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Garçon, la même chose qu’il y a un an s’il vous plaît

Publié le 31 juillet 2010 par Luxyukiiste
Garçon, la même chose qu’il y a un an s’il vous plaît

En Septembre dernier, à l’occasion de la rentrée, je publiais un article en forme de rétrospective de mon expérience chez les otakus. Un an plus tard, je suis toujours là, avec autant d’impressions diverses sur ce milieu. Et récemment, il m’est apparu assez brutalement que je n’étais pas vraiment à mon aise là-dedans, pour une simple raison : trop de garçons et trop peu de filles, et une vision de la gent féminine relativement tordue et déprimante diffusée par un pan de la culture pop japonaise. Histoire de présenter rapidement la chose aux novices, je vais citer un extrait du livre Faire l’amour au Japon (Frédéric Ploton), petit bouquin rose et sympa issu de la collection Faire l’amour dans le monde. Le livre tente d’exposer en 120 pages ce qui fait la spécificité de la sexualité, de la séduction et de l’amour dans ce mystérieux pays. La phrase suivante est d’ailleurs mise en valeur sous forme de citation, ce qui est justifié car elle est très parlante :

Une fille assez quelconque peut être considérée comme « sexy » si elle adopte des attitudes physiques de gamine mal dégrossie : voix et rire haut perchés, yeux écarquillés et/ou papillonnants, pieds en dedans et genoux rentrés, mains derrière le dos, qui tente de tirer sur sa minijupe ou de cacher sa culotte. Plus la jeune femme apparaît fragile, ignorante de ce qui l’attend et néanmoins soucieuse de sa respectabilité, et plus elle constitue une tentation immédiate.

Bref : le must, c’est d’avoir l’air conne, ignorante et naïve, inutile d’essayer de tenir une conversation, sinon tu fera vite débander. Une autre source, qui vaut ce qu’elle vaut, confirme cependant le succès certain de la puérilité dans les attitudes féminines quotidiennes : le prétendre ne pas comprendre une plaisanterie vaseuse est assez priceless et montre bien que le japonais a lunettes à encore plus envie de la mettre à l’innocente ado si elle ne montre pas qu’elle s’y connaît en sexe et qu’elle va le dominer. La journaliste Agnès Giard, auteur du blog Les 400 Culs, ouvrait son livre L’imaginaire érotique au Japon avec ces mots :

(les jeunes filles) incarnent pour eux l’idéal de la séduction. On les appelle bakapoï, parce que baka signifie « stupide ». On les appelle aussi buriko (littéralement : ânesse, bourricot), parce qu’elles font tout pour en avoir l’air. Ce sont des filles très très fluor qui cultivent la mièvrerie par pure démagogie et multiplient les phrases du genre : « Yasashiku-shite, ne » (« Soyez gentil avec moi, hein ? ») avec une puérilité à laquelle peu de salary-men résistent.

Si Frédéric Ploton nous indique que des codes plus occidentaux font leur apparition, le milieu de la jpop permet de se rendre compte que l’image de la ravissante idiote est toujours en vogue. Les clips du girls band Buono! sont à ce titre très parlants, emplis de naïveté extrême et de manières de gamine de 13 ans. Pour moi, maintenir cet exemple est le meilleur moyen de conserver ce qui peut rester de domination sur les filles, que les hommes perdent petit à petit au rythme de l’évolution des moeurs. Cette attitude débile est bien évidemment très tentante : elle permet à l’homme de se sentir puissant, utile voire indispensable, en espérant très fort que personne d’autre n’est passé avant. Dans une frange de l’animation et des jeux vidéo japonais, cette tendance à la soumission se caractérise par la quantité hallucinante d’illustrations représentant les jeunes filles en train de rougir. Sur Danbooru, imageboard où se côtoient les fanarts et illustrations officielles, le tag blush rassemble 113 400 dessins.

Garçon, la même chose qu’il y a un an s’il vous plaît

Ce rougissement, c’est celui de la surprise, de la honte, de la gène, du corps vu dévoilé contre son gré (pour les filles), dévoilement qui devient miraculeusement consenti (pour les hommes). Dans son livre, Agnès Giard raconte l’histoire de Shume Kai, réalisateur de pornos mettant toujours les femmes en situation de honte et d’inconfort : sexe en public, insultes… Les femmes qui n’ont pas de honte manquent de subtilité, dit-il, une optique qui pousse ses actrices à être traumatisées par la violence qu’elles subissent. Gênée en permanence, la femme ne pourra jamais prendre en main sa sexualité, et encore moins sa vie. Le rougissement peut être considéré comme mignon, voire moe, la passion de la gène, de l’ignorance, de la maladresse et des culottes à petits ours.

