C’est une vieille histoire, toujours recommencée depuis la Bible et avant, le sédentaire “dans ses meubles” se méfie du nomade et parfois le tue.
L’agriculteur qui cultive “sa” terre, élève “ses” bêtes, cueille “ses” fruits, craint celui qui vient et passe. Il a peur pour “son” cheptel, pour “sa” récolte, il protège “son” enclos. On peut le comprendre. Il craint l’historique “voleur de poules” C’est l’incompréhension ancestrale entre l’espace délimité et l’infini.
La fusillade du Loir et Cher et le saccage de la gendarmerie ne sont qu’un épisode de plus dans cette incompatibilité historique et qui demeurera incompréhension, mais réactive ces peurs compréhensibles. L’Etat “sédentaire” réagit donc à cette crainte.
Qu’elles sont les décisions annoncées :
- le démantèlement d’ici trois mois de la moitié des quelque 600 “camps ou squats” illégaux recensés en France.
- la reconduite quasi-immédiate des Roms qui auraient commis des atteintes à l’ordre public ou à des fraudes en direction de la Bulgarie ou de la Roumanie (là on rigolle de la plaisanterie …)
La France va ensuite “proposer à la Roumanie d’accueillir des policiers roumains et parallèlement d’envoyer des policiers français en Roumanie”. On en a trop dans le Loir et Cher !
Et puis comme la bagnole ça se voit, des inspecteurs du fisc vont être affectés au contrôle des “grosses cylindrées” : “beaucoup de nos compatriotes sont à juste titre surpris en observant la cylindrée de certains véhicules qui traînent les caravanes”. Celle là, elle est de plus en plus utilisée … tant il est vrai que le sédentaire lambda n’aime pas la Mercédez qu’il n’a pas. Il ne sait pas compter : son crédit sur 35 ans pour sa maisonnette entourée de thuyas lui permettrait de se payer beaucoup de Mercédez ! Le “tu as vu la bagnole” … c’est louche … ça marche à tous les coups.
En face les nomades se défendent et accusent :
“Nous sommes les citoyens les plus contrôlés de France !” Pour obtenir une carte d’identité nationale, qui ouvre l’accès à un compte en banque, à un crédit, à des assurances, les tracasseries administratives se révèlent sans fin, même lorsque les demandeurs présentent une adresse fixe – généralement celle d’une association ou d’un terrain dont ils sont propriétaires. Et quand enfin ils l’obtiennent, les nomades n’accèdent au droit de vote qu’après être resté – officiellement, bien sûr – trois ans dans la même commune, contre six mois pour n’importe quel citoyen européen qui emménage dans une nouvelle ville …
Il m’a été donné de fréquenter ces communautés du voyage, d’essayer d’arrondir certains angles, de promouvoir la compréhension. Je peux témoigner qu’ils sont porteurs de traditions très fortes, de cultures, de richesses d’esprit. Je peux témoigner aussi qu’ils sont réfractaires à nos organisations sociales, à nos modes de vie, à notre ordre. Il sera en conséquence très difficile de réaliser la symbiose. A défaut, le stationnement, voilà le problème numéro un des nomades, pour lesquels les fameuses aires d’accueil constituent le pivot de leur vie itinérante. Les associations qui les représentent, se plaignent que moins de la moitié des emplacements prévus pour les gens du voyage par la loi Besson de 1990 existent effectivement. Quand on connaît la réticence d’un Maire quel que soit son “étiquette” pour accepter de telles implantations, on mesure la difficulté : toujours d’accord, mais sur la commune la plus éloignée ! C’est triste à dire, mais vrai, ce débat au local rejoint à quelques mots prêts celui sur les décharges publiques !
Enfin, pour ce qui concerne les évènements récents responsables du retour au premier plan de ces questions; il est évident que la Loi doit s’appliquer aux nomades comme aux autres, mais ni plus ni moins. Ici le délit de sale gueule n’a pas plus sa place qu’ailleurs. Ceux qui pensent, à l’image de 2002, que ces questions de sécurité ressentie sont une fois de plus à négliger ou brocarder, sont dans la plus grande erreur. Il appartient donc à chaque expression politique de proposer ses solutions originales !