1111.- "Mais qu'est ce que lis en ce moment ?"
- 160 mètres carrés de Rimbod
- ... Arthur Rimbaud ?
Non il ne s'agit ni d'Arthur ni même de John, c'est la petite dernière de la famille, Aurore, qui a signé cette première nouvelle d'une précision irrésistible. Happés par la redoutable efficacité du propos quand on parcourt les premières pages, on est pris d'une irrépressible envie de le poursuivre jusqu'à son terme.
Jean et Eva sont mariés depuis dix ans mais il n'y a plus d'amour dans leur couple parfait et sans nuage malgré la superbe et l'épanouissement qu'ils affichent depuis tant d'années dans toutes les soirées mondaines. Lui héritier d'une famille aristocrate parisienne né avec une cuiller en argent, Elle élevée à la dure dans les milieux interlopes et tourmentés d'une province sans promesse pour l'avenir. Elle monte à Paris, remarque le célibataire le plus en vue et entreprend de lui mettre le grappin dessus. Au bout d'une décennie, le banquier décide de tout plaquer, sa femme opportuniste qui n'éprouve que dégoût à son encontre, son métier qui ne le passionne plus et son 160 mètres carrés pour se donner tout entier à la seule passion à laquelle il s'était toujours refusé depuis tant d'années, l'écriture.
Entre triangle et quadrilatère amoureux, on est touché par la description juste et émouvante des moments entre Arnold un jeune handicapé et sa mère remplie d'amour, et on passe à l'amusement en découvrant les situations rocambolesques dans lesquelles se fourrent le Jean à son corps presque défendant. Lorsqu'enfin on croit connaitre les tenants et les aboutissants de l'intrigue, l'auteure nous envoie sur les roses, en assénant des rebondissements et des révélations en pagaille jusqu'au surprenant coup de théâtre final. Le style est juste et mature et l'on goûte une douceur extrême à découvrir un tel foisonnement de d'éléments dans la description de chaque personnage, certaines scènes peuvent heurter des sensibilités et nous font oublier parfois que l'auteure n'était âgée à l'époque que de vingt-deux ans. Pour la citer, il est une sensation palpable qu'Aurore Rimbod "a consacré énormément de temps, à peu près tous les jours et certaines nuits à penser à tous ses caractères. Elle a fait naître une intrigue et a inventé patiemment leurs vies dans les moindres détails".
Le fait que la deuxième partie soit plus condensée que la première ne déséquilibre en rien le roman car il fallait bien ancrer les personnages et la situation dans une réalité devenue familière pour le lecteur ainsi mis en confiance avant de l'emmener jusqu'à la fin totalement imprévisible.
Bravo Aurore et vivement un plaisir renouvelé de lire tes prochaines pièces !
"160 mètres carrés" d'Aurore Rimbod aux éditions Edilivre.com