Toujours sur l’animation, et les otakus spécifiquement, l’utilisation des personnages de soubrettes dans certaines séries a mené à l’ouverture des maids café, où les clients sont accueillis par de souriantes et dociles jeunes filles, chargées de les servir et de discuter avec eux. Cette nouvelle tradition arrive peu à peu en France notamment dans les conventions, à Lyon, l’association Lyon Hoshi propose un coin snack avec serveuses habillées en maids. Pour moi, la reprise de ce genre de délires pose question : est-ce du simple mimétisme pour se croire au Japon pour rigoler ? Ou ne devrait-on pas laisser les coutumes japonaises borderline prospérer sur place plutôt qu’ici ? Les codes japonais n’ont rien d’innocent et soutiennent un modèle décérébrant dont la portée n’est semble t’il pas toujours comprise. Alors oui, les maids, c’est sex, comme les étudiantes, comme les filles qui rougissent, etc., etc. : je suis le premier à le penser, et sachant que l’hypocrisie tue des chatons, je devais le dire à un moment ou un autre. Cependant, ça va mollo, avec modération, mais en faire des modèles de féminité, faudrait quand même pas déconner. Parce que c’est une régression énorme et la version « pop » de schémas que les féministes ont bien fait de combattre, et aussi parce que, non, vous ne pourrez pas passer votre vie à rêver d’avoir une maid chez vous. Décalage et incompréhension, c’est ce que je ressens face à cet univers qui, au moins, ne cesse de me surprendre, ce qui évite l’ennui. Ceux qui me connaissent seront certainement surpris de voir un prétendu amoureux d’étudiantes en fleurs comme moi faire autant sa mijaurée : je leur répondrai qu’il y a des prises de conscience qui viennent sans qu’on s’y attende, et qu’une overdose n’est jamais prévisible. Je ne me sens pas à l’aise dans un monde autant dirigé par la frustration, qui passe par les héroïnes débiles, les figurines à poil, l’obsession des pantsu et que sais-je encore. Plus le temps avance, et plus je me rends compte que ma fascination pour le Japon est égale à ma répulsion pour ses trop étranges spécificités.

Garçon, la même chose qu’il y a un an s’il vous plaît

Où sont les filles dans ce bourbier ? Comment vivent-elles cette image ? Parfois, je me le demande, tant j’ai l’impression qu’elles ne servent que de faire-valoir à cosplayer en meido ou en school swimsuit, et qui devront se faire aux remarques sur leurs seins (ou leur absence, c’est selon), leur moe-level et sur combien tout le monde rêve de les voir en sous-vêtements roses à petits noeuds. N’avons-nous pas mieux à montrer comme exemple que cette image de meute assoiffée ? A vrai dire, plutôt que de faire des suppositions, j’aimerai inviter les filles à parler de comment elles perçoivent tout ça, de ce dont j’ai parlé dans l’article à certains éléments récurrents de la production animée qui cantonnent les filles dans des rôles bien précis. Et comment elles se sentent considérées par leurs camarades, dans cet univers a majorité masculin. Et, entre deux commentaires de Drig sur les otakus solitaires, les garçons ont même le droit de m’insulter, mais vous savez, malgré tout, je vous aime quand même… Il y a juste des moments où l’on sent qu’il est temps de prendre ses distances.

Bon, sinon, cette année a aussi eu ses bons moments, comme l’augmentation des visites sur le blog même si les articles relatifs aux animanga ont tendance à stagner. Je ne sais pas si ça ira en s’arrangeant, vu que j’ai décidé de me consacrer pour l’instant aux articles musicaux, car cet univers m’inspire plus d’espoir et d’affection. Et n’oubliez pas, car je ne le rappelle pas assez souvent, que vous pouvez me retrouver sur IRC, sur le chan #beyond, en vous connectant au réseau irc.nanami.fr. Sûrement moins la semaine à venir, car je serai en vacances, mais même sans moi, vous ne serez pas seuls. A bientôt, alors !

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Et à part ça ? Le groupe kawaï-trash The Birthday Massacre dont j’avais parlé en long et en large sur un précédent blog, met en ligne des extraits du prochain album Pins and Needles, disponible le 14 Septembre prochain. Et là, attention, car il faut suivre : les bouts de chanson en question sont à écouter sur leur MySpace, puis VampireFreaks, Reverbnation, et enfin la page Fan Facebook. Certainement une façon de ne pas avantager les membres d’un site par rapport à l’autre ; toujours est-il que les extraits sont encourageants et promettent encore une fois du gros. Viva Chibi !


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