Zodiac - Robert Graysmith ( III )

Par Woland

Il serait fastidieux d'énumérer tous les procédés utilisés par Robert Graysmith pour monter sa théorie et tenter d'ériger celle-ci en vérité universelle. L'un des plus courants, aussi vieux que la propagande, est l'utilisation de phrases ou d'extraits de lettres et de rapports sortis de leur contexte et auxquels, sous cet éclairage réducteur, on fait dire tout ce que l'on veut.

Le plus lassant - celui aussi qui se décèle le plus rapidement - c'est le fait de sauter sur n'importe quel fait mineur relatif à ce que l'on savait du Zodiac et à le rapprocher immédiatement d'Arthur Leigh Allen comme s'il s'agissait d'une preuve irréfutable l'impliquant, sans aucune contestation possible, dans les meurtres du Zodiac.

Petit exemple :1) le Zodiac aimait à se servir d'une arme à feu et tout porte à croire que celles (il y eut, je crois, un fusil et un pistolet) qu'il utilisait lui appartenaient ; 2) Arthur Leigh Allen en possédait plusieurs (dont un pistolet et un fusil) et c'était un chasseur émérite (d'ailleurs il était du Sagittaire et tout le monde sait, n'est-ce pas, que les natifs du Sagittaire sont d'excellents chasseurs, Graysmith dixit (!!) ) ; Conclusion : Arthur Leigh Allen était bel et bien le Zodiac.

Quelques paragraphes plus loin, Graysmith remet le couvert avec un nouvel élément. Et ainsi, en une répétition lente et têtue, il martèle sa vérité au lecteur naïf. (Sur le lecteur occasionnel surtout, qui a acheté le livre parce que l'histoire l'interpellait et qui n'est pas vraiment un fondu des livres, l'effet doit être redoutable.)

Rien par contre - mais alors là, rien de rien - sur un détail qui crève pourtant les yeux : Arthur Leigh Allen était pédophile - il fit d'ailleurs de la prison pour attouchements sur mineurs - tandis que le Zodiac, en ne s'attaquant qu'à des adultes qui, dans la majeure partie des cas, allaient en couple, prouve que son problème sexuel, s'il était bien réel, n'avait rien à voir avec la pédophilie.

Certes, Graysmith fait une timide tentative pour imputer au Zodiac, pardon, à Arthur Leigh Allen, quatre ou cinq meurtres supplémentaires (dont certains avec viols) sur des jeunes filles mineures. Mais il convainc d'autant moins que les crimes qu'il rapporte ici n'ont jamais été, quoi qu'il en dise, prêtés au Zodiac.