*Le Bronx de Lachute est la paroisse d'Ayserville. Le coin le plus pauvre de ma ville. Tous les HLM de la ville se trouvent dans ce secteur comme si la municipalité avait décidé de faire de ce racoin un ghetto de B.S!!! Ces immeubles existent depuis le début des années 70.*
(Souvenir du 36)
Moi et mon frère allions jouer au softball dans le Bronx de Lachute malgré la peur! Le bloc 36 est l'emblème de la grosse misère, le château d'Ayersville. Dans le bloc 36, il y a des rois déchus, des princesses trop faciles, des princes toujours partis "sa brosse", des reines fatiguées et surtout, il y a beaucoup d'enfants abandonnés. À l'opposé des autres royaumes, dans le 36 il y a plus de fou que de rois.
Le bonheur est présent le 1er du mois mais il s'en va assez rapidement. Les claques se donnent aussi facilement qu'une poignée de main! À Ayersville, on se chicane pour passer le temps. À Ayersville il n'est pas rare de voir un p'tit cul de 5 ans revenir du dépanneur avec une caisse de 12 pour son père. Le bonhomme, lui était trop fatigué pour aller chercher sa caisse lui-même. À Ayersville, les enfants servent aussi d'âne, ils vont chercher l'amour de leur père comme ils peuvent!!!!
À Ayersville si tu veux pas te battre,tu te fais battre.
(Jean-Paul)
J'ai souvenir de "Shoeless" Jean-Paul, né d'un père Iroquois, d'une mère iroquoise, d'un grand-père iroquois, d'une grand-mère iroquoise et d'arrières grands-parents iroquois. Jean-Paul était l'indien parmis trop de cowboys! Un gars de bois qui a jamais vu le bois. Il était enfermé dans les "HLM" mais surtout dans sa tête!
Jean-Paul qu'on pouvait trouver en foetus au coin de la Terrasse Saindon avec un p'tit sac de papier brun et une haleine de colle. Lui, les miroirs qu'il avait troqué pour des fourrures avec l'homme blanc, il s'en servait pour faire de la coke.
Il était un indien de son époque! Jean-Paul était tellement heureux.
Jean-Paul respirait le bonheur mais surtout le diesel. "Shoeless" est le seul joueur de balle que j'ai vu jouer nu-pied...de là son surnom.
(Eddy)
Eddy était le plus dur parmi les durs. Il était le digne successeur de son père et de ses frères. Une lignée de malades mentaux. Une lignée de batailleurs de rue. Ils sont connus comme "Barabbas dans la Passion". Leur renommée va jusqu'à l'est de Montréal. J'ai vu le père d'Eddy offrir cinq piasses à n'importe quel gars de l'âge d'Eddy qui pouvait le battre. Le père d'Eddy a payé une fois un autre p'tit gars qui venait de planter son fils. Pour récompense, Eddy a eu une claque en arrière de la tête.
(E.T)
J'ai souvenir de la première fois que j'ai vu deux hommes se battre. "E.T", il tient son surnom du film. Un nerveux comme il s'en fait rarement. Un gars rapide sur les buts, un voleur de buts et de chars! Le genre qui pouvait vous volé votre montre dans votre poignet avec le sourire. J'ai vu "E.T" se battre contre un dur, un vrai, un gars qui venait de sortir du "pen". Dans la rue ce soir là, les femmes criaient de peur, les enfants criaient de voir leurs mère crier et les hommes eux criaient par besoin de voir du sang. Personne se mêlaient de la bataille, on laissait les deux chiens se manger entre eux!
Moi du haut de mes 12ans je me pense ben "smat", je m'approche pour voir le combat et sans m'en apercevoir, je fais parti du rond qui entoure les deux hommes. J'en parle aujourdhui et j'en ai encore des frissons de peur juste de l'écrire! Je suis curieux mais en même temps j'ai la chienne. Les deux hommes se sont tapés sur "la yeule" pendant très longtemps dans mon souvenir, du sang a coulé, des dents ont tombé, des yeux ont noirci et pour la première fois de ma vie j'ai vu un homme pleurer. J'ai entendu un cri de mort venir de sa bouche et de la bouche de sa femme aussi qui pleurait par-dessus lui. "E.T" comme le grand roi du 36 ce soir là, il est parti le torse bombé. Ce fut d'ailleurs la seule fois dans sa vie qu'il remporta quelque chose! Moi ce soir là, je suis reparti chez-nous avec un "spot" de pisse dans mes culottes.
Le lendemain, il m'avait repêché pour jouer dans son équipe de softball!
(Robitaille)
"Pas fiable" Robitaille, son surnom dit tout.
(Boule)
Il est le premier lanceur de fastball que j'ai vu à l'oeuvre de ma vie. "Boule" lancait comme d'autres jonglent avec des torches de feu! Chaque fois qu'il lancait, le Bronx arrêtaient de vivre, il était la fierté du p'tit monde! Quand il lancait les femmes arrêtaient de rouler leurs cigarettes, les vieux arrêtaient de boire leur quatrième bière du matin, les enfants arrêtaient de pleurer. Même les adolescentes oubliaient qu'elles étaient en "balloune". La première fois que je me suis fais frapper par une balle pendant une game dans le Bronx, je me suis dirigé vers le 1er but et "Boule" de me dire: "Hey,icitte quand on se fait frapper par une balle ça compte pour une balle...facque r'toune au batte."
(Bédine)
Il est le seul joueur que jai vu frapper avec ses coudes et jouer sans gant au champ centre!
(Le gros Pilon)
L'expression "plein de marde" lui va comme un gant. Un pouilleux aux cheveux longs et à la barbe du style "Doc Mailloux". Un 1er but élégant et un "siphonneu" de gaz tout étoile! Il travaillait pour le gouvernement à temps plein, il était rentier de son état. (B.S) de père en fils, le gros Pilon connaissait la charte des droits sur le bout de ses doigts.
(Bimbo)
5'7 et 400lbs de haine, ça résume assez bien Bimbo.
Le genre qui aimait se battre mais quand son adversaire était de dos!
Le seul gars que j'ai vu courir après son ombre. Un homme de 400lbs qui court comme "Ben Johnson" c'est étonnant.
Dans le Bronx c'est là que j'ai compris qu'on naît pas tous égaux. C'est là que j'ai compris que le chemin facile n'est pas nécessairement le meilleur! C'est là que j'ai compris que le bonheur est en soi et nulle part ailleurs. Le Bronx, plein d'histoires pas racontables qui forgent cette paroisse de misère.
*Que sont-il devenu*
-"Shoeless" Jean-Paul est mort.
Jean-Paul s'est suicidé, il avait 17ans c'était en 1987.
-"E.T" pourri dans une prison depuis qu'il a 20ans, c'est-à-dire depuis 1986.
-Eddy continue à se battre, surtout avec lui-même. (À ce qu'on dit)
-Le gros Pilon recoit sûrement encore son chèque de B.S et son cordon du coeur traîne toujours dans la marde.
-En 1973 a vu le jour un p'tit gars comme tant d'autres dans le bloc 36 et aujourd'hui il écrit un blog!
-Mes enfants ne verront jamais le Bronx...