Parlons de l’essentiel

Publié le 27 juillet 2010 par Politicoblogue

Drapeau du Kosovo

Dans son article publié dans La Presse de samedi dernier à la suite du jugement de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le Kosovo, l’auteur de la Loi sur la clarté, M. Stéphane Dion, met l’accent sur les difficultés pratiques susceptibles de découler d’une déclaration unilatérale d’indépendance de la part du Québec. C’est insister sur une évidence secondaire pour éviter de parler de l’essentiel.

L’importance de cette décision, c’est qu’elle renforce considérablement la position du Québec à la table de négociation, et, par la suite, à l’égard des autres nations. Le Québec sait qu’à la suite d’un référendum gagnant, la procédure normale à suivre en vertu du droit international, c’est de négocier avec le Canada les modalités de son accession à l’indépendance. Cela était d’ailleurs prévu dans le Projet de loi sur l’avenir du Québec auquel la question référendaire de 1995 faisait expressément référence. Cela était également prescrit par la décision de la Cour suprême du Canada sur la Sécession du Québec, laquelle précisait d’ailleurs que le Canada aurait alors l’obligation constitutionnelle de négocier de bonne foi avec le Québec.

L’étape importante à la suite d’un référendum gagnant, c’est donc celle de la négociation Québec-Canada. Et ce qui compte, à cette étape, c’est le pouvoir de négociation de chacune des parties. Or c’est-là que la décision de la CIJ sur le Kosovo prend toute son importance en affirmant qu’en cas d’échec des négociations, une déclaration unilatérale d’indépendance de la part du Québec serait conforme au droit international. Le Québec a donc dans son jeu une carte maitresse pour assurer l’aboutissement fructueux des négociations. C’est un peu l’équivalent du droit de grève ou de lock-out dans les négociations collectives : le simple fait de l’existence de ce droit assure, la plupart du temps, que les négociations se poursuivront de bonne foi et qu’une entente satisfaisante sera conclue.

Or, avant la décision de la CIJ sur le Kosovo, la possibilité de recourir à une déclaration unilatérale d’indépendance, en cas d’échec des négociations, était contestée comme étant contraire au droit international. Cela, dorénavant, ne peut plus être contesté. La Cour suprême du Canada, dans sa décision, l’avait d’ailleurs déjà laissé entendre, mais la chose est désormais incontestable.

Toutes les pièces du processus d’accession à la souveraineté du Québec sont maintenant en place. Il reviendra au peuple du Québec de prendre la décision de devenir souverain au moyen d’un référendum tenu suivant la Loi sur la consultation populaire. La constitutionalité de cette loi a d’ailleurs été reconnue par la Cour suprême du Canada. Puis se tiendront des négociations entre le Québec et le Canada sur les moyens de donner suite à la volonté des Québécois : le Canada aura alors l’obligation constitutionnelle de participer à ces négociations et d’y négocier de bonne foi. Le pouvoir de négociation du Québec à cette table de négociation sera fortement renforcée par la pression internationale qui découlera de la possibilité légale qu’aura le Québec, en cas d’échec, de déclarer unilatéralement son indépendance. Tous auront alors intérêt à ce que cette question se règle rapidement par la voie de la négociation et, évidemment, feront des pressions en conséquence sur le Canada.

La vraie leçon qu’il faut tirer de la décision de la CIJ sur le Kosovo, ce n’est pas que le Québec n’est pas le Kosovo, mais plutôt que le Canada n’est pas la Serbie.

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