Ces paraboles de l’évangile de ce dimanche forment une image assez nette du Christ et de son Eglise. Plus cette image sera claire pour nous, et mieux nous pourrons vivre en chrétiens.
Dans ces paraboles, le Christ se dépeint lui-même comme un maître de maison, à la tête d’un grand domaine. On peut imaginer une belle habitation, entourée d’un jardin luxuriant, où se croisent les membres de la famille, les serviteurs, les servantes et les visiteurs. Dans la parabole, les serviteurs, ce sont les disciples du Christ : non pas quelque chose de vague, de froid et d’impersonnel, mais un ménage, un lieu de vie et de communion, de travail et de détente.
Même quand le Maître est absent du domaine, il attend de ses serviteurs qu’ils s’occupent du domaine d’une manière responsable et énergique. C’est une image de l’Eglise dans ce monde, au cœur de l’histoire des hommes, avant la venue du Christ pour juger les vivants et les morts, et pour établir des cieux nouveaux et une terre nouvelle.
Durant cette période, Jésus a délégué son autorité à des intendants, les Apôtres et leurs successeurs, les évêques, qui sont chargés de superviser le travail de tous les disciples du Christ. Cela en dit long au sujet du style de gouvernement du Christ. Il veut que nous soyons ses collaborateurs, ses amis, de vrais membres de sa famille, et non pas des robots ou des esclaves.
Et pourtant, le Christ demeure le Maître. C’est lui, le Créateur, le Rédempteur, à qui appartient l’univers tout entier. Cet univers n’est pas une démocratie. Le Christ n’est pas un élu dont on pourrait se débarrasser en temps voulu. Non, le Seigneur est Seigneur par nature. Il est le Tout-Puissant, le Tout-Sage, le Tout-Aimant. Et nous sommes ses disciples.
C’est la raison pour laquelle, en tant que chrétiens, nous nous mettons à genoux à certains moments pendant Messe, par exemple, au moment de la Consécration, au cœur de chaque Eucharistie, quand Jésus se rend réellement présent sur l’autel. Le simple fait de se mettre à genoux est une prière en elle-même. Se mettre à genoux devant quelqu’un, cela veut dire reconnaître deux choses dans la relation avec cette personne.
D’abord cela signifie reconnaître une dépendance. Le fait de s’agenouiller signifie que l’on a besoin du secours et du soutien de celui devant qui l’on se met à genoux. C’est reconnaître la supériorité, la puissance de cette personne.
Ensuite, le fait de se mettre à genoux exprime la confiance. Se mettre à genoux, c’est se mettre dans une position de vulnérabilité. Au Moyen Âge, quand un chevalier faisait allégeance à un roi ou à un suzerain, il se mettait à genoux devant lui, et le roi posait une épée sur l’épaule du chevalier. Pour le chevalier, cela signifiait qu’il prenait un risque. Quelqu’un qui se met à genoux ne peut pas se défendre en cas d’attaque. Il est littéralement à la merci de l’autre, à une époque où les chevaliers et les nobles cherchaient constamment à renforcer leur pouvoir et leur domination, souvent au mépris de toute loi. C’est pourquoi, en s’agenouillant devant un puissant seigneur, un chevalier exprimait sa confiance en la bonté, la loyauté, et la justice de ce seigneur.
L’agenouillement n’a jamais été la seule attitude de prière des chrétiens, mais cela a toujours été l’une des attitudes les plus expressives. Le Christ est vraiment notre Seigneur et notre Maître, comme il l’affirme dans les paraboles du passage de l’évangile de ce jour. Nous dépendons de lui en toute chose pour notre existence, pour notre rédemption et pour notre bonheur. Et il est vraiment digne de notre confiance, comme il l’a prouvé en mourant pour nous sur une croix et en ressuscitant, comme il l’avait dit. Il est le Seigneur tout-puissant, plein d’amour, de la vie et de l’histoire.
Une application concrète de cette certitude dans notre vie, consiste à obéir humblement aux enseignements de l’Eglise. Le Christ est le Seigneur, le Maître du Domaine, et il a promis de nous guider sans cesse par le ministère de ses intendants, le pape et les évêques en communion avec lui. Par conséquent, la fidélité au Christ implique la fidélité à l’Eglise. Ce serait une contradiction d’affirmer croire au Christ, et ensuite de faire un tri dans les enseignements de son Eglise.
L’Eglise n’est pas une cafétéria, c’est une maisonnée, la maisonnée du Christ. Dire que l’on croit au Père et au Fils, mais pas au Saint Esprit, n’aurait aucun sens, pas plus que de dire que l’on croit à l’Incarnation, mais pas à la Résurrection. Le Christ nous a fait don de l’enseignement du Magistère de l’Eglise pour nous éviter de tomber dans ce genre d'aberrations. Cela n’aurait aucun sens d’accepter les enseignements de l’Eglise au sujet de la justice et de la charité, en rejetant ceux qui concernent la chasteté et le respect de la vie humaine. C’est pourtant la tentation à laquelle nous sommes confrontés sans cesse dans une société qui a érigé l’individualisme en dogme.
Aujourd’hui, Jésus nous rappelle que nous ne sommes pas des électrons libres dans l’univers. Nous sommes membres de sa maisonnée. Il tient en réserve des choses merveilleuses pour nous. Mais il attend de nous que nous soyons humbles, et que nous fassions de notre mieux pour approfondir et mettre en pratique la doctrine chrétienne, et, surtout, de faire preuve d’obéissance.
Dans quelques instants, nous allons professer notre foi. Faisons en sorte d’en faire une démarche sincère. Faisons-le de tout notre cœur, en renouvelant notre engagement envers ce Dieu qui nous a tant aimés qu’il continue de nous donner son Fils unique, encore et encore, dans chaque Eucharistie.