“Les Français vont devoir s’y habituer : il y a à l’Élysée un homme qui en a… Et qui s’en sert” N. Sarkozy, propos rapportés par Le Canard Enchainé (jamais démentis)
Une frénésie irrépressible. La caractéristique saillante de l’exercice du pouvoir façon UMP. Frénétique dans sa manière de vouloir légiférer sur tout. Tout le temps. Une manière de gouverner à coups de lois. Le président N. Sarkozy fut élu sur le dynamisme. Pour le (dé)montrer, il délivre un règlement pour chaque fait divers, chaque sujet. Ses apôtres font de même. Dernier ersatz “bolchevique” en date, le député UMP Y. Bur invente le paquet de cigarettes sans logo. Raison invoquée, la lutte contre le tabagisme… Une broutille comparée aux 20 lois sécuritaires de N. Sarkozy, une peccadille au regard des annonces sur la déchéance de nationalité, une bagatelle aux vues du contrôle d’Internet. Mais révélateur d’un état d’esprit phagocytaire.
L’impression du mouvement, la sensation du contrôle.
Pappy State (ou Daddy State)
L’État sarkozyste est un “Pappy State”, dont le but n’est finalement pas de réguler, de lutter contre les inégalités par exemple, de faire en sorte que les chances de chacun soient (vraiment) égales sur la ligne de départ de la vie ou d’atténuer les effets dévastateurs de la crise sur les moins nantis. Par son empilement de lois, sa multiplication de décrets et son ambiance oppressante, il constitue surtout un état paternaliste, moralisant et normatif. Les Français qui ont voté pour le leader de la droite ont bien choisi (et en connaissance de cause pour nombre d’entre eux) un papa. Certes “jeune” et “dynamique” (plus probablement hyperactif voire dérangé). Mais néanmoins fouettard. Et surtout une parfaite démonstration du virilisme élevé au rang de gouvernance. Ceux qui s’étonnent devant le désastre aujourd’hui devraient fouiller leur inconscient. On élit par ce type de personnage, ce profil, sur un coup de dés. Les récents développements sur la fuite en avant sécuritaire montrent bien que « les Français » en demandent encore. Pas rassasiés d’inconstance, de coups de gueule, de haine d’un parâtre vaguement phallo.
Libérer pour asservir
Réguler dans une perspective progressiste ne fait pas partie du projet de la droite. Bien que le phrasé puisse parfois prêter à confusion. En matière économique c’est l’inflation de lois pour “libérer la croissance” (pack TEPA). Intervenir certes, pour défricher le Code du travail, saccager la répartition générationnelle, créer une société axée sur le travail et la production. Avec comme l’unique finalité, conserver les rapports de domination. Un arsenal de lois déployé pour une minorité qui n’en avait pas un besoin impérieux. Tant d’énergie, de discours pour si peu. Même les (vrais) tenants de l’utopie libérale n’y consentent (finalement) pas. Comment prétendre à la responsabilisation, quant à son épargne, la capitalisation de sa retraite, si dans tous les autres domaines de la vie le citoyen slalome de directives antitabac en sanctions routières et autres contrôles de recherche d’emploi ? Comment faire confiance aux hommes d’un côté quand on les jugule de l’autre ?
La droite UMP chevauchant son crypto-libéralisme se dépêtre comme elle le peut de ses contradictions. Comme le paradoxal “légiférer pour libérer”*. L’objectif, dompter les citoyens par des directives anxiogènes et moralisantes. Elle y parvient plutôt bien. Les entrepreneurs qui gouvernent ce pays ont saisi la quintessence de ce système bancal. Débilisation du gogo, en le dépouillant des instruments du savoir et l’abreuvant de perpétuelles insanités médiasphériques. Puis tétanisation du péquin, en instillant la paranoïa sécuritaire et raciste. Ils prétendent que la multiplication des uniformes dans les rues rassure la plèbe, alors que cette présence anxiogène ne vise qu’à sa domestication. Le sarkozysme est un libéralisme, bien que décati, réaliste et pragmatique. Qui abuse des leviers de l’État pour ramollir les résistances sociétales et maintenir les intérêts particuliers. Il s’emploie à sermonner le citoyen qui en redemande. Ce qui devrait constituer une anomalie culturelle et démocratique se trouve plébiscité. En France à l’étiage, cette perversion pèse au minimum 30%, un votant sur trois… La République croque-mitaine a donc de beaux jours devant elle.
*Tenant déjà compte du nombre de lois et du fond de l’air sécuritaire.
Vogelsong – 12 août 2010 – Paris