Ce texte a été publié en 2007, il date de 2005, il est dépassé sur certaines données, mais il reste pertinent sur la philosophie cachée d'un tunnel.
Le projet d'un tunnel ferroviaire dans les Pyrénées centrales laisse espérer une possibilité de développement pour notre région. Mais notre avenir est-il restreint à la seule hypothèse de construction d'un tunnel ? Une fois achevé, cet ouvrage ne risque-t-il pas, au contraire, de susciter des désillusions ?
A l'heure de la mondialisation et de la libéralisation des échanges, les flux de marchandises ont explosé. Les grands axes de communication à l'échelle européenne sont saturés. L'éclatement du tissu productif à l'échelle mondiale en est la principale conséquence. Les grandes entreprises internationales recherchent les moyens de production au niveau mondial dans les pays où le coût de la main d'œuvre est bas, et il faut ensuite transporter ces marchandises vers les grands centres de consommation dont l'espace européen fait partie.
L'Espagne est en situation de périphérie en Europe car éloignée de la "dorsale européenne", c'est-à-dire le cœur économique partant du Sud-Est de l'Angleterre au nord de l'Italie, à laquelle elle cherche à s'intégrer. Sa croissance très forte, fait que l'Espagne va rattraper son retard face aux autres pays les plus industrialisés de l'espace européen. Dans dix ans, les échanges vont donc exploser, les axes routiers ouest et est des Pyrénées seront saturés. De plus l'Europe cherche à faciliter les échanges avec le Maghreb : ce peut être positif, mais c’est aussi une volonté de faciliter les délocalisations du tissu productif dans des pays à bas coût de main-d’œuvre et où la protection sociale est inexistante. Dans cette logique, un axe central serait donc nécessaire, pour sans cesse fluidifier, aller au plus vite, rentabiliser au maximum, en privilégiant l’option libérale.
L'axe ferroviaire devrait déboucher sur une plate-forme près de l'aéroport où des entreprises s'implanteraient. Un axe de transport majeur n'est pas une garantie de développement local, il favorise, ce que les géographes appellent, "l'effet tunnel" (c'est-à-dire qu'un espace enclavé est traversé par un grand mode de communication sans bénéficier d'un développement local). À l'heure actuelle, la logique des entreprises, au niveau intraeuropéen, est de se concentrer dans les grandes métropoles: Toulouse, à titre d'exemple concentre la majeure partie des activités aéronautiques, sans que le reste la région ait pu en profiter de manière massive. De plus, croit-on sérieusement qu'une traversée ferroviaire sera rentable si l'on part seulement d'Ossun ? Le gain sera minime : il ne faut donc pas croire que ce projet changera les logiques économiques.
Les Hautes-Pyrénées ont perdu massivement des emplois à GIAT, ALCAN, SPRIA , aussi ne serait-il pas préférable de se mobiliser sur ce problème majeur pour notre avenir ? La TCP n’est donc pas une formule miracle et ne sera pas génératrice de développement économique et social pour le département.
On parle d'un atout pour développer les échanges et resserrer les liens avec le versant sud. Mais l’Aragon n'est pas la région la plus dynamique de l'Espagne, à l'instar de la Catalogne et du Pays Basque, ce n’est pas un nouvel eldorado. Ce tunnel coûtera aussi cher que le tunnel sous la Manche, autant dire un gouffre financier, car il est peu probable que les flux de trafics ne se détournent d'eux-même des axes Ouest et Est. Les fonds publics, destinés à ces travaux pharaoniques, seraient plus utiles au développement des régions en crise. Ces investissements vont profiter uniquement aux grandes multinationales qui ne cessent de faire jouer la concurrence entre les régions afin de comprimer les coûts de production au maximum, sans qu'elles participent au financement d'une infrastructures qui leur sont destinées . Les citoyens pâtiront des effets et du coût de l'infrastructure. De plus comment se projeter dans vingt ans, alors qu'à l'heure actuelle notre département est profondément touché par la désindustrialisation et qu'il nous faut des décisions rapides et efficaces pour stopper l'hémorragie ? Ce ne sont pas les mesurettes économiques de ces dernières années qui vont changer la situation économique des Pyrénées centrales. Ce ne sont pas n'ont plus les méga-centres commerciaux qui vont permettre de dynamiser notre département, ni les continuels effets d'annonces d'implantation de projets qui s'évanouissent dans le temps à l'image de Bouygues, des ateliers de réparation d'Air France
Les logiques économiques ne doivent pas régenter l'organisation de l'espace : il est donc nécessaire de réguler les flux de marchandises. Le ferroutage est certes une alternative au transport routier mais les Pyrénées centrales sont l'espace le moins favorable pour une nouvelle traversée. Leurs vallées étroites ne permettent pas le développement d'infrastructures lourdes sans dégât pour. De plus la 4 voie en aval, le lit du gave, les deux anciennes routes, "la coulée verte" ne laissent plus guère de place à un nouvel axe. Le débouché sur Lourdes est un véritable casse-tête puisque c'est un véritable verrou glaciaire. Doit-on faire passer la ligne sur l'ancien tracé ferroviaire Lourdes-Pierrefitte et remettre en cause la coulée verte ? Il est indéniable que les Lourdais apprécieront la traversée d'une centaine de trains par jours en pleine zone urbaine et que l'image de la ville en prendrait un coup surtout pour le tourisme. Dans ce cas, il faut donc contourner ce verrou urbain. Malheureusement les espaces disponibles, permettant un passage sans nuisances, sont inexistants. À l'ouest, le lac de Lourdes est un site protégé, à l'est il y a des massifs dont les travaux augmenteraient les coûts.
