Prix Louis Delluc - 2007
A Sète, le vieux Slimane est à la tête d'une famille recomposée. Côté pile, son ex-femme et leurs grands enfants, des filles battantes, un garçon volage bien que marié et père, un petit dernier qui offre souvent son plus beau sourire à Rym... Rym, c'est la côté face de la vie de Slimane, sa nouvelle vie : depuis quelques temps, il partage sa vie avec une femme qui tient un hôtel, avec sa fille, Rym donc. Le jour où Slimane est remercié par son patron, il doit tourner le dos à 35 ans de labeur sur le port, et désepère de n'être parvenu à rien offrir à ses enfants. Alors il va réaliser un rêve avec l'aide précieuse de sa belle-fille : ouvrir un restaurant à bord d'un bateau désafecté qu'il vient de racheter. Un parcours semé d'embûches jusqu'à la dernière minute.Mieux vaut ne pas manquer de temps pour voir ce film. La graine et le mulet, c'est long - plus de deux heures et demie - et lent. Lent parce qu'Abdellatif Kechiche évite les ellipses et préfère filmer un grand nombre de séquences en temps réel, dans le rythme naturel d'une vie de famille. Les dialogues, eux, sont menés à une allure souvent soutenue, avec un naturel dont on se délecte. Impossible d'imaginer que les textes dits par les acteurs ont été écrits et répétés. C'est inimaginable tellement ils paraissent spontanés.
2h30 pendant lesquelles on vit au sein de cette famille et l'on tremble à l'idée qu'une marmite pourrait venir à manquer lors de cette soirée décisive pour le projet de Slimane. Tous les acteurs, professionnels ou amateurs, sont remarquables.
Mais quelle fin !! Quel supplice Monsieur Kechiche !! Et Slimane ? Et le couscous ? Et Rym et Kader ? Pourquoi n'aurait-on pas le droit d'en savoir un peu plus ?... Oui, pour faire marcher notre imagination, mais j'aurais autant préféré que vous nous livriez la vôtre.
Par cette longueur, par son rythme, La graine et le mulet est un film audacieux. Il traite avec naturel et réalisme de l'amertume des immigrés épuisés par leur vie professionnelle achevée mais seuls et démunis. Jamais le réalisateur ne tombe dans la facilité, les scènes-cliché sont évitées.
Une large place est laissée aux femmes, à cette complicité intergénérationnelle portée par le duo Slimane-Rym. Sans oublier cette grande scène finale de danse du ventre (pour laquelle il a fallu que l'actrice, Hafzia Herzi en ait...).
Ode du verbe autour d'un couscous - Le Monde
Site officiel du film