J'écris ce que je veux. Je montre ce qu'il me plaît. Je remercie qui bon me semble. Ici, je suis en quelque sorte le créateur de ma propre existence. Une réalité choisie, comme un rôle que je me suis donné.
Il est 10h30. J'ai envie de dire que je viens de me réveiller. J'ai envie de dire que j'écoute une musique qui me rappelle plein de souvenirs. Mais cette musique, je ne l'écoute pas vraiment. Elle est dans ma tête.
Même pas.
Je me convaincs qu'elle y est, juste parce que j'avais envie de l'écrire...
Je me suis fait un thé au lait et je suis déjà à ma troisième cigarette.
Non, je n'ai pas réussi à m'en défaire. De la cigarette.
Un détail qui aurait mieux fait d'être omis...
Ç'aurait fait plus chic, un whisky avec quelques glaçons, au lieu du thé au lait un peu pépé. Mais l'homme au whisky et à la cigarette est un rôle qui ne me convient pas...
Le jazzman qui envoûte l'auditorium et fait pleurer les bonnes femmes, ça, ça m'aurait plus...
Ici, on me voit mélancolique. L'étiquette est implacable. Un peu réducteur. J'en suis pourtant l'inducteur. Parce que je choisis mes mots et j'écris ce que je veux. Comme je suis entrain d'écrire que j'ai une boule au ventre et que j'ai envie de chialer. Mais ça, c'est faux. Pas aujourd'hui. Pas en ce moment.
Le tic-tac des pendules sonne comme des métronomes mal orchestrés. C'est un peu angoissant quand on y fait gaffe.
Il y en a quatre dans le salon. De pendules, pas de métronomes. Elles ont plus une fonction décorative car je ne regarde jamais l'heure dessus. Pour ça, j'ai mon portable. On est high-tech, ou on ne l'est pas...
Il y a aussi le ronronnement du frigo. Ainsi que le clac-clac du clavier de l'ordinateur lorsque mes doigts viennent agressivement frapper les touches blanches jaunissantes.
C'est toute la musique de la pièce. Une musique très mécanique. Très froide. Très rigide. Trop.
Pas de jazz. Même si j'ai envie d'écrire le contraire.
Et pourtant, j'aime pas le jazz. Je sais pas pourquoi j'en parle. Comme si cela me manquait...
J'allais oublier. Il y a aussi le son de l'eau qui fuit dans les toilettes et qui apporte un peu de féminité à l'ensemble. C'est un son plus aigu, plus fluide. Plus agaçant...
Je suis en congé. Mais je ne suis pas parti. J'aurais pu écrire que je m'ennuie, histoire de m'apitoyer un peu sur mon sort. J'aurais pu assombrir le tableau qui pend sur le mur blanc de ma réalité comme un triste suicide mal arrangé. J'aurai pu raconter l'histoire d'un amour impossible que le temps a fini par dissiper. Je préfère imaginer mon héros...
Introspection. Pluie. Faim. Gerbe. Continu. Contingent. Délectation. Affligeant. Mégot. Centre. Dépit. Oui. Faim (bis). Étrange. Calme. Frein. Doux. Chicaner. Drôle. Non. Peut-être. Envie. Faim (ter). Joyeux. Acide. Envies.
Des mots qui me viennent spontanément. Je les pose. Je les couche. Ou je les écris. C'est comme vous voulez.
Poser, coucher ou écrire ?
Chaque chose en son temps.
Là, j'écris. Ce que je veux.
Tiens ! Soporifique. Ça faisait un petit instant que je voulais l'écrire ce mot. C'est le jazz. Ou mes pensées. Ou ce que j'écris. Ou les trois, qui me l'inspirent.
En même temps, je m'amuse. Avec les mots.
C'est un peu paradoxal d'associer les termes soporifique et s'amuser...
C'est pas grave.
13h00. Je crois que je vais passer ma journée ici (sur mon blog)
Parce qu'ici, j'écris ce qu'il me plaît. J'écris ma vie sans les corvées.
J'oublie que j'ai des courses à faire, que je n'ai pas encore becqueté, que j'ai du linge à laver. Enfin... j'écris que j'oublie, mais je n'ai pas vraiment oublié. Sinon je ne l'écrirais pas...
Ici, je suis le héros de mon propre roman. Même si je n'ai pas le romanesque d'une Madame Bovary ou l'étoffe d'un Julien Sorel.
