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Si le rapport du Bureau de l'intégration dit vrai, l'UE est bien totalitaire

Publié le 12 août 2010 par Francisrichard @francisrichard

img014L'Hebdo de cette semaine poursuit son travail de sape. L'hebdomadaire romand, qui souhaite en termes à peine voilés que la Suisse adhère un jour à l'Union européenne, prétend ici avoir eu accès au rapport rédigé par le Bureau de l'intégration, BI ici, chargé de la réflexion sur la politique européenne de la Suisse. Ce rapport, qui se trouve sur le bureau du Conseil fédéral, constituerait "un véritable réquisitoire contre la poursuite de la voie bilatérale". Le contraire eut été étonnant.

Ce rapport, en effet, a été élaboré sous la direction d'Urs Bucher, qui vient d'être remplacé le 1er août dernier par Henri Gétaz à la tête du BI. Fin 2005, Urs Bucher déclarait déjà dans un entretien accordé à l'e-magazine du Credit Suisse ici, peu avant la publication du précédent rapport élaboré par ses services il y a 4 ans :

"Sur le fond, je peux cependant affirmer que si la Suisse devenait membre de l'UE, elle disposerait, sur le plan politique, d'un droit de codécision réel. Sur le plan économique, elle bénéficierait d'un accès sans restriction au marché intérieur, c'est-à-dire que toute discrimination disparaîtrait. Cela dit, il nous faut également examiner les autres retombées d'une adhésion, notamment celles qui concernent le fédéralisme et les droits populaires, ainsi que les coûts de l'entrée dans l'UE."

Il disait clairement de quel côté son coeur balançait, du côté de l'adhésion, même s'il avait encore quelques réticences sur le déficit démocratique européen, dont il ne semble plus être question dans le rapport 2010... Pourquoi ? ... Il cultivait l'illusion que la Suisse aurait un "réel droit de codécision", avec 10 voix sur 345 au Conseil et 20 députés sur 750 au Parlement... Un droit, sans aucun pouvoir... 

Depuis l'Union européenne n'est plus aussi flambante qu'elle pouvait encore le faire croire aux naïfs de l'époque. Ses échecs successifs ne l'inclinent ni à la patience, ni à la négociation. Les moyens financiers lui manquent, mais son pouvoir de nuisance est encore suffisant pour chercher à imposer par la force ce qu'elle est devenue incapable d'obtenir par la négociation, faute d'arguments en sa faveur. C'est plus facile, évidemment. Elle l'a prouvé dans l'affaire du secret bancaire, où la Suisse s'est malheureusement bien mal défendue, alors qu'elle avait le droit et la morale pour elle.

En dehors de L'Hebdo ce rapport ne réjouira que le Nomes, le Nouveau mouvement européen suisse. Sans le moindre esprit critique, ce dernier publie ceci, en date du 20 juin 2010 ici :

"Les Suisses sont nos amis. lls ont les mêmes sensibilités que nous et parlent le même langage. Mais nous ne pouvons plus leur faire les mêmes cadeaux que ceux auxquels nous avons consenti avec le double paquet des accords bilatéraux. C’est le message qu’ont voulu transmettre les représentants du Parlement européen et de la Commission à une délégation du nomes en visite à Bruxelles." ?

Comme si l'Union européenne était du genre à faire des cadeaux...

Le rapport du BI dirait :

"Les récentes évolutions font clairement ressortir une érosion dans les marges de manoeuvre dont dispose notre pays dans ses relations avec l'UE au moyen de l'instrument de la voie bilatérale."

L'Hebdo , sous la plume de Michel Guillaume, illustre ces propos en écrivant :

"En s'étant élargie de 15 à 25 membres en 2004, puis à 27 en 2007, l'UE s'est rigidifiée dans ses méthodes de travail avec les pays tiers comme la Suisse. Fait nouveau : elle remet dorénavant en question l'équivalence des droits suisse et européen. "A vous les Suisses de vous adapter et de reprendre systématiquement l'évolution de l'acquis communautaire", exige-t-elle".

Elle exige. Circulez. Il n'y a rien à discuter...

Michel Guillaume trouve son inspiration au Nomes , qui ne dit pas autre chose le 20 juin 2010 ici, s'il la formule autrement :

"Les temps ont changé. La Suisse ne discute plus avec les quinze de l’Europe occidentale, mais avec l’Europe des vingt-sept. Or, depuis l’an 2000, les exceptions consenties lors de nouvelles adhésions ne sont plus possibles. Les nouveaux membres ont souvent dû faire de lourds sacrifices pour reprendre l’ensemble de l’acquis communautaire, c’est-à-dire l’intégralité des règles européennes. Ces pays ne comprennent pas et n’acceptent pas que les entreprises suisses puissent bénéficier de règles plus favorables que celles des membres de l’Union. Le Conseil des ministres de décembre 2008 a concrétisé cette nouvelle situation politique par une décision formelle. Désormais, tout accord avec un pays de l’AELE sera évolutif. Il devra s’adapter automatiquement à l’évolution de la législation européenne."

L'Hebdo raconte alors le chantage auquel se livrerait l'UE lors des "discussions" des prochains accords bilatéraux :

"Elle ne veut pas faire de concessions sur les marchés de l'agriculture ou de l'électricité sans obtenir en contrepartie des cantons qu'ils suppriment leurs régimes fiscaux accordant des exemptions d'impôts à des holdings étrangers venant s'implanter chez eux. "Cette attitude pourrait bloquer l'adoption de nouveaux accords bilatéraux", craint le rapport."

La belle affaire ! Comme le disait Fulvio Pelli, le président du PLR, dans le précédent numéro de L'Hebdo [voir mon article De la faiblesse de certains arguments de Fulvio Pelli à propos de l'UE ] :

"Si nous ne parvenons pas à trouver d'accord, tant pis. La Suisse continuera à exister tout de même."

Suivraient dans le rapport l'analyse des six options qui se présenteraient à la Suisse et que l'on pouvait déjà trouver dans le document d'Avenir Suisse [voir mon article "La souveraineté en cause" publiée par Avenir Suisse ]:

- le gel de la voie bilatérale

- l'accord-cadre

- la participation à l'EEE, Espace économique européen, rejeté en 1992

- la pleine adhésion à l'UE, qui coûterait 5,4 milliards moins "deux milliards qu'elle [la Suisse] toucherait pour l'agriculture et l'aide régionale notamment"[on peut toujours rêver...].

- l'adhésion sans l'euro

- la poursuite de la voie bilatérale

Au grand dam de L'Hebdo - "Mercredi 18 août prochain, le Conseil fédéral a rendez-vous avec l'histoire.[...] C'est déjà sûr: le Conseil fédéral ratera ce rendez-vous." - ce serait cette dernière option que choisirait ce jour-là le Conseil fédéral, moyennant la proposition de payer 300 millions de francs de plus par an au titre de sa "contribution de solidarité pour les nouveaux membres de l'UE"...

Sur ce point Fulvio Pelli n'avait pas dit non la semaine dernière :

 "Tout dépendra de la contre-prestation européenne, par exemple sur l'accord de la fiscalité de l'épargne qui doit être révisé."

Encore une fois la Suisse ferait bien de se montrer plus ferme avec l'UE en lui rappelant tous les profits qu'elle retire des accords bilatéraux. Autrement ce serait laisser libre cours à sa frénésie totalitaire...

Francis Richard

L'internaute peut écouter  ici sur le site de Radio Silence mon émission sur le même thème.


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