Carlos – La série

Publié le 15 août 2010 par Mg

Carlos, personnage mythologique du terrorisme moderne, dont la jeune génération actuelle a surtout en tête les images du JT où on voyait un homme bouffi par les années et l’enfermement face à ses juges, se devait de percer jusqu’au grand écran. Enfin, grand ou petit, on ne sait plus trop. On choisira ici le petit, en version donc longue (et longue..) de plus de cinq heures consacrées à la vie de ce grand homme. Un CV en images qui joue surtout à combler les trous.

Oui, Carlos n’a pas eu une vie de saint, mais racontez trente ans (1970-2000, grosso modo), ça peut avoir l’inconvénient d’avoir à relier les points importants. Olivier Assayas, puisque c’est lui que Canal+ a débauché pour sa saga du terrorisme moderne, s’emploie donc avec moultes efforts, à nous conter l’histoire de Carlos, jeune homme visionnaire et idéaliste, très tôt attiré par le socialisme et les thèses radicales. La société ne changera que par des actions, aussi extrêmes soient elles. On voit donc un homme, moderne et international, navigué entre Londres, la Russie, la France, l’Orient, l’Afrique. Entre groupuscules, factions, organisations, en bon VRP qu’il est pour défendre la cause. Enfin, sa cause, tant le portrait qui est fait de Carlos reste celui d’un dandy du terrorisme, un peu grande gueule et capable de tout. Un allumé léger qui ira entre prise d’otages et bombes partagé femmes, fêtes et alcools pour mieux s’amuser. Un amoureux de la vie donc, qui souhaite participer au grand changement. Et le voir défiler au milieu des caïds du milieu, tenter de se place en montrant toutes ses capacités à quelque chose d’hallucinant. Carlos, un prototype du parfait révolutionnaire qui n’aura jamais la classe d’un grand, juste la folie de ses idées.

Seulement voilà, à le voir tourner en rond entre deux avions détournés, le récit s’enferme dans une boucle dévastatrice qui fait tomber le rythme assez rapidement. La série en trois parties imaginée par Assayas devient un serpent de mer, étalé sur vingt cinq ans de vie et de retournements internationaux. Carlos, la saga, se métamorphose en conte des mille et une nuit du terrorisme armé, entre décision politique et action furieuse. Mais il reste difficile d’animer toute la durée de l’histoire, et on ne décollera pas d’une histoire filmée à auteur d’homme. Pas de mythe ou de martyr ici, juste des hommes et des femmes perdus dans la lutte armée, qui s’écroulera d’elle-même après la chute du mur en 89. Voir ainsi Carlos parqué en Afrique, sans possibilité de départ sous peine d’être arrêté sitôt franchi la frontière, un homme inutile et trop gênant pour ses anciens camarades (qui ont eux mûris et sont passés politiques de bonne tenue), on en serait presque peiné.

Carlos, la série, c’est donc l’histoire d’un homme qui souhaitait ardemment devenir le leader dans sa branche, et se retrouve simple fonctionnaire pour d’autres chefs. Un passionné qui aura eu une vocation, mais raté sa chance, à trop hésiter entre choix de vie et radicalisme. Assayas n’est évidemment pas maladroit dans sa manière de filmer les choses, mais alimente trop son film, déjà très riche en informations, et aurait mérité d’étirer le tout en une dizaine d’épisodes sur le terrorisme européen des années 80. Hélas, on aura à la place 5 heures de Carlos. Loin de ne pas mériter un film (à l’heure où on nous filme Mesrine ou le Che en version longue..), celui qui est aujourd’hui incarcéré en France n’avait sans doute pas les épaules pour une si grande épopée..