Paris, je t’aime au petit matin d’été
Quand tu es désert, et vidé.
Que tes rues reprennent leurs espaces
Et que j’y déambule sans laisser de traces.
Sans laisser de traces sur le corps de tes rues
Mais où, j'y laisse d'infinies caresses, des festins nus
Des Polaroids secrets, de tes avenues dépecées
Par le vide. Pas de foule, pas de gens, juste un silence lesté.
Juste un silence lesté, par le murmure de bruits lointains,
Tes poubelles qui débordent de papiers crasseux,
Un journal froissé dépasse : "Séisme à Kyoto, 234 morts"
Des mots cachés par d'autres oripeaux, d’autres décors.
D'autres décors derniers les volets fermés sur les fenêtres
Des rideaux tendus sur des vitres opaques à la vie
Qui s'insinue dans tes rues, une voiture qui passe
Seule sur l'avenue, le bruit qui décline doucement.
Doucement, le soleil s'infiltre dans tes rues
Donne vie aux ombres, qui s'allongent sur le bitume
Vert, orange, rouge, minable arc-en-ciel des feux rouge
Sur ton ciel bleu tout neuf, des lumières vides qui clignotent.
Qui clignotent comme le gyrophare
Aspergeant ses rayons sur les alentours aux timides lumières
Arrestation, revolvers pointés, hommes allongés sur le sol
Nuits de deal, argent menottes aux mains.
Aux mains qui indiquent le chemin
A un couple de touristes Américains égarés
Deuxième à droite et puis tout droit.
Le SDF qui se réveille engourdi par une courte nuit.
Une courte nuit qui s'enfuie, chassée par les reflets sur la Seine
Vue du Pont de la Concorde, un vélo qui le traverse
Plus loin, plus loin, les cafés préparent leurs terrasses, dépilent leurschaises
Regard travelling assis dans le taxi qui glisse dans le sillage de l'avenue.
Dans le sillage de l'avenue, un homme titube
Vomi, agenouillé à terre, tache sa veste.
Doux froissements des feuilles des arbres, par la brise du matin
Joggers harnachés de muscles qui me frôlent.
Qui me frôlent, comme ces souvenirs
Du 14 juin 1940, tu étais alors, Paris,
Ville ouverte, ville muette, déserte,
l’Allemagne rentrait dans ce vide.
Dans ce vide qui ornent ce matin tes bancs
Tes arrêts de bus, tes panneaux publicitaires
Femmes lingerie, pose lascive de la marchandise
Qui s’expose aux yeux absents.
Aux yeux absents que comblent mes instants photographiques
Happant ce dimanche matin Parisien.
À la terrasse du café, deux amoureux blottis
Dans leurs baisers, qui emplissent le monde et mon viseur.
Et mon viseur, qui te capte Paris,
Qui capte ton matin, ton silence, tes espaces,
Qui enregistre tes souvenirs, tes détails, tes envies
Paris, tu exposes ton corps, que je surprends dans l'attente.
Dans l'attente.