Chicago
Passons sur la semaine de boulot pour aller directement à la nécessité de passer Chabbat à Chicago.Surtout, ne pas reproduire l’erreur déjà commise en 2003: passer un Chabbat dans un grand hôtel du Loop, le centre historique et touristique de Chicago. Ca, j’ai déjà donné il y a quelques années : en passant par Priceline (si vous ne connaissez pas, je vous conseille ce site pour trouver un super hôtel à prix défiant toute concurrence à quelques jours de votre voyage), le Palmer House Hilton de Chicago pour moins de 70$ la nuit. Manger casher ? Il suffit de demander à la réception qu’elle vous commande des plateaux casher (bien sûr dument facturés), qui vous permettront de tenir si vous ne connaissez personne dans les environs ou si vous n’arrivez pas jusqu’au Beth Habad le plus proche.
Après c’est plus surprenant : dans cette salle de plusieurs centaines de places, on ne se retrouve qu’à 30 ou 40 personnes pour faire l’office ! La raison (que je subodorais depuis maintenant quelque temps) ? Les Juifs travaillent dans le Loop mais n’y habitent pas. La synagogue est donc très active en semaine mais très peu fréquentée le Chabbat. Un kiddouch uniquement sucré après l’office qui ne m’aura pas rassasié et me voilà de retour à l’hôtel en début d’après-midi…heureusement que la ville est belle et qu’on peut profiter de belles balades, surtout en été !
Back to 2010 : cette fois-ci, pas d’erreur. Appel d’un ami que je n’avais pas revu depuis plus de 10 ans mais qui habite Chicago et qui me confirme : « les Juifs habitent dans 2 quartiers principaux : West Rogers Park qui est encore dans Chicago et Skokie qui est une ville à l’extérieur de Chicago ». La raison est évidente : lorsqu’on commence à fonder une famille, on va chercher des écoles, des superficies plus conséquentes et une infrastructure particulière qui n’est pas offerte par le centre ville, plutôt dédié au business et au tourisme. Va donc pour West Rogers Park. La physionomie de la ville est complètement différente : on est plus dans Desperate Housewives avec ses maisons résidentielles ne faisant pas plus de 2 étages tout le long de rues quadrillées, que dans Mad Men avec ses gratte-ciel et son activité débordante.
Problème : il n’y a pas d’hôtels. Mon ami me donne alors un truc : la maison de retraite juive de West Rogers Park fournit des chambres pour les voyageurs de passage. Pour 75$ la nuit, ça vaut le coup. D’autant qu’on a alors la possibilité d’admirer la qualité de cette maison de retraite : grande, propre, animée, dans une ambiance juive (repas casher, offices, cours, etc…) et accueillante pour les touristes…
Vendredi soir arrive, à la recherche d’un office ! On est plus dans le Loop c’est une évidence : des dizaines de schule de toute obédience se succèdent sur Internet : Reformed, Conservative, Orthodox, Loubavitch, Séfarade (avec même une communauté marocaine !) à quelques blocs les unes des autres. Je choisis KINS qui a l’air d’être une des principales communautés orthodoxes du quartier, à mi-chemin entre mon « hôtel » et mon ami chez qui je vais dîner. Pas grand-chose à dire si ce n’est que le bâtiment est imposant et bien intégré au quartier. Le rabbin est décontracté, avec un Panama blanc sur la tête et un costume clair. On sort et là surprise : les gens portent ! Il y a en effet un Erouv à West Rogers Park (le Erouv est une modalité permettant de contourner l’interdiction de porter dans un domaine public le jour du Chabbat. Il permet notamment de sortir en poussette, chose interdite sans Erouv). Halakhiquement, le sujet est polémique, j’ai d’ailleurs acheté à New-York une petite monographie sur le sujet très bien faite dont j’essaierai de faire une petite recension. Toujours est-il que la question se pose : peut-on réellement compter sur un Erouv sur un périmètre aussi vaste que West Rogers Park et avec un degré de fiabilité suffisant ? D’un autre côté, comment ne pas voir qu’un Erouv change radicalement la perception que les Juifs (et les familles en particulier) ont du Chabbat, lorsqu’enfin il est possible de sortir et d’effectuer des visites amicales ou familiales même avec de jeunes enfants ?
Une adéquation plus simple aux Etats-Unis entre la vie professionnelle et les exigences halakhiques d’un Juif pratiquant. Lors de ma formation d’une semaine à Chicago, aucun problème pour bénéficier de repas casher fournis gracieusement par le Centre de formation, voire conserver sa kippa y compris dans le cadre professionnel (je ne l’ai personnellement pas fait, culture française oblige, mais j’ai vu un américain la garder sans problème, comme d’ailleurs les Sikhs avec leur impressionnant turban). Mais attention, tout n’est pas rose non plus : il subsiste évidemment des difficultés, liées essentiellement au respect du Chabbat en hiver. Et ne nous leurrons pas, il est plus facile de négocier quelques arrangements discrets dans des jobs de haut niveau que dans des postes plus standardisés. De fait, s’il faut donner une raison rationnelle au fait que les Juifs choisissent plus fréquemment que le reste de la population une carrière dans l’entrepeneurship ou les professions libérales, c’est certainement pour la flexibilité dans l’emploi du temps que ces métiers procurent, indispensable à une conciliation harmonieuse entre vie professionnelle et convictions religieuses.
Le lendemain, mon ami était invité par un couple Habad qui a très gentiment accepté de me recevoir également. Direction donc un office Loubavitch, commençant comme de bien entendu après 9h30 (ça ça ne change pas) et très agréable. Une découverte précieuse : le Houmach édité par la maison d’édition Kol Menahem. Je ne peux pas vous raconter cela sans faire une digression sur « la Révolution Artscroll », comme ils disent là-bas et comme le post commence à se faire long, on fera ça dans l’Episode 2 (promis dans pas trop longtemps).
Bonnes vacances à tous !
A suivre...