"20th Century Boys Chapitre Final : Reprenons notre symbole".

Par Loulouti

Des œuvres vont parfois au-delà de ma modeste et simple passion de cinéphile. Heureusement que de véritables coups de cœur existent, sinon le monde serait bien triste. J’ai déjà eu l’occasion de vous dire par deux fois (1-2) que je suis tombé sous le charme de la saga cinématographique "20th Century Boys".

Avant-hier j’ai enfin bouclé la boucle en visionnant le troisième chapitre, intitulé "20th Century Boys Chapitre Final : Reprenons notre symbole", des aventures de Kenji, Otcho, Kanna et du mystérieux et maléfique Ami.

Mais ce ne fût pas simple. Alors que les deux premiers avaient bénéficié des honneurs de la sacro sainte salle obscure, l’ultime épisode de cette saga n’a eu le droit qu’à une sortie directe en dvd. Cela faisait des mois que je guettais l’arrivée du support numérique sur le marché français. L’attente valait le coup quand même. 

A la base se trouve le manga de Naoki Urasawa. D’après les connaisseurs (et je leur fait confiance entièrement), l’œuvre originale est l’une des meilleures que le pays du soleil levant ait connu depuis des lustres.

Et comme toute passion qui m’anime, je vis les choses pleinement. Dans les prochains mois mon objectif est de me procurer les 24 volumes d’une saga pour le moins inédite.

2017, an III du règne d’Ami. Ce dernier est devenu Président du monde en 2015 après sa résurrection. Il incarne le sauveur de l'humainité alors qu'en réalité ses sbires  sont à l'origine de la mort de 2 milliards d'êtres humains.

Mais les projets d’Ami vont plus loin. Le 20 août 2017 à midi commencera selon ses dires l’extermination de la race humaine orchestrée par des extra-terrestres. Seuls "ceux qui croient en lui" seront sauvés.

Dans un Tokyo coupé du monde par un mur infranchissable, la résistance menée par la jeune Kanna s’organise. L’insurrection armée est proche.

L’un des buts avoués des conjurés est de faire tomber le masque d’Ami. Pour connaître sa véritable identité.

Les événements s’accélèrent quand Otcho, alias le "Général" réussit à pénétrer dans la capitale nippone. En arrière plan se profile également la silhouette de Kenji mort en 2000 lors du Nouvel An sanglant.

Officiellement…

Le troisième long métrage, toujours mis en scène Yukihiko Tsutsumi, clôt cette fabuleuse saga de manière magistrale. Quel bonheur que de se replonger dans cette uchronie japonaise. Le monde créé par le mangaka, puis mis en images par un metteur en scène plus que doué, est d’une crédibilité à toute épreuve. On y croit véritablement. Une fois de plus serais je tenté de dire.

L’histoire est on ne peut plus passionnante. Nous en sommes arrivés au point culminant du destin si particulier de nos héros. Le temps est venu de trancher le nœud des intrigues.

Au fil des minutes le spectateur s'immerge encore plus profondément au cœur de chronique qui se déroule sur pratiquement un demi siècle. Nous avons véritablement l’impression d’appartenir à la bande de Kenji qui rédigea autrefois "son cahier de prédictions". Le récit captive l’attention.

Une nouvelle fois la fraternité et l’amitié sont mises en exergue. A travers les épreuves, ces deux valeurs cimentent les liens qui unissent une bande de gamins. Des relations que le temps, le mensonge, la manipulation et, au final, les désirs d’extermination, n'arrivent pas à rompre. 

Le film se fait l’écho de nos joutes enfantines, quand nous construisions en toute innocence cabanes et repaires secrets. Il y a un souffle de fraîcheur qui transperce l'oeuvre de part en part et dans le chapitre final cet aspect des choses prend encore plus d’importance.

A propos d’Ami, le long métrage érige aussi en valeur constante le destin des hommes et du monde. Ami fut naguère un enfant seul et triste qui cherchait simplement des compagnons de jeux. Le dédain et l’isolement ont un monstre d'amertume et de ressentiment, un être au coeur sec. La dernière séquence du film nous fait revenir aux origines du mal. Le cadre spatio temporel est identique à la scène d’ouverture du premier film. Une ellipse cinématographique en forme de leçon de choses.

