Elle sonna à la porte.
Vers cinq heures quelqu'un est venu ouvrir.
- Attendez-vous depuis longtemps?
Je n'attendais pas, dit-elle
...quelqu'un,
- j'étais juste de passage, alors j'ai sonné.
Et vous pourquoi m'avez-vous ouvert?
Je n'ai ouvert que par curiosité.
- Je ne voulais pas vous voir vous, mais il fallait que j'ouvre, depuis le temps...
- le temps n'est rien ici, à cette porte.
- Voulez-vous un fauteuil bleu, pour vous asseoir?
- C'est risqué de se laisser surprendre par ces choses.
- Où étiez-vous avant de sonner à ma porte?
- Je ne sais pas bien.
- C'est un lieu bien commun.
- Si je me souviens! En train de lire sur un tapis recouvert de vieux magazines, des revues à sensations de l'époque.
- Qu'attendez-vous de moi, aujourd'hui?
- Je ne savais pas que c'était de vous que je devais attendre...
- oui voila, c'est ça, je me souviens de la pièce, la cheminée, le feu et cette femme en train de peindre debout.
- Mais comment êtes vous venue à cet étage jusqu'à cette porte?
- Parce que j'ai regretté de ne plus me souvenir de l'endroit ou je devais aller.
- Que deviez-vous y faire?
- Sans doute, y chercher autre chose. Quelque chose de plus fluide dans le déroulement de cette scène.
L'homme s'est approché d'un meuble à tiroir dans lequel il s'est mis à chercher au milieu de dossiers mélangés, laissant planer autour de lui une fine pellicule de poussière d'encre vieillie par l'odeur rance des vieux papiers.
Il fallait qu'elle fume maintenant, elle aurait du dire quelque chose à ce sujet,
Lui à sorti du tiroir du bas un révolver emballé dans un mouchoir de velours au motif écossais, il à posé le révolver sur la table et s'est assis derrière son bureau sans un mot.
Elle s'est recoiffée, à allumé une cigarette.
Le silence lui pesait.
Maintenant elle regrettait d'être venue sans savoir ce qu'elle faisait, d'avoir pris somnambule le métro depuis l'appartement, d'être sortis à cette station et d'être monté à cet étage, dans cette maison, avec ses fenêtres fermées, sauf une ouverte, celle en face d'elle qui donnait sur l'incinérateur et les grandes cheminées débiles.
L'homme s'est mis à se gratter l'oreille à la manière d'un jeune épagneul, puis il s'est accroupi sur son fauteuil en fouillant méticuleusement entre ses orteils.
- Prendrez-vous des pantoufles, des tartines où des croissants pour le petit-déjeuner?
- Mais je ne reste pas pour la nuit.
- Ah...bien, bien.
- Je vais partir maintenant. Vous savez je me suis trompé de porte je crois, la dernière fois il y avait des plantes vertes dans l'entrée et vous n'aviez pas la même couleur obsolète.
- Vous vous rappelez maintenant de la dernière fois?
- Non ! ... enfin... oui... mais ce n'est pas sur... c'est souvent le cas vous savez... comment m'avez-vous connue?
- Comme aujourd'hui, vous avez sonné à ma porte, un jour, c'était il y quatre ans environs, vous portiez des manuscrits sous le bras, vous vous rendiez à la bibliothèque, nous avons parlé de la sensation d'oppression dans une illustration de Jules Leroux, celle où Nanon à les yeux pris au piège.
- Ah... je n'ai pas gardé ce moment, où peut-être m'a-t-il quitté
- Suis-je manuscrite dans votre bureau, êtes-vous docteur en train de me lire?
- Non vous êtes encore trop consciente pour classer le fichier.
- Aurons-nous un autre rendez-vous, après cette séance?
- Cela dépend de vous, de votre attitude à maintenir vivant le catalogue et surtout à le porter dit-il en éclatant de rire. D'un fou rire froid et grumeleux, qui laissa couler un peu de bave à la commissure des lèvres, puis il cracha par terre, et la regarda fixement, la langue pendante, la bouche ouverte.
- Elle s'est levée, à pris le révolver et l'a rangé dans son sac, puis elle est sortie et à marché quelques heures dans le quartier autour de l'usine,sans jamais perdre de vue les cheminées et l'incinérateur.
Balder