La justesse de Control - le film d'Anton Corbijn sur Ian Curtis, l'emblématique chanteur de Joy Division - pourrait tenir dans le seul choix du noir et blanc. Ou plutôt dans la lutte du noir et blanc contre le gris.
Le gris, c'est la banlieue industrielle anglaise avec ses barres d'immeuble. C'est l'environnement de nuages et de bitume qui menace d'apathie ceux qui l'habitent. C'est aussi, bien sûr, le gris des images d'archive qui sert à embaumer les légendes comme celles de Joy Division et de Ian Curtis - au risque de les neutraliser. Ce gris-là est une absence de couleur.
Mais Control est surtout l'histoire d'un jeune exalté et d'un chanteur désespéré: un film dans lequel s'opposent le blanc et le noir. Car Ian Curtis est d'abord un candide. Un blanc-bec rêveur, qui se marie et se passionne pour la musique dans un même élan vital. Un élan qui se retourne pourtant contre lui - et finit par distiller dans le film une noirceur de mort. Le symbole de ce retournement mortifère restera probablement, dans la maternité, ce plan sur le berceau, métaphore du nouveau-né et de la vie qui s'annonce - en même temps qu'effrayant réceptacle d'un trou noir et stérile.
A partir de cet instant, le film devient un combat de crises et de larmes entre l'enthousiasme naïf et la pulsion de mort, entre l'amour et la mauvaise culpabilité. Une esthétique noire et blanche de l'épilepsie qui va très bien à Ian Curtis.
She's lost Control, version live et version Control.