Pour Grand-mère
L’ovale allongé, sévère,
Les plis de la robe noire…
jeune grand-mère! Qui baisait
Vos lèvres hautaines?
Ces mains qui dans les salles du palais
jouaient les valses de Chopin…
De chaque côté du visage glacé —
Les boucles en spirales.
Le regard sombre, droit et exigeant,
Le regard prêt à la bataille.
Les jeunes femmes ne regardent pas ainsi.
jeune grand-mère, qui êtes-vous?
Que d’occasions vous avez emportées,
Que de choses impossibles aussi —
Dans le sein affamé de la terre,
Polonaise de vingt ans!
Le jour était innocent, le vent frais.
Les sombres étoiles mouraient.
Grand-mère! Ce cruel tourment
Dans mon cœur – serait-ce vous?…
(Marina Tsvétaïéva)