Mon avis :
C’est un voyage, sans continuité temporelle logique, dans la Vera Vita. Un manga tranche-de-vie aux accents italiano, où la cuisine raffinée sud-européenne et où le charme de latins cinquantenaires, porteurs de lunettes de presbytes et aux vestons bien coupés, prennent tout leur sens.
La classe italienne anoblie par une bd japonaise et une mangaka ! Un beau paradoxe que nous propose son auteure, Natsume Ono, qui lasse de son ancien pseudonyme Basso, n’en a pas pour autant quittée son coup de crayon yaoi (mangas dédiés aux relations amoureuses homosexuelles)
et sa passion pour les personnages androgynes : Claudio, Luciano, Vito…ont tous cette allure bishonen (c’est-à-dire féminisée), longilignes, aux visages creusés, aux traits marqués, pas nécessairement montrés sous leurs plus beaux atours, mais vrais, authentiques, comme l’est l’Italie.
Le style graphique y est en effet épuré, il peut être déconcertant car un brin alternatif pour certains
traditionnalistes, quelque peu sec et abrupt, mais pas austère pour autant, rassurez-vous. En tous
cas, il est reconnaissable, fin, avec une patte bien stylisée, et même la couverture, plus épaisse avec
effets relief au toucher, m’a attiré par sa cassure avec tous les codes existants. Les caractères sont
attachants et réalistes. Les focalisations par chapitre sur chaque personnage sont bien montées et
fouillées.
Je vous conseille de commencer par la lecture du one-shot « Ristorante Paradiso », pas une
préquelle, mais un passage obligé pour bien assimiler l’ambiance si particulière qu’a su instaurer
la mangaka. De passer ensuite par l’étape animé, le petit bijou du moment. Puis vous serez fin prêt pour découvrir le triptyque « Gente ». Une chronique, un peu courte à mon goût, qui aurait pu prolonger son existence à travers les décennies, mais qui permet à ce petit monde ordinaire de devenir sympathiquement attachant et qui nous donne ainsi envie de nous promener dans les ruelles
de Rome en quête du fameux paradis.
Emilie Genévrier