Quid des nuisances sonores, pour les riverains ? Quid du transport des matières dangereuses ? Quelle réaction auront les valléens, face à des travaux qui dureront des années et engorgeront les axes de communication ?
Quel impact aura le tunnel sur le réseau hydrographique sachant que le massif du Vignemale est le château d'eau des Pyrénées occidentales et que des nombreuses sources thermales alimentent la station de Cauterets ? Le département ne mise-t'il pas son image sur le tourisme et l'environnement ? Il serait beaucoup plus rationnel de remettre en état la ligne Pau-Canfranc, de créer une ou deux lignes ferroviaires à l'est et à l'ouest, là où le coût financier et l'impact sur l'environnement seraient plus faibles. Le trafic maritime présente aussi une alternative intéressante et une liaison entre Bayonne et les ports du Pays basque de l’État espagnol est aussi à envisager.
D'une manière plus générale, c’est l'organisation même du tissu productif induit par le libéralisme qu’il faut contester. La dissémination fait exploser le trafic, alors qu'une concentration par site est plus rationnelle. Le tunnel sous le Vignemale ne répondra qu'aux flux actuels. Si les règles du marché conduisent à laisser développer l'anarchie de l'organisation de l'espace, combien de millions de tonnes traverseront les Pyrénées d’ici vingt à trente ans??? À terme, c'est d’une "montagne gruyère" qu’il s’agira et ce n'est pas un, mais deux, trois tunnels qui seront nécessaires.
Les Pyrénées ont été peu défigurées jusqu'à nos jours. N'adoptons pas les mêmes logiques qui ont entraîné le bétonnage des montagnes alpines, dont les habitants ne cessent de se plaindre. La logique purement libérale délaisse les espaces périphériques au profit des grandes métropoles, tournant le dos à un aménagement sain et démocratique des territoires. Ce tunnel pharaonique en serait un exemple typique.
Le tunnel transpyrénéen, catastrophe pour l'avenir ou progrès ?
Le projet d'un tunnel ferroviaire dans les Pyrénées centrales laisse espérer une possibilité de développement pour notre région. Mais notre avenir est-il restreint à la seule hypothèse de construction d'un tunnel ? Une fois achevé, cet ouvrage ne risque-t-il pas, au contraire, de susciter des désillusions ?
A l'heure de la mondialisation et de la libéralisation des échanges, les flux de marchandises ont explosé. Les grands axes de communication à l'échelle européenne sont saturés. L'éclatement du tissu productif à l'échelle mondiale en est la principale conséquence. Les grandes entreprises internationales recherchent les moyens de production au niveau mondial dans les pays où le coût de la main d'œuvre est bas, et il faut ensuite transporter ces marchandises vers les grands centres de consommation dont l'espace européen fait partie.
L'Espagne est en situation de périphérie en Europe car éloignée de la "dorsale européenne", c'est-à-dire le cœur économique partant du Sud-Est de l'Angleterre au nord de l'Italie, à laquelle elle cherche à s'intégrer. Sa croissance très forte, fait que l'Espagne va rattraper son retard face aux autres pays les plus industrialisés de l'espace européen. Dans dix ans, les échanges vont donc exploser, les axes routiers ouest et est des Pyrénées seront saturés. De plus l'Europe cherche à faciliter les échanges avec le Maghreb : ce peut être positif, mais c’est aussi une volonté de faciliter les délocalisations du tissu productif dans des pays à bas coût de main-d’œuvre et où la protection sociale est inexistante. Dans cette logique, un axe central serait donc nécessaire, pour sans cesse fluidifier, aller au plus vite, rentabiliser au maximum, en privilégiant l’option libérale.
L'axe ferroviaire devrait déboucher sur une plate-forme près de l'aéroport où des entreprises s'implanteraient. Un axe de transport majeur n'est pas une garantie de développement local, il favorise, ce que les géographes appellent, "l'effet tunnel" (c'est-à-dire qu'un espace enclavé est traversé par un grand mode de communication sans bénéficier d'un développement local). À l'heure actuelle, la logique des entreprises, au niveau intraeuropéen, est de se concentrer dans les grandes métropoles: Toulouse, à titre d'exemple concentre la majeure partie des activités aéronautiques, sans que le reste la région ait pu en profiter de manière massive. De plus, croit-on sérieusement qu'une traversée ferroviaire sera rentable si l'on part seulement d'Ossun ? Le gain sera minime : il ne faut donc pas croire que ce projet changera les logiques économiques.
