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Dissolution, piège à cons !

Publié le 26 juillet 2010 par Mister Gdec

Dissolution, piège à cons !

Arme fatale 3, la dissolution : une (fausse) bonne solution

Sollicité dernièrement par un p’tit gars qui me demandait de militer via blogs interposés pour la dissolution de l’Assemblée Nationale, j’ai quelque peu tardé, je l’avoue, me suis fait tirer l’oreille, et j’ai traîné des pieds… en me hâtant de ne surtout pas répondre. Volontairement.

Pas chaud bouillant, le gars, pourtant d’ordinaire plus prompt à s’enflammer pour des causes révolutionnaires et pour tout ce qui pourrait contribuer de près ou de loin à mettre un grand coup de pied dans la fourmilière…

Mais il faut bien avouer que celui qui me l’a demandé m’a laissé quelque peu échaudé après l’histoire du NSD… dans laquelle j’ai dépensé tant d’énergie, non pas en pure perte, mais pour un résultat pour le moins mitigé

Aussi, cette fois, j’ai pris les devants… et le fruit de mes investigations me fait toujours penser exactement la même chose : Benjamin, désolé, mais pour moi, c’est NON! Et voilà le pourquoi du comment…

En premier lieu, que je trouve sur le net les traces conjointes comme deux escargots baveux de 2 personnes aussi peu suspectes de collusion intellectuelle que Julien Dray et Jean Marie Le Pen (à qui je ne ferai pas la publicité d’un lien) me laisse plus que perplexe : interloqué.

Mais je vais tenter de dépasser ici ma répugnance… en explorant méthodiquement avec les petits outils qui sont les miens les avantages et inconvénients de ladite arme fatale…

Commençons par l’avis technique

« Le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents des assemblées, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale.

Les élections générales ont lieu vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution.

L’Assemblée nationale se réunit de plein droit le deuxième jeudi qui suit son élection. Si cette réunion a lieu en dehors de la période prévue pour la session ordinaire, une session est ouverte de droit pour une durée de quinze jours.

Il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l’année qui suit ces élections. »
(Article 12 ).

Les cas de figure dans lesquels un Président de la République française peut choisir (et oui, c’est lui qui choisit ! Dommage….) d’avoir recours à la dissolution sont de plusieurs ordres :

- Utiliser un commode « moyen de pression sur l’Assemblée nationale, et particulièrement sur la majorité parlementaire. Il s’agit aussi de requérir le soutien à la politique présidentielle ». Tel en a été le cas le 9 octobre 1962. La majorité de droite a censuré le gouvernement Pompidou; cependant, c’était le général de Gaullequi était visé pour son projet de révision constitutionnelleintéressant l’élection du Président au suffrage universel direct. »

- Le droit de dissolution est également « un moyen de prévention des crises institutionnelles et politiques. En cas conflictuel entre le Président et la majorité parlementaire, la dissolution permet au peuple de décider. Ainsi le droit de dissolution fut utilisé préventivement, le 18 mai 1981et le 13 mai 1988, à la suite de l’élection à la Présidence de la République d’un candidat en opposition avec la majorité de l’Assemblée nationale. Le Président Francois Mitterrands’était trouvé face à une majorité parlementaire de droite hostile à sa politique. En prononçant la dissolution de l’Assemblée nationale, Mitterrand demandait une majorité de soutien afin d’exercer sa politique (il s’agit d’une dissolution d’ajustement), en vue de retrouver une adéquation avec la majorité.

- Toutefois, « la dissolution du 30 mai 1968 a été prononcée afin de sortir de la crise et du désordre sans qu’il n’y ait nécessairement eu de conflit entre l’Exécutifet l’Assemblée nationale. Le Président sollicite alors l’arbitrage populaire en vue d’une rupture de la crise ». (source wikipédia)

Mais l’exemple le plus mémorable de dissolution semble être à mes yeux celle de 1997 (voir le Discours de Chirac ici), dont on prête l’idée à Villepin, alors secrétaire général de la présidence de la République…

Il est particulièrement édifiant de lire ce qu’écrivait Baudrillard en 1997 lorsque Chirac a commis ce qui reste encore dans le souvenir de beaucoup comme une monumentale bourde.

Passons à présent aux arguments avancés par les uns et les autres.

Julien Dray, dans une interview accordée aux Inrockuptibles demande à Nicolas Sarkozy de « dissoudre l’Assemblée nationale » parce qu’il y aurait dans l’esprit du peuple de France une forme de colère sociale ainsi qu’ « une impression de frustration par rapport aux promesses de Nicolas Sarkozy en 2007 et l’espoir qu’il avait de faire bouger la société. »

« Nicolas Sarkozy doit poser aux Français la question de la confiance qui lui est accordée, ce qui passe par une dissolution de l’Assemblée. Si le Président ne résout pas le problème maintenant, il prend le risque que la situation s’éternise pendant encore deux ans. ». (Il continue d’ailleurs à évoquer, à juste titre selon moi, ce risque de pourrissement de la situation économique et sociale sur son blog. Voir ci-après…).

