Cet article fait mentir mon tweet : si, je vais parler de Lovely Bones. Cependant, ça sera bref, pour écourter le massacre et me permettre toute juste suffisamment d’évacuer ma déception. Le dernier film de Peter Jackson avait une lourde responsabilité : celle d’être la seule bande-annonce intriguante au milieu d’une dizaine plus ou moins subies lors d’une précédente séance zombiesque. De plus, l’idée était intéressante et le nom du réalisateur, plutôt bien en vue chez moi suite à l’éblouissante trilogie du Seigneur des Anneaux. Et pourtant, même sans attendre quoi que ce soit de spécial de ce film, je ne pense pas que j’aurai pu échapper à ce qui m’a le plus choqué : le visuel.
Lovely Bones contant l’histoire d’une adolescente assassinée, coincée dans l’entre-deux monde qui sépare la terre du paradis, la question de la représentation de cet univers s’est posée avant la sortie du film. Les premiers visuels laissèrent quelques sceptiques, mais comme c’est un sport national des forums de prédire la qualité d’une oeuvre avant même sa sortie, je n’y ai pas vraiment fait attention. Sauf qu’ils avaient raison. La première partie du film se déroule assez bien malgré quelques clichés : Suzy est une adolescente comme les autres, qui aime la photographie et est amoureuse d’un garçon de son lycée, représentation typique du poète romantique passionné. Lors d’une scène digne du teen movie le plus classique, le beau jeune homme avoue son amour pour la timide rousse en face d’un casier après qu’elle ait bien sûr fait chuter toutes ses affaires dans la panique. Malheureusement pour eux, ils ne pourront pas se revoir car Suzy mourra brutalement assassinée par un voisin sur le chemin du retour… Problème : si elle monte au ciel, on descend plutôt en enfer.
En effet, toutes les scènes représentant cet univers parallèle, dont Suzy ne peut s’échapper tant que l’enquête policière n’a pas atteint son but, empêchent catégoriquement d’apprécier tout ce qu’on peut racler de bon au fond du pot. Une agression constante mélangeant niaiserie new age, effets excessifs et tunnels de lumière qui ferait presque pleurer quand je repense au pied que j’ai pris tout au long du marathon Lord of the Rings. Un déluge de kitscherie changeant de ton d’une seconde à l’autre et soulignant le message non pas au stylo rouge, mais plutôt au seau de peinture. Car il y a bien un message, et il n’est pas inintéressant, loin de là : avec Lovely Bones, Peter Jackson a tenté de faire un film sur le deuil et l’acceptation de la mort, sauf qu’il n’y a aucune subtilité. Suzy erre coincée tant que ses parents et sa famille restent attachés à enfermer le coupable derrière les barreaux, plutôt que de chercher la force de continuer à vivre : soit, pourquoi pas. Sauf que, rien ne prend, aucune émotion, aucun passion pour ce qui se passe à l’écran, écrasé par le visuel délirant et les passages hors-de-propos (la grand-mère, drôle mais sans aucun rapport), notre intérêt pour les protagonistes s’anesthésie.
Et pourtant. Et pourtant, je m’émeut vite, je suis fleur bleue et j’ai la larme facile. Mais il me faut un minimum de subtilité pour que cela soit efficace. Faire apparaître le visage de l’amoureux sur toute la surface d’un lac ne fait pas partie de ce que je trouve subtil. C’est affreusement ridicule ! Cette esthétique m’a rappelé le style des pochettes de Nightwish, et ce n’est pas un compliment. Le thème amoureux tombe complètement à plat, et, finalement, au milieu de toute cette bouillie, seul le personnage du tueur maintient l’attention. Malgré un jeu excessif lors de la scène de la trappe, le petit côté thriller/enquête qui se dessine dans ces scènes m’a plu et ce discret voisin est quand même plutôt angoissant. Dommage que cet aspect ne soit pas plus présent, une constatation parlante sur un film qui n’arrête pas d’hésiter entre des tons et des thèmes sans vraiment les creuser. A vouloir tout faire à la fois, on ne fait plus rien, et certains personnages qui intriguent restent carrément sous-exploités, comme l’étrange femme aux cheveux noirs. Quel dommage pour la jolie Saoirse Ronan, dont l’interprétation convaincante aurait pu sauver le film s’il n’avait pas autant de défauts.
Comme ça aurait pu être bien… L’histoire est jolie, l’idée me plaît, mais l’exécution ne m’a pas du tout convaincu. Peut-être me laisserai-je tenter par La nostalgie de l’ange, le best-seller d’Alice Sebold dont Lovely Bones est l’adaptation. En tous cas, ce film est destiné à des gens qui n’ont pas les mêmes goûts que moi, c’est sûr. Ils ne sont ni mieux que les miens, ni moins bons, juste complètement différents. Simplement, je ne pensais pas que le style fond d’écran Windows + photoshoppage de Saint-Valentin sortirait un jour du cercle d’amateurs où il aurait du rester.