Échanges aigre-doux entre David Douillet et Rama Yade. Le premier est suspecté de convoiter le bac à sable de la première. Malgré son parcours chaotique, la secrétaire d’Etat dont la jeunesse et la beauté sont les meilleures armes a sorti les griffes pour décocher au micro d’Europe 1 une flèche au curare en destination de l’ancien sportif : “Il mériterait la ceinture noire du ridicule“. Anecdotique certes mais ces tensions confirment qu’en annonçant en juillet un remaniement ministériel en octobre, le Président de la République a commis une erreur politique.
Il est loin le temps où, narquois, Nicolas Sarkozy se proclamait directeur des ressources humaines du Parti socialiste . C’est aujourd’hui lui qui essuie les railleries de son propre camp. Début juillet, Dominique de Villepin qualifiait de “supplice inventé par les Chinois” l’annonce par Nicolas Sarkozy d’un remaniement à la rentrée.
“Dans quelle situation sont aujourd’hui les ministres montrés du doigt, qui sont supposés devoir partir? Dans quelle situation sont-ils vis-à-vis des Français, vis-à-vis d’eux mêmes, mais surtout vis-à-vis de leur administration?”, “Un ministre, c’est le chef d’une administration, or un ministre en sursis, qui est désigné comme partant, c’est un ministre qui perd immédiatement tout son crédit auprès de son administration” avait déclaré aux journalistes le fondateur de République Solidaire.
Non sans délectation et quelques larmes de crocodile, l’ancien Premier ministre avait qualifié de “situation inacceptable sur le plan humain” le fait de “désigner des sortants et tous les jours de faire monter un peu plus la pression sur eux”. “C’est un supplice qui a été inventé par les Chinois mais qui me paraît tout à fait inapproprié dans une démocratie“.
Avec bon sens, l’ancien Chef de gouvernement avait pointé l’ambiance malsaine et déstabilisante que ne peut que susciter un remaniement à venir.
Cherchant une bouffée d’oxygène dans la tentaculaire affaire Woerth-Bettencourt, Nicolas Sarkozy outre le soutien à son ministre du travail avait annoncé le 30 juin dernier qu’il tirerait après la réforme des retraites les « conséquences » du « comportement » de certains ministres. “Certains comportements ministériels ne m’ont pas plu. J’en tirerai les conséquences sévèrement au moment qu’on aura choisi avec le premier ministre“. En évoquant de façon elliptique “Avions, cigares, critiques de la nature des hôtels” Nicolas Sarkozy avait entrevoir les noms des membres du gouvernement sur la sellette à savoir respectivement Alain Joyandet (Coopération), Christian Blanc (Grand Paris) et Rama Yade (Sports).
C’est toutefois incontestablement Rama Yade qui semblait concentrer le courroux présidentiel. Évoquant devant les députés UMP réunis à l’Elysée le «désastre» de l’équipe de France de football, le Chef de l’Etat auto-proclamé secrétaire d’État aux Sports avait semblé introniser sans ambages le successeur naturel : “Je parle sous les yeux de David…” David Douillet, triple médaillé olympique de judo, député UMP des Yvelines.
Encouragé par un tel appel du pied David Douillet ne cache plus son intérêt pour le poste.
“Si Nicolas Sarkozy me le proposait, j’accepterais“, a reconnu l’ancien sportif dans un entretien paru jeudi 22 juillet dans Var matin . “Mon ambition est de servir l’intérêt général. Ma satisfaction: contribuer à faire avancer quelque chose ou améliorer le système”.
Attention toutefois de ne pas vendre la peau de la tigresse avant de l’avoir tuée. Rompue aux intrigues de la Cour malgré son jeune âge, Rama Yade espère bien profiter de l’été pour renverser la situation et retrouver grâce aux yeux du Chef de l’exécutif. Le message à l’attention de son successeur désigné délivré sur les ondes d’Europe 1 a été on ne peut plus clair :”Ceux qui cherchent à me mettre dehors, qu’est-ce que ça veut dire? Ils mériteraient la ceinture noire du ridicule“.
Fin tacticien comme tout bon judoka, David Douillet depuis fait le dos rond et attend son heure en prenant soin de ne pas souffler sur les braises. L’exfiltration de la benjamine du gouvernement s’annonce animée. Le député qui avance vouloir servir l’intérêt général figure néanmoins parmi les députés remarqués par leur absentéisme .