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Comment se faire recaler à un concours de nouvelles

Publié le 21 juillet 2010 par Equeritet

Le lecteur du Val est une association de 25 bibliothèques des villages du Sicoval, charmante communauté d'agglomération du Sud-Est Toulousain, parfois également nommée "porte du Lauragais". Dans ce coin-là les villas sont coquettes, les centre commerciaux et les ronds points euh… moches, et le vent d'Autan… Chaque année cette asso organise un concours de nouvelles et, à l'automne 2009, poussé par un élan littéraire subit j'ai décidé d'y participer. Car, voyez-vous, l'écriture, c'est un de mes dadas.

Je me suis donc rendu sur le site de l'association, pour y découvrir le thème du concours…

Il s'agissait de rédiger un texte de 6 pages à partir de la phrase suivante :

"L'objet gisait au milieu du sentier, parfaitement insolite dans ce cadre bucolique..."

Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais l'automne 2009 c'était pile-poil le moment où l'on préparait la conférence de Copenhague, où l'on rêvait d'un geste fort de la part des grands de ce monde en faveur de la planète.

Il n'en fut rien, la montagne accoucha d'une demi-souris et les dirigeants de tous les pays repartirent chez eux la queue entre les jambes, sans doute satisfaits d'avoir sacrifié l'avenir des jeunes générations à leurs intérêts financiers immédiats.

C'est très contrarié que je me suis mis à la rédaction de la nouvelle pendant la trève hivernale. J'avais du mal à digérer le fiasco danois. Et en redécouvrant le thème de départ du concours, je l'ai trouvé dégoulinant de mièvrerie. Tout m'énervait : la tournure de la phrase, les verbes, les adverbes, les adjectifs et même les articles. Le mot "sentier" me semblait ridicule avec ses senteurs d'humus, ses évocations de fougères, ses papillons stupides voletants gaiement dans les rayons de soleil filtrant à travers les feuillages. Savent-ils d'ailleurs faire autre chose, ces insectes imbéciles ? Le mot "bucolique" m'apparaîssait soudainement comme une incongruïté passéiste. Seuls des aveugles, vivant sans télé, ni journaux, ni internet pouvaient avoir produit un départ de nouvelle se vautrant à ce point dans un angélisme béat !

Alors, du finfond de ma rancœur et de ma déception, je me suis vengé de Barack Obama, Hu Jintao et du petit français qui faisait des moulinets avec les bras entre les deux, j'ai aussi vengé les ours blancs, les pélicans du Golfe du Mexique (j'avais de l'avance) et les glaciers de l'Himalaya. J'ai châtié le Lecteur du Val, et j'ai commis ça :

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Le Clan des collines

« L'objet gisait au milieu du sentier, parfaitement insolite dans ce cadre bucolique… » Assis au bord du chemin poussiéreux, Jamel relisait la phrase qu’il venait d’écrire au crayon à papier sur son petit carnet, compagnon de route dont il ne se séparait jamais. Il souligna le mot «bucolique» d’un trait tremblant et ajouta un point d’interrogation dans la marge. Il avait un doute quant à la signification de ce mot et n’était plus vraiment sûr qu’il soit adapté au cadre environnant.  Il jeta un coup d’œil circulaire : il se trouvait dans ce qui jadis avait vraisemblablement  été un bosquet. Il essaya d’imaginer le même endroit plein de vie, comme il en avait, un jour, lu la description dans un livre ancien : la végétation, le chant des oiseaux, le murmure d’un torrent. Mais c’était peine perdue et il ne parvint pas à maintenir sa vision intérieure très longtemps. Devant lui quelques troncs d’arbres tordus dressaient leurs branches mortes vers le ciel comme une ultime imploration. Le sol était sec, rocailleux, stérile. Par delà les branches et jusqu’à l’horizon s’étirait une immense étendue vallonnée, ocre et désertique. À la limite entre le ciel et la terre, la vision se troublait en vagues de chaleur ondulantes. Jamel regarda le ciel, le soleil n’était pas très haut. Il devait être aux alentours de 9 h du matin et la température avoisinait déjà les 40 degrés. Il était plus que temps de rentrer au camp, dans une heure ou deux au plus, aucun être vivant ne survivrait bien longtemps dans cette atmosphère surchauffée. Dire que nous étions à peine au mois de février… Il glissa le carnet dans les plis de son vêtement et ramassa la chose. Un cylindre de métal chromé prolongé par un étrange bouton de plastique. Lorsqu’on appuyait sur le bouton il faisait mine d’entrer dans le cylindre, retenu dans sa course par ce qui semblait être un ressort. Jamel n’alla pas plus loin dans la manipulation de l’objet au cas où cela eut comporté un danger. Il le mit dans sa besace et se leva.