Mon héros aurait dû être un musicien virtuose. Hétéro évidemment. Une sorte de Dieu grec des temps modernes...
Mais il a loupé son coche. Quelque part. À un moment donné de sa vie...
Remarque, il s'en fout. Parce qu'il reste le personnage principal de mon roman à deux balles (pour la rime).
15h00. Après deux, trois petites courses. Parce qu'un héros a aussi besoin de bouffer...
Où j'en étais...?
Ah oui !... Mon roman...
"Un roman d'amitié, qui s'élance comme un oiseau, pas une histoire d'amour vacances..." Elsa et Glenn quelque chose. 1988. J'avais quinze ans. Ça va. C'est pas trop la honte... Mais ça me prédestinait quand même à devenir homo...
Où j'ai loupé mon coche ?...
Les années 80. Mon enfance. Ma puberté. Mon adolescence...
Et puisqu'on parle de musique, le Top 50. C'était une belle époque pour la variété française. Il y avait de tout, même de la merde. Mais j'adorais. Je me souviens encore du jingle avec des chiffres en vert qui défilait de 1 à 50, à contre rebours.
Je me souviens aussi du cahier où je collectionnais les paroles des tubes de l'époque. Je crois que c'était dans "ok magazine" que je les récoltais. Mon dieu que j'étais déjà tellement... homo !
Les années 80, c'était également l'apparition des premières associations gays et lesbiens face à une maladie qui n'en finissait plus de faire des ravages. Le cancer des pédés on l'appelait...
Je n'oublie pas non plus "touche pas à mon pote" ou les resto du coeur avec à leur tête, un Coluche légendaire.
Et comment ne pas mentionner Dorothée, celle qui a bercé toute une génération d'enfants, celle qui a importé les meilleurs dessins animés japonais et fait connaître les paroles déjà cultes des génériques de Candy ou de Goldorak !
Je crois que mon héros a toujours tout fait de travers. Mais il me semble que ce soit un joli travers, celui qui donne au personnage un certain charme, une certaine sympathie...
À part le fait d'être homo et gaucher, mon bel héros est aussi un étranger, dans l'âme... et la couleur. C'est bien. Ça donne un côté exotique à l'histoire !
J'écrirais aussi qu'il a passé un CAP quatre ans après son BAC, ce qui est un peu bête... Il a aimé une femme, après avoir goûté aux hommes... Peu commun... Généralement, c'est l'inverse. Un travers de plus. Il a arrêté ses études supérieures en sciences économiques pour au final devenir infirmier. Avouez là que c'est complètement idiot !
Mon héros, il l'a loupé où son coche ?
15h45. Ou presque. J'écris toujours ce que je veux. Ça sert à ça un blog. Ça sert à dire ce que l'on veut dire, à taire le reste. Ça sert à se créer un personnage. Avec ce que l'on a. Évidemment. Et ce que l'on est. Ça sert à devenir un héros. Son propre héros.
Et comme j'écris ce que je veux, j'invente ce qu'il me plaît.
J'ai envie de cul. Ou plutôt de bites... Ça, c'est pour le côté voyeur de mes lecteurs.
Je rigole. Enfin... un peu. Le sexe, ça plaît.
Il faut savoir rire dans la vie. Sinon, on est foutu.
Mais le cul, c'est tout aussi important. Homo ou pas. Le cliché du pédé qui passe son temps à reluquer des braguettes, ça me fait rire. Parce qu'on n'est pas des bêtes. Le sexe, c'est mieux quand il y a de l'amour.
La cage aux folles, c'est marrant. Mais à force d'en rire, tu deviens con. Faut savoir être ouvert dans la vie. Sinon, t'es qu'un pourri. Et pour l'humour, comme qui dirait, reste ouvert, j'arrive !
16h40. Je vais m'arrêter là. Parce que finalement, je n'ai pas que ça à faire...
À écrire ma vie, je ne la vis plus.
Mon héros, il est entrain de me sucer de l'intérieur. Il me pompe l'esprit jusqu'à me perdre dans le sien.
Ça ne veut pas dire grand chose, mais j'écris ce que je veux. Ici, je suis le maître... de mon roman.
Et puisque j'écris ce que je veux, j'ajouterai que mon héros, cet homo, pour rien au monde, échangerait sa vie contre une autre...
17h00. Fin.
Avant d'autres débuts.