Le Même, sur LCP,  avance qu’une dissolution serait nécessaire pour "remettre de l’ordre dans la tête" des Français dans ce "climat judiciaire" qui est aussi le "prolongement d’un malaise politique".

"Regardez l’état dans lequel on est aujourd’hui, imaginez ce que ça va être (d’ici à 2012). Parce que ça ne s’arrêtera pas", a-t-il déclaré sur RTL . "Mais je pourrais dire aussi un référendum" sur les retraites

Enfin, sur son blog, jeudi dernier, dans un billet intitulé « Pourquoi il faut dissoudre? », il avançait également les arguments suivants :

- l’époque et la situation actuelle nécessitent un changement de programme économique et social d’ampleur, qui ne correspond pas au registre idéologique et programmatique de Sarkozy.

« Un tel chantier nécessite un gouvernement fort, soutenu par une majorité qui soit au diapason avec lui,et légitimé par un fort soutien populaire. Un tel chantier nécessite tout simplement que règne la confiance entre le pays et ses gouvernants. Chacun mesurera la distance entre ces conditions et la situation actuelle. »

-De toute évidence, la majorité qui avait été élue en 2007, dans un contexte radicalement différent de celui que nous connaissons aujourd’hui, a épuisé ses ressources, et n’a plus assez ni de ressort, ni de perspectives programmatiques pour faire face aux défis actuels. Ce serait respecter le peuple français que de le reconnaître.

JM Le Pen, lui, juge la dissolution nécessaire car, je cite il y aurait une «  rupture de plus en plus large entre le pouvoir et le peuple", caractérisée notamment par "l’abstention considérable" dans les élections… On connait son antienne sur le tous pourris et corrompu sauf moi, le discours est usé, même sous les traits de sa blonde fille… Les arguments sont toujours aussi faibles, par delà l’antipathie que j’éprouve pour le(s) personnage(s).

Hollande  estcontrecar il y a "une élection est prévue pour 2012, il faut la préparer et donc mieux vaut gagner une élection présidentielle – je parle d’expérience – que de gagner des élections législatives et de faire une cohabitation".

Pour terminer ce billet et tenter de définir ma propre position, je voudrais citer Baudrillard encore :

«  On voit ainsi un Président dissoudre sa propre majorité absolue pour refiler le pouvoir à une gauche qui ne s’attendait visiblement pas à ce cadeau empoisonné, mais qui est bien forcée de le prendre. »

Veut-on encore de cette pomme empoisonnée là ?

Moi pas. Je me souviens trop à quel point la cohabitation qui s’en est suivie a jeté de discrédit sur la politique en général, le PS en particulier, et combien l’idée de gauche ne s’en est pas trouvée grandie… Au point qu’il me semble qu’on peut trouver dans celle-ci l’une des causes de la survenue d’une terrible surprise au second tour de la Présidentielle de 2002… Est-ce que vous en voulez encore ?

Quelques blogs qui évoquent le sujet (je veux bien rectifier la liste si j’en ai oubliés, comme dab)

Le blog zéro-un

Cpolitic, Ici ou , et encore là, sur médiapart ! (purée, la classe !)

Sarkofrance, en coulisses,

Luc Mandret, dans sa version personnelle de lettre au Président(Il faut sauver le petit Nicolas)

(à la suite de ce billet, dit d’ailleurs « Le pire est qu’il pourrait bien dissoudre, effectivement, mais ne pas démissionner… C’est la meilleure solution pour être élu en 2012… », ce en quoi je suis plutôt d’accord…

et enfin le savoureux Causeur, dans le billet Une seule solution, la dissolution , avec comme sous-titre « Cohabiter pour ne pas mourir » ne laisse planer aucun doute sur son positionnement idéologique… :

« Reste la seule solution raisonnable qui peut permettre à Nicolas Sarkozy d’espérer un second mandat : la dissolution de l’Assemblée nationale. Cela peut très bien se vendre au peuple : « J’ai compris votre message et j’en tire les conséquences. Je vous demande de me renouveler solennellement votre confiance en élisant une majorité sur un programme que je vais vous présenter pour les deux années qui viennent. » Naturellement, il sera battu, cohabitera pendant deux ans avec Martine Aubry et sera triomphalement réélu en 2012. Élémentaire, mon cher Guéant. »

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