Un article paru il y n’a pas très longtemps dans Le Monde nous informe d’un projet pour le moins surprenant : tenter de concilier la recherche scientifique avec la critique littéraire. Hors, par une sorte de tradition assez malheureuse, de tels domaines sont considérés comme bien trop différents, voire antagonistes, pour susciter une telle réflexion – surtout de la part de savants qui, c’est bien connu, ne s’intéressent qu’aux chiffres et en aucun cas aux lettres…
Pourtant, c’est oublier un peu vite qu’une telle séparation n’existe que depuis la réforme du baccalauréat par Napoléon : le Siècle des Lumières et avant ça l’Humanisme de la Renaissance s’étaient pourtant bâtis sur l’idée que les champs de la connaissance ne devaient souffrir aucune barrière, et surtout pas entre eux. Mais on comprend que Bonaparte ait vu là une opportunité de ligoter d’autant plus cette « pensée libre » qui jurait avec son régime : après tout, c’est en manipulant la jeunesse, donc les étudiants, qu’on assure la pérennité d’un règne.
Il semble que cette dichotomie soit sur le point de s’effondrer ; en tous cas, la science-fiction s’y efforce depuis plus d’un siècle et il me semble distinguer déjà d’assez nettes lézardes dans l’édifice du « petit caporal » – ce qui est tout à fait satisfaisant : les tyrannies, en effet, ont horreur de ce qui les menace, et celle-ci n’a que trop duré…