David FENECH ne se définit pas dans les marges ni dans l'underground musical dont la vocation est de se trouver dans les souterrains et sous-sols, car il cherche avant tout à inventer des mélodies, une autre manière de tracer des lignes mélodiques et de transformer des voix : la sienne, celle des autres prises sur le vif aux enfants, aux adultes, à un vieux 45 tours donnant une leçon d'anglais ou à un extrait de conversation, d'un film peut-être, telle qu'on l'entend sur la chanson "Odette" dans son dernier album : "Pelochon battle".
Parce que la voix touche à la chair, dénudée de paroles, la voix sans langue et sans frontières, à laquelle il donne toutes les nuances de la déchirure à la douceur.
Et parce que la voix comme la musique sont la preuve de ce qui reste vivant en nous, même au-delà de la mort.
Comme je vis au contraire le plus souvent dans la quête du silence monacal, je m'émerveille du rapport au silence de David FENECH.
"Le silence, c'est le mort", me dit-il dans ses deux vidéos pour "savoirchanger". Une fois l'enregistrement terminé, David ajoute : "La musique, c'est d'abord communiquer. Je pense à ceux qui me sont proches qui sont morts, j'aimerais pouvoir leur parler, mais je suis face comme tout le monde à du silence. La musique au contraire communique". Elle parle aux vivants, parle du vivant.
La musique dépasse alors notre finitude : "Jouer du silence ou avec le silence, ça peut être très provoquant, mettre mal à l'aise le public, car c'est le renvoyer à la pensée de la mort".
Alors David s'attèle à capter la musique du monde, à transformer les bruits de notre environnement, à modifier les sons d'instruments traditionnels : être vivant, c'est être entouré de sons, de bruits et musiques dans le bus, la rue, le supermarché, la rumeur des voitures ou celle de la Nature. Il n'y a rien d'Hugolien chez Fenech, pas d'orchestre divin déjà installé dans les arbres, mais deux chiens qui aboient au quotidien sous sa fenêtre et que, par une écoute attentive, peu à peu, David transforme en une douce litanie.
Laureline Amanieux, ©.