George plane dans sa dope.
Il enlace ses enfants, puis les abandonne à leurs jeux. Et les regarde.
Etre avec eux, simplement là, c’est déjà une occupation à plein temps. Pourquoi vouloir faire autre chose que de les regarder grandir ? Pourquoi même intervenir ? Ne serait-ce pas risquer de leur communiquer une part de notre aliénation ? Au nom de quoi devrait-on les diriger, les orienter, leur imposer notre trip ? Ils ont tout le temps de choisir ce qu’ils auront envie d’être, ou de croire…
Et Manuela :
Tu dois comprendre cela : ce que tu vois ici, notre manière de vivre, c’est nous. C’est notre trip. On n’a pas toujours été comme ça. George est allé à l’université. J’ai quelques diplômes moi aussi. Mais nous ne voulons pas prendre des boulots qui feront de nous de simples rouages du système. Nous ne voulons pas entrer dans le jeu de la compétition, telle qu’on nous y a préparés dès l’école primaire. Nous refusons ce jeu. Nous voulons vraiment que cette société change, et pour cela, nous devons changer nous-mêmes. En demeurant à l’écart de toute cette vie artificielle qu’on achète au prix fort, pour compenser l’horrible aliénation de se trouver enfermés, privés de liberté, à s’abrutir au travail. Nous refusons de consommer des tas de produits inutiles, et nous voulons garder le maximum de temps pour nous, enrichir notre vie spirituelle, respirer la nature, planer. Voilà pourquoi, aujourd’hui, nous sommes pauvres. Pauvres par choix.
A 25 ans, le photographe et journaliste français Alain Dister part aux Etats-Unis avec le grand projet d’embrasser la vague psychédélique qui secoue l’Amérique. Il en tire un livre sorti en 2001, Oh, Hippie Days !, présenté sous forme de journal de bord et réédité en 2006 aux éditions J’ai Lu.