"Collectif des Jeunes de Sarcelles et Villiers-le-Bel"
Quand en Corse des bombes explosent quasiment chaque soir et que des gendarmeries sont mitraillés, vous n'osez pas parler de voyoucratie. Quand, des dizaines d'hommes et de femmes encagoulés et équipés d'armes de guerre, défient l'Etat tout entier, vous vous gardez bien de faire le moindre commentaire et mieux encore, vous négociez avec eux.
Quand les marins-pécheurs brûlent dans leur région des bateaux et des pneus, quand les pompiers chargent les CRS pendant une manifestation, quand les chasseurs saccagent un ministère de la République, il n'est question ni de voyou, ni de bande, ni d'intégration. Nous avons condamné sans ambiguïté l'usage de la violence sur les personnes comme sur les biens.
OUI nous avons voulu, au-delà de la douleur des familles et de la perte tragique des enfants, faire entendre nos voix une fois de plus pour vous alarmer sur les conditions de vie dans nos quartiers.
Et comment faire autrement ? Puisque les promesses électorales et les centaines de forums qui ont suivi la mort de Zyed et Bouna à Clichy-sous-bois n'auront même pas suffit à vous faire bouger. Mais s'il vous est toujours plus commode de vouloir monter nos concitoyens les uns contre les autres en nous faisant passer pour les sauvageons de la République, sachez que vous prenez le risque de jeter le discrédit sur tous les habitants de ces quartiers et de renforcer par vos déclarations les discriminations dont nous sommes victimes.
Les voyous, Monsieur le Président, sont celles et ceux qui ont géré les banlieues avec le succès que l'on constate. Les voyous, Monsieur le président, sont celles et ceux qui ont toujours refusé de nous considérer comme des enfants de France, de faire venir dans nos quartiers les meilleurs professeurs, de mettre plus de policiers dans nos villes qu'à Paris.
Puisque le durcissement des peines est à la mode, nous vous suggérons de vous pencher sur les entreprises, les bailleurs ou les partis politiques qui ne respectent pas le principe d'égalité de notre République. Quant à nous, nous assumerons désormais nos choix en construisant nous même l'avenir de nos quartiers sans plus rien attendre de plans de banlieues jusque là tous imaginaires.
Que nous soyons d'accord ou pas avec les propos tenus dans cette lettre, il est évident que les médias auraient dû relayer l'information pour tenter de renouer le dialogue avec une jeunesse qui se sent exclue, jour après jour, de la République. Mais bien entendu, les médias préfèrent faire leur Une sur des voitures en flammes, des bibliothèques saccagées, des voitures de police ou de pompier caillassées, c'est tellement plus porteur en terme d'audimat.
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