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L’administration n’adhère pas à la fin de l’anonymat sur Internet

Publié le 24 juillet 2010 par Jackd

Il y a quelques temps, le sénateur Masson avait créé la polémique avec sa proposition de loi tendant à faciliter l’identification des éditeurs de sites de communication en ligne.

Sur la question de l’anonymat sur internet – contenue, notamment, dans cette proposition de loi Masson – l’administration vient de faire connaître sa position.

L’obligation de déclarer sa véritable identité sur Internet serait inopportune

Aux yeux de l’administration, l’obligation de déclarer sa véritable identité sur Internet serait inopportune car elle entrerait en conflit avec rien de moins que… la liberté d’expression.

Elle prend, toutefois, soin de préciser d’une part que cette liberté d’expression doit s’exercer dans le cadre des lois en vigueur et d’autre part que l’auteur des écrits reste responsable des contenus qu’il publie.

Concrètement, par exemple, un blogueur n’osera plus donner son avis sur la politique de son entreprise ou sur celle du gouvernement, surtout s’il est fonctionnaire.

En outre, une telle obligation méconnaîtrait le fait que l’anonymat ou le pseudonymat sont deux des pratiques permettant la protection de la vie privée sur Internet.

En dehors des situations où l’emploi de sa véritable identité est indispensable, notamment, pour accéder à ses dossiers personnels, il est toujours déconseillé d’utiliser son vrai nom sur « la toile ».

L’obligation de déclarer sa véritable identité sur Internet serait inefficace

Pour l’administration, l’obligation de déclarer sa véritable identité sur Internet serait également inefficace car la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique fait déjà obligation aux prestataires de service en ligne de conserver l’identité des contributeurs, afin de permettre de faire, éventuellement, jouer la responsabilité de ces contributeurs.

Dans la pratique, certains internautes ouvrent des comptes sur des sites contributifs sous des identités d’emprunt de sorte qu’en cas d’abus de leur liberté d’expression, une enquête sera nécessaire, à partir de l’adresse IP de l’ordinateur utilisé, pour rechercher l’identité de l’auteur des contenus en cause.

Obliger les internautes à publier leur identité ne les empêcherait pas de mentir s’ils le souhaitent, sauf à contraindre chaque internaute à détenir et à utiliser systématiquement des outils de preuve d’identité, comme s’apprête à le faire la Chine.

La loi pour la confiance dans l’économie numérique fait, par ailleurs, obligation au prestataire de service Internet de supprimer les contenus qui lui sont signalés comme illégaux : même si la recherche de l’auteur de l’infraction s’avérait infructueuse, par cette voie, il pourra être mis un terme aux abus.

L’obligation de déclarer sa véritable identité sur Internet constituerait une mauvaise solution au problème de la diffamation via le réseau

Toujours selon l’administration, l’obligation de déclarer sa véritable identité sur Internet constituerait, enfin, une mauvaise solution au problème de la diffamation en ligne, qui réside en fait dans la durée de prescription.

Cette durée de prescription est, comme pour les articles de presse, de trois mois à compter de la mise en ligne, mais tandis qu’au bout de trois mois, un article sur papier a disparu des kiosques, sur Internet il reste indéfiniment.

C’est là tout le débat sur la nécessité d’une prise en compte différenciée de la prescription pour les diffamations sur le réseau.

Ce débat, qui avait eu lieu au Parlement à l’occasion du vote de la loi pour la confiance dans l’économie numérique, avait abouti au maintien de la durée de trois mois.

(Rép. min. Wojciechowski, n° 81344, JO AN 20 juillet 2010).

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