Faut-il aimer "Inception" ?

Par Vinsh

Affiche US d'Inception

("Rhaaaaaaaaaaaaa, naaaaaaaaaaaan, j'en peux plus d'Inception !!! On peut plus faire deux clics sur la blogosphère sans tomber sur quelqu'un qui en parle ! J'en ai maaaaaaaaaaaarreuh !! Vade Retro Satanas !!")
(Sorry pour ça, donc)
L'autre jour, je suis allé voir, dans la foulée d'une espèce d'hystérie générale qui semble s'être emparée à la fois du box-office français, de la presse ciné et des blogs (oui, tout ça à la fois), le dernier film de Christopher Nolan, réalisateur d'une poignée de films devenus cultes (Memento, Insomnia), devenu carrément incontournable en 2008 avec la sortie de The Dark Night, deuxième volet de sa saga consacrée à Batman (je te raconte même pas comment on va se bouffer du teaser et du record de fréquentation au kilomètre pour son Batman 3 en 2012).
Inception, donc.
Le genre de film où tu sens bien que tu ne prends pas trop de risques à dégainer tes dix euros (ou ta carte Machin Illimité, si tu es prévoyant). C'est que, même si tu n'aimes pas, au final, tu auras vu : 
1) un blockbuster où on voit sur l'écran que ça a coûté un minimum de fric (ça aide à digérer les dix euros) (dix euros, p*tain...), 2) un film d'auteur, avec une signature visuelle, des thématiques centrales qui traversent l'ensemble de son oeuvre, des références plus ou moins cachées à ses autres films, etc. (en gros, un minimum de caution intello qui te fera discuter du film après la séance) (occasion de briller en société = ça aide à digérer les dix euros), 3) un film qui donne lieu à plein d'articles disséminés sur le ouèbe, que tu ne pouvais jusqu'alors pas lire parce qu'il y avait plein de spoilers dedans, bordel (soulagement de pouvoir enfin lire cette prose et de pouvoir partager son opinion et ses théories fumeuses) (ça aide à digérer les dix euros), et 4) un film que tout le monde semblait avoir déjà vu deux fois à peine une semaine après sa sortie en salles, tu en avais un peu marre de passer pour un has been et de te prendre des vents quand tu essayais de réserver une séance (systématiquement complète) une heure avant...
Bon, alors on va pas dévoiler les clés du film, hein, on n'est pas chez les influents, ici.
Disons juste que, effectivement, c'est un très honnête divertissement, dont contrairement à ce qu'on dit, Leonardo DiCaprio n'est pas forcément l'élément fort du casting, mais dont l'intrigue à étages volontairement laissée dans un flou théorique à la fois solide et ouvert va te faire causer et cogiter, pendant des heures, avec ceux qui auront vu le film avec toi. Personnellement ça fait partie des trucs que je préfère, au cinéma : prolonger le plaisir après.

J'ai trouvée Ellen Page très bien, dans un rôle pourtant sous-écrit. De même, Joseph Gordon-Levitt (nu) et Tom Hardy sont d'excellents seconds rôles, pourtant pas forcément servis par leurs dialogues, mais illuminant le film de leur magnétisme et de leur fougue (fougue depuis longtemps éteinte chez Leonardo DiCaprio, monoexpressif au possible avec sa désormais incontournable ride du lion qui montre comme il est sérieux et soucieux, et sa bouche crispée par la constipation). Cotillard ne se déshonore pas dans le film, je trouve. Son rôle est très onirique et très constipé, lui aussi, mais elle le sert plutôt bien. Je trouve dommage que, depuis son succès un chouïa trop intergalactique pour le surestimé La Môme, on ressente le besoin de la dézinguer à tout va dès qu'elle apparaît au générique d'un film. Ce n'est pas si grave, de réussir aux Etats-Unis après y avoir percé grâce à un film pas trop génial...
Sur le film lui-même, pas grand'chose à dire de plus que ce qui a déjà germé un peu partout sur le ouèbe depuis deux semaines : globalement, c'est un film qu'on a envie de revoir une deuxième fois pour comprendre tous les détails, mais dont on ressort après le premier visionnage avec la confortable impression d'avoir compris l'intrigue dans sa globalité.
Les "règles" qui régissent les rêves et la manière de les intégrer/visiter/cambrioler sont un peu énoncées de manière arbitraire, mais du coup on se surprend à les confronter les unes aux autres pour s'assurer que ce "cadre légal" tient debout. Si l'on ajoute à cela des personnages dont les statuts sont différents et ont chacun un impact sur l'intrigue globale, on en arrive presque à des débats chevronnés sur la "mythologie" Inception, ce qui a un petit goût de Lost pas du tout désagréable (attention, toutefois, les deux histoires, et les deux potentiels déceptifs de la scène finale ne sont pas DU TOUT les mêmes)...

Points faibles, en revanche, du film : sa longueur (2h28, mazette), son manque d'humour (ce qui contraste bizarrement avec l'atmosphère plus ou moins assumée de rat pack façon Ocean's Eleven) et sa façon de décrire les rêves comme des univers virtuels hyper-réalistes où les événements se déroulent selon une chronologie et une logique totalement conforme à la réalité... Perso, quand je rêve, je suis souvent avec une personne, puis avec deux, puis de nouveau avec une seule, dans un environnement qui change sans prévenir, avec une intrigue qui change en moins de dix secondes sans explication ou transition, mais avec l'impression confuse que tout est logique et qu'il y a une unité d'action. Ce n'est pas du tout le cas dans Inception, où les rêves prennent place dans des lieux bien déterminés, avec un enjeu fixe à chaque fois et des conditions on ne peut plus réalistes. Même si, effectivement, les effets spéciaux montrent qu'on n'est pas dans la réalité. Mais moi, je rêve rarement d'effets spéciaux, en fait.
Enfin bon, pas de quoi faire le mauvais coucheur, non plus.
Au final, faut-il aimer ou pas aimer, comme le disait le titre de ce post interminable ?
...
Bah je vais pas non plus te dicter tes goûts, oh ! Mais moi, j'ai aimé.
Bref, si comme moi tu es un mouton et que tu vas voir ce blockbuster estival (c'est que, pour la bronzette topless à Paris, on repassera, là) (alors autant entretenir sa pâleur naturelle en salle climatisée, non ?), n'hésite pas à en causer, voire à en théoriser, voire à en mythologiser, voire à en mystifier dans les commentaires... 
Mais si, mais si, regarde, en ce moment, je me mets à répondre à mes commentaires !