Concert mardi 18 décembre soir à Pleyel. Au programme, trois cantates de JS Bach interprétées par l'ensemble du Concentus Musicus de Vienne et le Choeur Arnold Schoenberg sous la direction de Nikolaus Harnoncourt (chef de choeur : Erwin Ortner).
Au programme, les cantates : "Ach wie flüchtig, ach wie nichtig" BWV 26, "Schwingt freudig Euch Empor" BWV 36, "Wachet auf, ruft uns die Stimme" BWV 140.
Je dois préciser que je n'ai pu assister qu'à l'écoute des deux premières cantates.
Pour ma part cela faisait plus de vingt ans (déjà !) que je n'avais pas écouté Nikolaus Harnoncourt diriger des cantates de Bach. La dernière fois c'était à l'église de la Trinité à Paris avec une réverbération épouvantable. Dans la nouvelle salle Pleyel, c'est tout autre chose.
Pour les mélomanes amateurs de musique sacrée baroque, le chef autrichien fait littéralement figure de mythe. Il fait partie des pionniers qui ont revisité le corpus des cantates du cantor avec la tentative de se rapprocher le plus possible des conditions les plus proches de celles des interprétations d'origine (instruments anciens, options esthétiques interprétatives, configuration vocale et orchestrale, ...). Avec sa maturité des oeuvres anciennes et baroques, Nikolaus Harnoncourt est revenu sur certaines options qui étaient déjà en partie discutables au tout début (ex : suppression de l'appel à des choeurs d'enfants dans les registres soprano, appel à des chanteuses mezzo-soprano à la place des haute-contres pour les solistes contralto...).
L'arrivée du chef au tout début du concert a été couverte d'applaudissements dont l'ardeur révélait l'admiration du public parisien.
Pourtant, cette moitié de concert m'a laissé une sensation amère.
J'ai trouvé que ces cantates manquent immanquablement de ferveur et les interprètes semblent bien trop routiniers. Les choeurs qui doivent en principe contribuer le plus à camper le climat de chaque cantate sont bien trop apprêtés et retenus (rien à voir avec la plasticité et l'élan du Collegium Vocale de Gant ou du Choeur de chambre de Namur).
La gestuelle autoritaire et hiératique de Nikolaus Harnoncourt donne plus l'impression d'intimider et d'inhiber les interprètes qu'autre chose.
Les deux cantates, y compris la BWV 36 qui doit incarner une grande ferveur, s'avèrent finalement un peu poussives, sans aspérités. Tout cela est très correct techniquement mais la tension de la ligne est malheureusement absente et cela se ressent assez fortement. La basse continue, notamment à l'orgue, s'avère d'une monotonie confondante.
Les solistes sont de qualité assez variable. La basse Anton Scharinger est de loin le meilleur interprète. La fameuse aria "Willkommen, willkommen, werter Schatz !" de la cantate BWV 36, que j'ai trouvé un peu poussive dans la version de Peter Kooij (version de Philippe Herreweghe / Collegium vocale de Gant) est nettement plus enlevée et colorée avec Anton Scharinger.
Le ténor Kurt Streit, que j'avais déjà écouté dans des concerts précédents, s'investit beaucoup et est expressif mais souffre d'un manque de projection de sa voix. La soprano Julia Kleiter et la mezzo-soprano Elisabeth von Magnus (pourtant une habituée de ce répertoire) manquent un peu de présence et leur phrasé me semble bien trop linéaire.
En résumé, un concert qui laisse une sensation amère. Le manque de densité et la caractère un peu trop lisse de l'interprétation y sont certainement pour beaucoup.
Je ne sais pas si la fameuse et ample cantate chorale BWV 140 a rattrapé le tout en seconde partie.
A force de savourer les pièces exceptionnelles que nous offrent Philippe Herreweghe et Masaaki Suzuki, on devient vraiment difficile.
Ce serait bien trop injuste (voire stupide) de dire que Nikolaus Harnoncourt n'a finalement plus grand chose à nous raconter sur Bach. On peut pardonner que des ensembles d'un niveau aussi prestigieux soient en petite forme. Mauvaise pioche tout simplement.
Pour plus de détails, liens vers une critique bien plus enthousiaste du site forumopera.com (syndrome d'auto-suggestion ?).
Ce concert était enregistré pour France Musique mais j'ignore complètement la date de diffusion.