 0,7% du parc automobile de la police... Les seules forces de police comptent en effet plus de 30 000 véhicules.
Le ministre se félicite de la baisse de 33% des braquages de 2002 à 2007. En fait, ces vols ont toujours été marginaux en
nombre (environ 100 000 par an, sur près de 2 millions de vols), et leur évolution est loin d'être linéaire : baisse de 2002 à 2004, puis hausse en 2005 et 2006, puis baisse en 2007 et 2008, et à
nouveau augmentation en 2009 et 2010 (fin juin). Au final, depuis 2002, ils ont réellement baissé de 18 000
unités pour atteindre 115 497 à fin juin.
La formule du jour: «Mon combat pour la sécurité des Français est permanent. Les délinquants doivent le savoir : je ne
leur accorderai aucune trêve, aucun répit, aucune tranquillité»
Vendredi, il s'affichait à un péage, à
Gerzat, dans le Puy-de-Dôme, pour annoncer un accroissement des contrôles de
sécurité sur les routes. Le weekend du 14 et 15 août s'annonce chargé. Le ministre demande aux préfets trois opérations par jour et par département de contrôle de vitesse, un contrôle
«systématique et ciblé des motards» et des chauffeurs routiers. Là encore, il loue les nouveaux moyens de la police : d'abord, 65 voitures Subaru «pilotés par des agents spécialement
formés sur circuit». Souhaite-t-il transformer nos routes de vacances en pistes de Formule un ? Et ensuite... 12 hélicoptères dotés de caméras thermiques... Oui, oui, vous avez bien lu....
Les mêmes que présentés la veille pour le grand plan anti-braquage... En 24 heures, Hortefeux ressert le même plat pour deux plans différents. Chapeau l'artiste !
Vendredi toujours, il déclare
inadmissible l'agression de 5 policiers, la veille, à Corbeil-Essonnes.
«Cinq des agresseurs ont déjà été identifiés». «J'espère que les sanctions seront lourdes». Le ministre ne
s'interroge toujours pas sur ses moyens.
Vendredi encore, il se félicite des quarante campements de Roms évacués en l'espace de 15 jours. L'objectif de 300
destructions dans l'année sera atteint, selon lui. Qu'importe si une dernière évacuation a dû être reportée à
lundi 16 par décision de justice. Il avait pourtant mobilisé des gendarmes et même un hélicoptère. Les médias, comme toujours, étaient prévenus. Qu'importe si les Roms réaparaissent aussitôt,
dans le meilleur des cas das d'autres campements de fortune.
Samedi, il n'avait pas un mot pour commenter le sondage de Marianne. 70% des sondés jugent la politique sécuritaire de son patron inefficace. Brice ne
doute de rien.
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