Plus de 91 000 documents top-secrets de l’Otan sont sortis dans la presse. Il s’agit des documents réalisés au jour le jour par l’Otan en Afghanistan, et qui racontent ce qui s’est passé dans la journée.
Et vous savez ce qu’on y apprend ?
Rien.
91 000 documents top-secrets portant sur une guerre impopulaire divulgués à la presse, et on n’apprend rien de nouveau. Oh, certes, il y a bien quelques détails intéressants, mais d’une manière générale, ces documents n’apportent rien de neuf. Sans doute seront-ils une source inépuisable de thèses de sociologie des organisations, et il est plus que probable que quand historiens et journalistes chercheront à écrire un livre sur le déroulement de la guerre en Afghanistan, ils se baseront en bonne partie sur ces documents.
Mais pour le reste, néant.
Qu’est-ce qui est intéressant là dedans ?
Et bien c’est que malgré le fait que la guerre soit à l’autre bout du monde, qu’il y ait très peu de journalistes sur place et que les habitants soient incapables de balancer les images filmées par leurs portable ultramoderne sur Youtube, malgré le fait que la guerre soit impopulaire, les gouvernements occidentaux sont incapables de mentir pour mieux faire passer la guerre à leurs opinions publiques.
Mieux, ils n’essayent même pas.
Ce que ça prouve, c’est que les conspirations, les complots sont impossibles. S’il n’y a pas eu, même de minuscules petits complots en Afghanistan, il n’y en a pas pour des trucs énormes. Tout simplement parce que les gens parlent, et qu’à part dans les films de Roland Emmerich, il est impossible pour un gouvernement de tuer des dizaines de personnes sans que ça se remarque. Et sans que les tueurs se mettent eux aussi à parler.
La vérité, c’est que les conspirationnistes sont effrayés par la complexité du monde. Ils préfèrent penser que telle ou telle classe sociale, la haute-bourgeoisie anglo-saxonne par exemple, qui compte, rappelons-le à tout hasard, des centaines de milliers de personnes au bas mot, s’est mise d’accord pour agir de telle ou telle façon, plutôt que de comprendre qu’il y a des centaines de milliers d’intérêts individuels et collectifs influencés par le conformisme, le mimétisme, la peur, la colère, bref, tout ce qui fait que ces gens sont malgré tout humains, ce qui explique tout à fait que ladite classe sociale se soit comportée de façon suicidaire. (Thèse de la crise provoquée à dessein.) Il est tellement plus rassurant de s’imaginer que le 11 septembre a été provoqué par le gouvernement américain plutôt que de se dire que vingt pelés et quatre tondus (enfin, tondus…) sont capables de causer un séisme planétaire. Il est tellement terrifiant de s’imaginer que des virus comme le Sida peuvent surgir parce que c’est la vie et c’est comme ça qu’on se raconte qu’ils ont été fabriqués par les blancs, les juifs ou les homosexuels. Il est tellement plus excitant de penser que Kennedy a été la victime d'un complot visant à l'empêcher de quitter le Viêt-Nam et de réaliser des réformes sociales que de reconnaître qu'il a été tué par un fou. (Bon, faut être sacrément débile pour y croire à celle-là, parce qu'à part engager les Etats-Unis au Viêt-Nam et sauter Marylin Monroe, Kennedy n'a strictement rien fait de son mandat.)
Le monde est complexe, pour une simple et bonne raison qui est que l’esprit humain est complexe. Ce n’est pas parce que des industriels ont intérêts à la guerre que ce sont eux qui la provoquent : ils peuvent la pousser, mais les guerres sont provoquées par l’avidité humaine, la lâcheté ou l’ambition des dirigeants, par la démographie, sans qu’il soit besoin qu’un groupe d’industriel choisisse sciemment de la faire. Le cas de l’Irak est à cet égard frappant : la guerre a été une excellente chose pour le complexe militaro-industriel, mais si elle a été déclenchée, c’est parce que les américains avaient besoins de taper sur quelqu’un après le 11 septembre et que l’Afghanistan ne suffisait pas, et parce que George W. Bush avait de toute évidence un sacré problème à régler avec son père.
D’ailleurs, prenons le dernier exemple de complot connu en date. Celui qui a servit de prétexte à l’invasion de l’Irak : les armes de destruction massive. C’était un complot. Et personne n’y a cru.
Pour finir, le témoignage d’un ex-conspirationniste.
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