Magazine Finances

Projet ITER : le quiz thermonucléaire de l’été

Publié le 05 août 2010 par Jblully

fusion-thermonucleaireL’actualité scientifique de ces derniers jours nous propose à tous, contribuables, économistes,  responsables d’entreprises, un petit quiz d’été. Prêts ?

Il s’agit du programme ITER. Pour les anglophones : « International Thermonuclear Experimental Reactor ». Pour les latinistes : « le chemin ». Un projet lancé en …1985, aujourd’hui chiffré à 16 milliards d’euros, piloté et financé par l’Union Européenne et la Suisse, les Etats-Unis, la Russie, la Chine, l’Inde, le Japon et la Corée du Sud. Et destiné à étudier la possibilité de domestiquer la fusion thermonucléaire à des fins civiles. En clair : générer – à terme – une énergie propre et quasiment inépuisable en reproduisant en continu la fusion des atomes d’hydrogène à l’oeuvre dans les étoiles – dont la nôtre, le soleil. Un rêve…

La grande nouvelle, c’est que le financement vient enfin d’être bouclé. Le site est prêt – à Cadarache. Le calendrier est décidé. Premiers tests avec combustible en …2026. L’aventure peut commencer.

Maintenant, vous êtes fin prêt(e) pour répondre. Donc : qu’est-ce qu’ITER ?

12 réponses possibles :

- Avant tout, une manifestation de la folie ordinaire. Après nous avoir fait voler comme Icare, puis marcher sur la Lune et conquérir l’espace, la science peut bien nous inviter maintenant à domestiquer l’énergie du soleil, pourquoi pas ? Rien de nouveau…sous le soleil !

- Ridicule ; cette fournaise nucléaire à cent millions de degrés, personne ne sait vraiment la maîtriser. C’est la certitude d’un échec technique cuisant, aussi prévisible que ses dérapages budgétaires.

- La chose crève les yeux : c’est un projet qui reflète l’orgueil démesuré de l’espèce humaine : aussi inutile que l’exploration de l’Univers. Tout au plus, il pourra générer des retombées industrielles indirectes – d’ailleurs parfaitement imprévisibles.

- Franchement, ça n’est rien qui vaille la peine d’en parler ; une goutte d’eau dans la mer, ces quelques milliards, à côté de tout l’argent dépensé depuis le début de la crise actuelle. La recherche scientifique nous coûte beaucoup moins que nos financiers.

- Attention : au plan territorial, c’est un projet d’intérêt économique et social très concret. Compte tenu des sous-traitances et autres emplois induits, quels que soient ses résultats, il contribuera à la vitalité de la région.

- C’est surtout une tentative qui, compte tenu des besoins énergétiques futurs, pourrait faire économiser dans l’avenir – en cas de réussite -  des guerres très coûteuses !

- Plus simplement, c’est avant tout une idée de la communauté scientifique, confrontée à une ressource publique limitée. Elle n’a pas d’autre choix que d’imaginer des projets pharaoniques pour s’assurer un gagne-pain. Et il sera d’autant plus durable que s’amoncelleront les difficultés : c’est la magie de la science !

- C’est peut-être un nouveau jouet du lobby nucléaire. Ils nous donnent bien des soucis, les déchets de nos centrales  nucléaires actuelles. Sans parler de la difficulté du démantèlement. Alors, autant rêver et faire rêver, non ?

- Et si c’était une version économique du pari métaphysique de Pascal ? Pour faire bref : si l’on y croit, il y a plus à gagner qu’à perdre. En somme, aussi mince que soit la probabilité de réussir, la tentative est justifiée, compte tenu des immenses bénéfices qu’apporterait une réussite… Et Pascal s’y connaissait en matière d’espérance mathématique !

- C’est un grand projet fédérateur, donc : politique. Comme la CECA en son temps, puis l’Union Européenne. Comme Airbus, etc. De ces programmes qui favorisent l’entente entre les nations : les échanges économiques et culturels ont tout à y gagner.

- Après tout, est-ce qu’ITER ne serait pas le modèle des grands projets économiques de demain ? Combinant de façon indissociable les atouts des secteurs public et privé. Mutualisant toujours plus les risques face à l’ampleur des enjeux financiers, associant des compétences de plus en plus pointues. Et donc toujours plus internationaux. Toujours plus complexes, aussi, dans leur mise en œuvre opérationnelle mais également dans leur gouvernance. Les exemples existent déjà. Ils devraient se multiplier : grâce aux sommes mises en commun, ils seront peut-être bientôt les seuls à permettre les ruptures technologiques nécessaires pour garantir une croissance économique soutenue. Ce faisant d’ailleurs, et à rebours d’un esprit purement gestionnaire, qui serait sclérosant, ils ne feraient rien d’autre que perpétuer la longue tradition des aventures qui ont façonné l’histoire économique : avancer toujours, au risque de l’inconnu. L’inconnu se moque bien des « business plan », il faut le reconnaître. Mais c’est pourtant cette part de risque qui donne au mot « entreprise » son sens le plus noble et le plus stimulant.

- A ne pas oublier, pour finir : la fusion maîtrisée, c’est une ambition vieille d’un demi-siècle…seulement ! C’est peu,  comparé aux siècles qui ont été nécessaires pour apprendre – par exemple – à voler… Souvenons-nous que les futurologues ont toujours sous-estimé le temps nécessaire aux grandes avancées. Autant dire que, même en tenant compte de l’accélération du progrès technique, ce n’est sans doute pas un dispositif purement expérimental comme ITER qui répondra à la question posée. Ce seront bien plus sûrement les descendants de ses descendants.

Bien. Maintenant, à vos stylos ! (Attention : plusieurs réponses sont possibles.)

Les réponses justes seront données dans vingt à trente ans environ si tout va bien.

Et, sinon, aux descendants de vos descendants, bien sûr.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Jblully 186 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog