Nous en sommes au Café littéraire du samedi matin, L’Absent, où je m’assois devant Alain Mabanckou (A.M.), Joël Des Rosiers (J.D.R), Hélène Dorion (H.D.), Dany Laferrière (D.L.). De grosses pointures. Il y a une fraîche odeur de poésie dans l’air, deux poètes nettement identifiés comme tels (J.D.R et H.D.), Dany Laferrière la courtise mais, ce matin-là, c’est la prose imagée et poétique d’Alain Mabanckou que j’allais découvrir. Pousser certaines idées hors du raisonnable et du raisonné m’apparait poétique, comme écrire les Mémoires d’un porc-épic. J’ai trouvé bien amusant que A.M. raconte la réception de ce roman en France accueilli par des « Oh » et des « Ah » d’effarement devant ce farfelu aberrant de donner le personnage principal à un porc-épic dans un roman pour adulte. Il a osé, et récolté Le Renaudot. Ce n’est pas rien, et maintenant que j'ai entendu ce conteur débordant d’humour imaginative, c'est plus facile à comprendre.
Joël Des Rosiers n’est pas que poète, il est chirurgien et psychiatre. Essayiste aussi. En 1999, il reçoit le Prix du Festival international de poésie et le Grand Prix du livre de Montréal pour Vétiver. Il a une renommée, comme on peut l’avoir en poésie devant public réduit. Même si je ne suis pas une fervente de poésie, j’ai tout de même son recueil « Savanes » dédicacé... que j’ai peiné à lire. J’ai aussi peiné à comprendre les théories qu’il nous a exposées en ce samedi matin. Je ne suis pas surprise que cet auteur soit essayiste, il aime expliquer et il explique longuement. Un être érudit, original, mais a-t-il le don de la communication ? Je n'en suis pas sûre ! J’ai même eu l’impression (j’ai bien dit l'impression !) que l’animatrice, Danièle Bombardier hésitait à lui redonner le micro, tellement il le tenait longtemps une fois qu'il l'avait. Un homme avec une belle prestance (vous me surprenez en flagrant délit de futilité !)
Dany Laferrière me surprend toujours par la justesse de ses interventions, assez que je finis par me demander ; mais lui arrive-t-il d’être à court d’inspiration ? Il jongle vite et efficacement dans sa tête. Il saisit le présent, les autres qui l'entourent en font partie , il prends de grandes inspirations de l’autre. Je me suis plu à l’observer "regardant" et l’observer "écoutant". J’étais fasciné et me disais, que va-t-il sortir, que prépare-t-il dans sa tête en cet instant ? Par exemple, il me semblait captivé par les propos d' Hélène Dorion et là, j’avoue le comprendre tout à fait. Cette dame m’a secouée (je l’ai gardée pour le dessert comme vous voyez !), coup de cœur des Correspondances, en tant qu’auteure possiblement, ce que je pourrais dire après l'avoir lu, mais en tant qu’être humain qui regarde la vie, oui. Si ses textes sont comme elle, ils vont plus loin que la poésie ; ses notions de la vie englobent la poésie, la comprennent. C'est évident que mon coup de cœur vient d’affinités de perceptions. Une poésie spirituelle, une poésie qui donne du sens par la voie des sens. Après le Café littéraire, mystère, tous ses livres étaient disparus. J’ai hâte de la lire, j’ai été à la librairie aujourd’hui, je n’ai trouvé aucun de ses titres. Sous l’arche du temps m’intéresse pour ce qu’on en dit : « ouvrage qui regroupe des essais autour de l’écriture, de la littérature et de la place de l’art dans la société ». Ou le récit «Jours de sable » pour lequel j'ai entendu plusieurs s'exclamer. Si vous êtes comme moi et la connaissez pas ou à peine, Hélène Dorion est traduite et publiée dans plus de quinze pays, son œuvre lui a mérité plusieurs distinctions et prix littéraires, dont le Prix du Gouverneur général du Canada, le Prix Alain-Grandbois, le Prix Aliénor, le Prix International de Poésie Wallonie-Bruxelles et le Prix du Festival International de Poésie de Roumanie.
Pour terminer en beauté sur dame poésie, cette mal aimée, souvent parce qu’elle fait peur, ce que Dany Laferrière a proféré peut être pris pour une banalité, mais elle m’a donnée toutes les permissions. Je vous la déclare en mes mots : ne lisez pas la poésie de bout en bout, elle se glane, se pécore, se savoure petite bouchée par petite bouchée ...