Que ce serait-il passé alors si quelqu’un avait tendu la main à un être cachant son  immense peine sous un masque impersonnel.

Du film se dégagent aussi de formidables moments d’émotion (les retrouvailles finales par exemple). Sans exagérer dans le domaine du pathos, le metteur en scène distille ça et là des instants où la démonstration laisse sa place à des sentiments d’une incroyable pureté.

L’intérêt du long métrage final, comme des deux chapitres précédents d’ailleurs, est de provoquer l’attachement à des personnages entiers, hauts en couleurs, typiquement japonais en somme.

Je n’y connais pas grand-chose mais j’ai quand même l’impression que cela ressemble parfois au théâtre Kabuki dans lequel les protagonistes, au caractère récurent,  ont un jeu extrêmement codifié et que le trait est volontairement forcé pour provoquer l’adhésion ou l’aversion.   

Une nouvelle fois le film nous met en garde contre toutes les tentatives d’hégémonie politique et idéologique. Ce Japon de 2017 cristallise toutes les peurs et les angoisses imaginables, ce qu’il y a de pire chez l’être humain.

Le long métrage nous démontre que le cinéma nippon reste et restera (à jamais) marqué par le double holocauste nucléaire qu’ait connu le pays au cours du 20ème siècle.

Mais la saga est aussi porteuse d’espoir. Quand un pays ou une société tombe bien bas, il demeure toujours en son sein des hommes et des femmes prêts à se relever à et à relever surtout un formidable défi. Les héros de "20th Century Boys" sont de cette trempe.   

Sur le plan formel le réalisateur utilise la juxtaposition des époques. Les allers retours entre le passé et le présent sont nombreux. Dans les deux premiers films il ne s’agissait principalement que de petits cailloux semés sur le chemin de la vérité mais nous restions dans le brouillard.

Dans ce troisième chapitre les pièces du puzzle s’imbriquent les unes dans les autres et le fin mot de l’histoire nous est enfin révélé.

Les passages d’un moment de l’histoire à l’autre sont parfaitement maîtrisés. Le montage des séquences est fluide et ne nuit absolument pas au tempo de l’ensemble et à la progression du récit.

Graphiquement le film mélange deux ambiances bien distinctes. Le Japon uchronique et futuriste dirigé par Ami est éclatant de propreté, de lumière et de modernité. Les tonalités sont résolument neutres alors que le Japon traditionnel, plus touffu adopte au contraire des tons plus chatoyants, plus humains en quelque sorte. Le monde de l’enfance, et de l’innocence s’oppose à la démesure et à la froideur.

Les effets spéciaux, que l’on retrouve principalement dans le dernier tiers du film quand la prophétie destructrice est supposée se réaliser, sont du plus bel agencement. Ni trop peu, ni pas assez. Encore une fois l’univers graphique apparaît comme cohérent.

Le film bénéficie des superbes interprétations de Etsushi Toyokawa (Otcho) et Toshiaki Karasawa (Kenji).

Les autres acteurs, de premier plan telle Airi Taira ou de second plan, apportent chacune et chacun leur pierre à ce solide édifice.

Dans ce chapitre final, le spectateur s’attache de la même manière aux jeunes protagonistes. Les enfants choisis pour incarner nos héros et héroïnes jeunes sont d’une incroyable authenticité. Et ces mômes prennent une place plus que prépondérante dans le déroulement des événements puisque le spectateur réalise que tout était déjà joué au tournant des années 1969 et 1970.   

Quelle belle et digne conclusion.

”20th Century Boys Chapitre Final : Reprenons notre symbole” est à l’image de ces deux prédécesseurs : un savant cocktail d’explications didactiques,  de dialogues finement ciselés, de séquences d’action et de moments intenses.

Je suis arrivé au bout d’une aventure commencée voilà 18 mois. Je suis à la fois satisfait d’avoir clôt une saga cinématographique de plus mais triste de laisser des héros s’éloigner dans l’espace temps des personnages.

Mais libre à moi d’appuyer à nouveau sur le bouton "lecture".