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Jekyll : le bon, la bête et les truands

Publié le 19 juillet 2010 par Godsavemyscreen

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Créée par Steven Moffat (créateur des séries Six Sexy et Coupling, scénariste de plusieurs épisodes de Doctor Who), Jekyll est une série britannique diffusée sur la BBC entre juin et juillet 2007. Une mini-série en réalité, puisqu’il semblerait que le projet d’une seconde saison soit désormais plus ou moins tombé à l’eau. Publiée en 1886, la nouvelle de Robert Louis Stevenson, L’étrange cas du Docteur Jekyll et de M. Hyde, fut l’objet de nombreuses adaptations : plus d’une douzaine au cinéma, de William Selig à Stephen Frears et de Jean Renoir à Terence Fisher, mais également au théâtre, dans la bande dessinée et à la télévision, ainsi que de nombreuses évocations dans les chansons ; le conflit entre le Bien et le Mal, concept vieux comme l’humanité, fascine et se décline à l’infini.

Mais là où une nouvelle adaptation aurait semblé périlleuse et vaine, la série de Steven Moffat fait un pas de côté et se positionne, non comme une simple transposition moderne de la nouvelle de Stevenson, mais comme sa suite : Tom Jackman, chercheur dans un mystérieux institut, n’est pas le Dr Henry Jekyll, mais son descendant. Un siècle plus tard, nul besoin de potion pour que se réveille en lui son double maléfique : Hyde surgit à sa guise, sauvage, incontrôlable et doté d’aptitudes surhumaines. Communiquant à l’aide d’un dictaphone, tous deux sont parvenus à un accord tacite : si Jackman cherche un remède à sa “maladie”, Hyde se tue ; si Hyde commet un meurtre, Jackman se livre à la police. Le bon docteur a simplement omis un détail : il est marié et père de deux enfants ; persuadé que Hyde est capable du pire s’il apprend leur existence, c’est avec un soin tout particulier qu’il dissimule les indices susceptibles de révéler leur existence, allant jusqu’à enlever son alliance lorsque la transformation est imminente. Les bases ainsi posées, Steven Moffat s’applique ensuite à dynamiter un récit qui aurait rapidement pu tourner en rond, et emmène sa série sur le terrain de la conspiration : le bon docteur Jackman, ou plus précisément Hyde, est en réalité traqué depuis toujours par une société multimilliardaire, Klein & Utterson - clin d’oeil au narrateur de la nouvelle de Stevenson, M. Utterson -, persuadée que l’évolution de la race humaine repose sur les extraordinaires facultés de Hyde. Commence alors une traque infernale qui aurait rapidement pu virer au désastre, mais se révèle tout bonnement jouissive.

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Car Jekyll est une série britannique. Et si ce constat ne la conditionne pas, il contribue tout de même largement à lui donner toute sa saveur. Steven Moffat n’a peur de rien, pas même du ridicule : qu’un agent surentraîné depuis des mois - et accessoirement totalement abruti - soit réduit en miettes par Hyde en une poignée de secondes, que le directeur américain de cette société ultra-secrète raille ouvertement le pays (”l’Angleterre, c’est le Tiers-Monde avec des moyens“) mais soit lui-même une telle caricature, que le génial James Nesbitt livre une performance si hystérique qu’elle flirte parfois avec le cartoon, que le scénario souffre de quelques incohérences et que la fin se tranforme en une immense bouffonerie, rien de tout cela ne gâche le plaisir d’une série qui n’hésite pas à nous balader à travers les registres et se moque sans cesse d’elle-même. Bourrée d’humour, surprenante, intelligente et accrocheuse, Jekyll est sans conteste une belle surprise et une jolie réussite.


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