Magazine Photos

Appartenance à part (poème).

Par Ananda

Nulle part est partout.
Qu'importent les pays
pour les nomades qui ne savent
s'attacher.
Ici est toujours à cheval sur
ailleurs
et quelque soit la durée de tous les séjours
les racines rechignent à s'ancrer dans le sol,
la nostalgie demeure incrustée
dans les yeux,
l'impression d'escale n'est jamais
très très loin...
elle n'arrive pas à se faire oublier
et l'on ballade son trop-plein de souvenirs
d'arrachement qui couturent comme des plaies
de place en place, en ombre sans cesse en retrait,
confinée sur le seuil
de chaque point d'accueil;
ici ou ailleurs,
la différence n'est pas,
ainsi le veut la vie qui vous a ballotté,
qui vous a fait réunion de tous les pays
et patchwork enrichi de tous les univers
au point que vous ne pouvez pas savoir ce qu'est
l'appartenance, ayant le globe
pour nation.

Les heures sont brèves
qui nous séparent de la séparation - voici
maintenant que je réalise
Les heures n'ont pas tenu leur promesse d'éternité, trompeuse
non, les heures aux fauteuils d'osier et aux oiseaux de paradis
ces moments-là qui semblaient ne devoir jamais se terminer
enchâssés dans une nappe un essaim au grain intemporel
Ces heures de varangue* de peau fraîche
mordue de soleil
ces heures orange, opaques, postées à l'aurore d'une vie
m'ont trahie, ont trahi la foi d'enfant que je mettais en elles.
Ne me restent plus d'elles que des ombres et des souvenirs
désormais glacés comme tombeaux des morts qui m'ont laissé choir.
Les heures sont brèves, si juteuses et si étirées qu'elles soient ;
les mangues n'ont plus ce goût de thérébentine que j'aimais
je ne suis plus environnée que, parfois, par mes morts cendreux
où sont leur chaleur et le débordement pulpeux des beaux fruits ?

* varangue = véranda en mauricien.

Patricia Laranco.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Ananda 2760 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines