“Français ou voyous, il faut choisir“. Poignée en coin, le maire de Nice fonce sur la route ultra-sécuritaire tracée par le Chef de l’Etat épaulé par son ancien assistant parlementaire Eric Ciotti promu depuis M. sécurité de l’UMP. Les citoyens délinquants, la mafia parfois en col blanc, ce n’est pourtant pas ce qui manque à Nice au grand désespoir du procureur Éric de Montgolfier bien seul pour lui faire face.
Pub pour pub on rétorquera que si Sarkozy comme le pense Pierre Moscovici fait du Le Pen light, Estrosi, c’est du dry. Ça ressemble à un ministre, c’est habillé comme un ministre mais ça n’a pas la tenue d’un ministre.
On pourrait se rassurer en se disant que le maire de Nice bénéficie d’un maroquin de moindre importance hélas, il est en charge de l’industrie. Là encore, beaucoup d’agitation mais pas de fond, pas de ligne directrice et peu de résultats sinon un nombre de destruction d’emplois en 2009 a un niveau jamais vu depuis l’après-guerre.
La surenchère verbale est encore le meilleur moyen pour ne pas parler de ce qui fâche. Une méthode copiée sur son collègue Hortefeux. En complète contradiction avec le Code civil qui stipule clairement que “Chacun a droit au respect de la présomption d’innocence“, le ministre de l’intérieur qualifie à qui veut l’entendre Lies Hebbadj, le très antipathique commerçant nantais, de “présumé coupable“. Histoire de tenter de faire oublier que jusqu’à présent ses rodomontades de don quichotte n’ont eu aucun effet sinon de renforcer le sentiment d’impunité de ces islamistes qui défient la république.
Mais peu importe le messager, c’est l’architecte qu’il faut regarder. Sarkozy, ce n’est pas sa première fan, Nadine Morano qui en parle le mieux mais, pour une fois, Benoît Hamon. Dans les colonnes du Figaro le porte-parole du Parti Socialiste dresse un bilan aussi sévère que réaliste : “plus de lois, mais moins de policiers. Plus de caméras, mais moins de gendarmes. Plus de gardes à vue, mais toujours plus de délinquance. Moins de liberté individuelle et moins d’ordre public“.
Benoît Hamon reconnaît que le sujet de l’insécurité sera au coeur des présidentielles. Pour une fois la gauche ne fuira pas le débat mais tentera d’opposer à la stigmatisation une méthode issue des expériences acquises dans la gestion des collectivités locales. “Inspirés de l’expérience du terrain, nous proposerons une stratégie complète de lutte contre l’insécurité et de rétablissement de l’autorité de l’État à l’automne” indique le porte-parole socialiste.
Reste à savoir si ce discours du “on en reparlera plus tard” est le plus judicieux. Le risque est de laisser se développer et s’ancrer dans les esprits des concepts aussi simplistes qu’extrêmes et de ne pas répondre à des interrogations légitimes qui demandent une réponse immédiate.
C’est à La Rochelle déjà, que le PS devrait apporter une première esquisse de réponse, pas en renvoyant l’intégralité du sujet à 2012. Et pourquoi ne pas commencer par dresser un état des lieux partagé tant de la délinquance que de l’immigration même si, comme le rappelait ce matin sur France Inter, Jean-Jacques Urvoas alter ego pour le PS d’Eric Ciotti, le mal est plus profond. C’est toute la chaîne éducative et répressive en effet qu’il faut remettre à plat : éducation nationale en situation d’échec, lois trop nombreuses et mal faites, justice sans moyens, système carcéral à bout de souffle.
Le risque latent serait de baisser les bras devant ce concept propre à la France de l’assimilation comme si, au même titre que la mondialisation, la société française était condamnée à voir se diluer ses valeurs et que paradoxalement, au titre de la préservation de celles-ci, il fallait être prêts à en sacrifier quelques unes.
Sans aller comme Jean-François Kahn à traiter Nicolas Sarkozy de “voyou” dans Marianne, force est de reconnaître que le journaliste voit juste lorsque pour justifier l’emploi d’un terme jugé outrancier il précise au micro de RMC: “Pour conserver le pouvoir, il (Sarkozy) est capable de tout, exactement comme les caïds des cités de banlieues“. Pourtant, en cristallisant toutes les violences sur sa personne le président de la république évite astucieusement le débat de fond sur sa politique. A ce titre Philippe Bilger a raison lorsqu’il écrit sur son blog que “Quand on traite un président de « voyou de la République”, c’est paradoxalement celle-ci qu’on flétrit“.