Comme de nombreux autres fans de la série, je suis en train de voir la saison 8 de 24 heures chrono, la série télévisée la plus extraordinaire que j’aie jamais connu. A deux épisodes de la fin de cette saison, le héros, Jack Bauer, est vraiment dans une merde inextricable, et enchaîne violence sur violence. Paradoxalement, cette saison est pourtant la plus réussie de la série…
Mais peut-être ne connaissez-vous pas encore 24 heures chrono ni Jack Bauer, aussi permettez-moi de faire les présentations.
24 heures chrono est une série télévisée américaine, diffusée sur le câble, qui met aux prises un agent de la cellule anti-terroriste de Los Angeles (la CTU, ou Counter Terrorist Unit) avec de vrais méchants, qu ien veulent aux Etats-Unis, à la démocratie ou plus simplement à Bauer lui-même. Il faut dire qu’ayant effectué un passage remarqué sur certains théâtres de guerre, Jack Bauer (incarné par l’acteur Kiefer Sutherland, excellent) s’y est fait quelques ennemis.
La saison 1 fut diffusée quelques mois après le 11 septembre, dans une ambiance de lutte entre le bien et le mal. Pourtant, s’il y a bien un travers dans lequel la série ne tombe pas, c’est bien le manichéisme. De saison en saison, les différents personnages impliqués, de la cellule anti-terroriste à l’entourage des terroristes eux-mêmes, en passant par l’entourage présidentiel ou les différentes administrations en charge de la répression contre le crime organisé, oscillent entre le bien et le mal. Prenez la torture, par exemple. Quand les terroristes torturent, c’est mal; mais quand les agents spéciaux torturent, est-ce vraiment bien? et s’ils sauvent des vies humaines, est-ce mal?
La spécificité de 24 heures chrono, c’est que la série est censée illustrer 24 heures, sur 24 épisodes consécutifs, d’une journée particulière de Jack Bauer. A chaque saison correspond un cas différent, bien qu’on retrouve une lente évolution aussi bien des personnages que de l’intrigue général, d’année en année. Ainsi, David Palmer, candidat à l’élection présidentielle lors de la saison 1, est devenu président lors des deux saisons suivantes. L’entourage même de Bauer au sein de la CTU évolue, parfois violemment. Quel fan de la série n’a pas en mémoire la disparition tragique de Brian Chappelle, de Michelle ou de Tony Almeida, qui reviendra pourtant lors de la saison 7?
24 heures respecte ainsi l’unité de temps qui fait la force des grandes tragédies. L’unité de lieu est plus ou moins bien respectée, chaque saison se déroulant autour d’une seule grande ville américaine: Los Angeles, Washington ou New York. Mais l’unité d’action, elle, est clairement bafouée, et c’est là aussi l’une des grandes forces de la série, l’une des premières à montrer 3 ou 4 scènes se déroulant simultanément, faisant monter crescendo le stress du téléspectateur.
Le réalisme des situations de crise est parfois saisissant. Les débats intérieurs qui triturent l’esprit des agents impliqués revient régulièrement. Ou est le bien, ou est le mal? Mais celui de l’entourage présidentiel est encore plus étourdissant. De coup d’état en crise, de problèmes de management, d »insubordination, de coups tordus en arnaques en tout genre, le pouvoir américain resplendit dans toute ses vicissitudes. On pense à l’entourage de Nixon, de Bush, mais aussi à celui de présidents d’autres états, confrontés à de graves problèmes en raison de l’impéritie de leur entourage proche…
Le réalisme des « méchants » est également l’un des points forts de 24 heures chrono. On y retrouve, dans les grandes lignes, la plupart des bad guys ayant défrayé l’actualité ces dernières années. Au point que lors des attentats de Madrid, la retransmission de l’assaut à la télévision ressemblait comme deux gouttes d’eau à une intervention des hommes en noir de la CTU. On a donc retrouvé, au fil de ces 8 saisons, les méchants terroristes d’Al Qaida organisés en cellule, le cartel de Medellin, certains pays d’Afrique, les états voyous du moyen-orient (la réupblique islamique du Kamistan, dont les initiales forment un explicite I.R.K…), et même les russes…
Bien sûr, le format répétitif de cette série a dû en lasser plus d’un. Et tenir l’intrigue sur 24 épisodes est parfois difficile. Les scénaristes ont donc eu tendance, ces dernières années, à accélérer les scènes de transition: les déplacements qui pouvaient prendre 10 à 15 minutes auparavant sont condensés, pour ne durer que 2 ou 3 minutes. La notion de « 24 heures chrono » y perd en réalisme, mais la puissance du scenario s’en trouve renforcée.
Il n’en reste pas moins qu’à l’issue de cette saison 8 (dont je ne connais pas la fin, donc svp, ne dévoilez pas tout), cela aura fait 8 * 24 épisodes de 45 minutes chacun (un épisode dure une heure, mais si on en retire la pub, cela diminue pour ne durer que 45 minutes). Soit, au total, six jours non stop. Se dire qu’on a passé six jours pleins de sa vie à voir des scènes d’une violence parfois insoutenable (la saison 8 atteint un paroxysme), cela peut en décourager…