C’est un article de Sud-Ouest qui vient d’attirer mon attention, mettant le doigt sur un phénomène que je n’ai absolument pas repéré lors de nos vacances newyorkaises : l’alcool le plus vendu dans le Bronx et à Harlem est la vodka, suivie de près par le cognac. Quel cognac ? pas du cher, pas du vrai, mais du trafiqué bas de gamme qui fait frenchy, parce-que vues les quantités éclusées par une population qui n’a pas trop le sous, l’authentique Hennessy reste dans la réserve. Cette mode du cognac, qui étiquette son rappeur en puissance, n’est pas nouvelle : la Charente-Libre évoquait déjà le phénomène il y a cinq ans, remontant au passage l’historique de ce goût.
En deux mots : le yankee carbure au whisky, dans les films voire dans la vraie vie. Ça fait mec, viril, ça te pose un Ricain comme le Ricard te caricature le Marseillais. De retour de guerre (les deux mondiales), les soldats US rapportent quelques souvenirs dans leurs malles et quelques habitudes dans leurs corps. Les blacks, victimes de discrimination et cherchant à faire leur trou dans un pays qui leur fait plus souvent des trous dans la peau, les blacks, disais-je, s’entichent du breuvage classe de chez classe, à côté duquel le whisky fait plouc : le cognac.
La tendance était lancée, qui n’a pas vraiment cessé. Le cognac, vrai ou faux, est aujourd’hui la boisson des rappeurs (vrais ou faux aussi), qui le chantent et le montrent même dans des clips (la marque Courvoisier en étant bénéficiaire). Le magnifique alcool ambré n’est plus perçu comme un digestif classieux de fin de souper avec cigare barreau de chaise, mais comme un alcool vraiment fort, qui arrache, qui cogne, qui déglingue. Pas sûr que ce soit cette image-là qui ravisse le plus les producteurs de cognac …
PS : la photo qui illustre cette note n’a été prise ni dans le Bronx ni à Harlem, mais dans West Village.