Schizophrénie

Publié le 27 juillet 2010 par Toulouseweb
Air Berlin s’embourgeoise et rejoint l’alliance Oneworld.
C’est un coup de thιβtre : l’Europe compte dιsormais deux grandes compagnies low-cost, et non plus trois : aprθs un ιlιgant virage sur l’aile, la compagnie allemande va rejoindre Oneworld. On ne serait pas davantage surpris si Ryanair dιcidait d’adhιrer ΰ l’IATA !
En remontant le cours des ιvιnements, on ne devrait pourtant pas κtre surpris. Air Berlin est atteinte, en effet, d’une forme subtile de schizophrιnie. D’une part, elle tente de se maintenir sur le terrain de Ryanair et EasyJet, de l’autre, elle recherche le trafic ΰ haute contribution et dιveloppe un rιseau long-courrier ΰ part entiθre. On a tout d’abord cru ΰ l’ιmergence d’un nouveau modθle ιconomique, sorte de compromis entre d’incompatibles extrκmes. Air Berlin allait tracer une voie nouvelle, le compromis tant attendu, la compagnie aιrienne europιenne du XXIe siθcle. En rιalitι, il n’en est rien.
Il serait plus justifiι d’ιvoquer un jeu de poupιes russes ou, tout au moins, d’un montage de deux compagnies en une. Sur son rιseau court-courrier, Air Berlin affiche encore et toujours des prιtentions de low-cost. Exemple rιvιlateur : le jour-mκme oω elle confirme officiellement son entrιe dans Oneworld, qui sera effective dans quelques mois, Air Berlin met sur le marchι un million de places ΰ trθs petits prix, ΰ partir de 29 euros. En revanche, sur le long-courrier, la compagnie s’est imperceptiblement banalisιe.
C’est en quelque sorte Darwin aviateur. L’arbre gιnιalogique fait apparaξtre des origines compliquιes, qui remontent aux pires moments de la guerre froide et du Mur de Berlin, avec participation volontariste d’Air France et de Pan American World Airways. Plus tard, Air Berlin s’est germanisιe, a pris son autonomie. Elle a alors affichι de grandes ambitions, concrιtisιes par des initiatives de croissance externe : rachat de Deutsche BA, expιrience malheureuse en terre ιtrangθre de British Airways, prise de contrτle de LTU (longtemps spιcialiste des charters longues distances) et entrιe ΰ hauteur de 49% dans le capital de Niki. Un curieux patchwork.
Le rιsultat est loin d’κtre mauvais, encore qu’il soit difficile ΰ apprιcier en ces temps de sortie de crise. Air Berlin aligne une flotte jeune de 165 avions, occupe 8.500 personnes seulement et a rιalisι l’annιe derniθre un chiffre d’affaires de 3,2 milliards d’euros et un tout petit bιnιfice d’exploitation. Son adhιsion ΰ Oneworld signifie qu’elle entre dans la cour des grands en mκme temps qu’elle se prιparer ΰ gκner davantage Lufthansa, et cette fois-ci ΰ l’ιchelle du monde. Dιtail remarquable, Air Berlin est parrainιe par British Airways.
L’alliance Oneworld s’en trouve renforcιe et le fait savoir. Elle vient aussi d’inscrire Kingfisher Airlines ΰ son tableau de chasse, enregistrera bientτt l’adhιsion de la compagnie russe S7 Airlines et a obtenu l’immunitι anti-trust amιricaine pour l’installation d’une «Joint Business Association» transatlantique.
A n’en pas douter, les dirigeants de Lufthansa froncent les sourcils tandis que ceux de Ryanair et EasyJet esquissent un sourire entendu.
Pierre Sparaco - AeroMorning