Les Hautes-Pyrénées ont perdu massivement des emplois à GIAT, ALCAN, SPRIA , aussi ne serait-il pas préférable de se mobiliser sur ce problème majeur pour notre avenir ? La TCP n’est donc pas une formule miracle et ne sera pas génératrice de développement économique et social pour le département.
On parle d'un atout pour développer les échanges et resserrer les liens avec le versant sud. Mais l’Aragon n'est pas la région la plus dynamique de l'Espagne, à l'instar de la Catalogne et du Pays Basque, ce n’est pas un nouvel eldorado. Ce tunnel coûtera aussi cher que le tunnel sous la Manche, autant dire un gouffre financier, car il est peu probable que les flux de trafics ne se détournent d'eux-même des axes Ouest et Est. Les fonds publics, destinés à ces travaux pharaoniques, seraient plus utiles au développement des régions en crise. Ces investissements vont profiter uniquement aux grandes multinationales qui ne cessent de faire jouer la concurrence entre les régions afin de comprimer les coûts de production au maximum, sans qu'elles participent au financement d'une infrastructures qui leur sont destinées . Les citoyens pâtiront des effets et du coût de l'infrastructure. De plus comment se projeter dans vingt ans, alors qu'à l'heure actuelle notre département est profondément touché par la désindustrialisation et qu'il nous faut des décisions rapides et efficaces pour stopper l'hémorragie ? Ce ne sont pas les mesurettes économiques de ces dernières années qui vont changer la situation économique des Pyrénées centrales. Ce ne sont pas n'ont plus les méga-centres commerciaux qui vont permettre de dynamiser notre département, ni les continuels effets d'annonces d'implantation de projets qui s'évanouissent dans le temps à l'image de Bouygues, des ateliers de réparation d'Air France
Les logiques économiques ne doivent pas régenter l'organisation de l'espace : il est donc nécessaire de réguler les flux de marchandises. Le ferroutage est certes une alternative au transport routier mais les Pyrénées centrales sont l'espace le moins favorable pour une nouvelle traversée. Leurs vallées étroites ne permettent pas le développement d'infrastructures lourdes sans dégât pour. De plus la 4 voie en aval, le lit du gave, les deux anciennes routes, "la coulée verte" ne laissent plus guère de place à un nouvel axe. Le débouché sur Lourdes est un véritable casse-tête puisque c'est un véritable verrou glaciaire. Doit-on faire passer la ligne sur l'ancien tracé ferroviaire Lourdes-Pierrefitte et remettre en cause la coulée verte ? Il est indéniable que les Lourdais apprécieront la traversée d'une centaine de trains par jours en pleine zone urbaine et que l'image de la ville en prendrait un coup surtout pour le tourisme. Dans ce cas, il faut donc contourner ce verrou urbain. Malheureusement les espaces disponibles, permettant un passage sans nuisances, sont inexistants. À l'ouest, le lac de Lourdes est un site protégé, à l'est il y a des massifs dont les travaux augmenteraient les coûts.
Quid des nuisances sonores, pour les riverains ? Quid du transport des matières dangereuses ? Quelle réaction auront les valléens, face à des travaux qui dureront des années et engorgeront les axes de communication ?
Quel impact aura le tunnel sur le réseau hydrographique sachant que le massif du Vignemale est le château d'eau des Pyrénées occidentales et que des nombreuses sources thermales alimentent la station de Cauterets ? Le département ne mise-t'il pas son image sur le tourisme et l'environnement ? Il serait beaucoup plus rationnel de remettre en état la ligne Pau-Canfranc, de créer une ou deux lignes ferroviaires à l'est et à l'ouest, là où le coût financier et l'impact sur l'environnement seraient plus faibles. Le trafic maritime présente aussi une alternative intéressante et une liaison entre Bayonne et les ports du Pays basque de l’État espagnol est aussi à envisager.
D'une manière plus générale, c’est l'organisation même du tissu productif induit par le libéralisme qu’il faut contester. La dissémination fait exploser le trafic, alors qu'une concentration par site est plus rationnelle. Le tunnel sous le Vignemale ne répondra qu'aux flux actuels. Si les règles du marché conduisent à laisser développer l'anarchie de l'organisation de l'espace, combien de millions de tonnes traverseront les Pyrénées d’ici vingt à trente ans??? À terme, c'est d’une "montagne gruyère" qu’il s’agira et ce n'est pas un, mais deux, trois tunnels qui seront nécessaires.
Les Pyrénées ont été peu défigurées jusqu'à nos jours. N'adoptons pas les mêmes logiques qui ont entraîné le bétonnage des montagnes alpines, dont les habitants ne cessent de se plaindre. La logique purement libérale délaisse les espaces périphériques au profit des grandes métropoles, tournant le dos à un aménagement sain et démocratique des territoires. Ce tunnel pharaonique en serait un exemple typique.