de gauche à droite,
ça change, d'habitude c'est de haut en bas
le train, j'aime,
c'est ennuyeux, un peu long,
on regarde le paysage, on s'endort,
on râle contre les voisins d'à côté qui font trop de bruit
on attend,
on espère,
parfois on laisse échapper quelques larmes
d'une mélancolie née du rail,
du trajet, de la solitude, de l'été
du regret ou du remord
une larme pour rien
une larme sur soi
une larme de pitié
une larme de culpabilité
donc, le train.
une première classe rouge,
corail désert, fauteuil confortable, clim dans le cou
je traverse les Pyrénées sous un ciel gris et triste;
j'adore, ça me rend encore plus mélancolique
(maso totale, auto flagellation
spleen,poésie de comptoir, romantisme à 2 balles hé oui)
le train avance dans ses colimaçons
ici un torrent,
là une nappe de brouillard
au loin la montagne, ennuagée,
quelques vaches paisibles.
entre Pau et Lourdes, c'est du sublime hardcore
je vole de l'âme et de la paupière
puis le retour à la plaine,
jaune paille, sans histoire.
soudain, une biche, à l'orée d'un champs de maïs
craintive,perchée sur ses pattes fines,
prête à fuir l'humain, le bruit, le fusil, le cri,
une biche, sauvage et sophistiquée dans sa robe fauve,
ses yeux cernés de khôl
une apparition, un mirage
puis plus loin, un cimetière de campagne
plat comme la main
cerclé d"un muret de pierre
j'ai le temps de voir une tombe fraîchement creusée
et une vingtaine de personnes habillées de noir
rassemblées, épaule contre épaule,
chagrin contre chagrin, indifférence peut être;
je pense au mort qui a rassemblé autour de lui
20 personnes, plus ou moins
20 personnes sur toute une planète,
venues le pleurer et penser à lui en une fois
20 personnes autours d'une tombe,
c'est peut être peu,
mais c'est déjà énorme.
puis Toulouse arrive,je descends pour ma correspondance,
les hauts parleurs parlent dans tous les sens,
chacun cherche son quai,
sa personne,
sans penser à la biche et au mort que j'ai rencontrés, l'espace d'une seconde.