Après avoir ajusté son chech  pour bien se protéger le visage du rayonnement solaire il se mit à marcher droit devant lui. Arrivé à un petit tumulus de roches il marqua un temps d’arrêt. Il regarda rapidement le soleil et jugea qu’il pouvait s’autoriser un détour sans prendre de risque. À 19 ans seulement, Jamel était le meilleur chasseur-pisteur du camp, le seul habilité à sortir seul pour ses rondes de surveillance. Il choisit donc d’allonger son chemin en rajoutant une boucle par le sud-est. Au bout de quelques minutes il vit se dessiner dans la fournaise un léger relief, presque imperceptible pour qui n’en connaîtrait pas l’existence. Il s’approcha des quelques briques empilées qui formaient comme l’ébauche d’un mur. Tout à côté, un panneau métallique pendait sur un piquet de fer tordu. Il le contourna. La peinture écaillée, brûlée par le soleil permettait de deviner l’inscription. C’est ici qu’il y a 12 ans, Romuald, le plus ancien du campement lui avait appris à lire ses 5 premières lettres.

L… A… B… È… G… E…

Jamel sourit. Romuald lui avait appris qu’autrefois ici il y avait une ville, des commerces, des entreprises. Mais c’était il y a bien longtemps, avant… Le sourire du jeune homme se transforma en rictus d’amertume. Il avait continué son chemin quelques centaines de mètres plus loin jusqu’à la carcasse calcinée et rouillée d’un hélicoptère Tigre. Une pale tordue se dressait tragiquement vers le ciel, la queue de l’appareil était sectionnée à la base et reposait sur le sol à quelques pas du fuselage ensablé. Jamel jeta un coup d’œil à l’intérieur du cockpit. Année après année, son état se dégradait et il ne restait plus aujourd’hui que les arceaux métalliques. Tous les matériaux à base de plastique avaient fondu sous la chaleur. Il se rappelait les leçons du vieux Romuald : il y avait d’abord eu la première guerre climatique, celle contre les pays du sud. Le conflit ne dura pas. L’Europe, bien nourrie et mieux équipée n’avait pas eu de mal à repousser les envahisseurs de l’autre côté de la Méditerranée.  Cette année là, l’Afrique avait été officiellement abandonnée à son triste sort.

Mais ce n’est pas en fermant les yeux que l’on règle les problèmes. La température avait continué à monter, tout comme le niveau des mers, submergeant la quasi totalité de la Grèce, une grande partie de l’Italie, de l’Espagne et du Portugal, ainsi que le sud de la France jusqu’à 60 km de Toulouse. Les inondations et les intempéries jetèrent des millions de gens sur les routes et c’est ainsi que débuta le deuxième conflit climatique. Ce fut une guerre civile ignoble, fratricide. Errant sur les routes par milliers, les gens affamés s’étaient regroupés en bandes plus ou moins organisées, s’arrogeant par la force tout ce qui pouvait combler leurs besoins immédiats et notamment les principales ressources : la nourriture, l’eau et le pétrole. Les autorités avaient tenté de rétablir l’ordre d’une main de fer et c’est lors d’une des dernières opérations de pacification que l’hélicoptère de l’armée française avait été abattu au lance-roquette par des rebelles. On raconte que les pillards s’étaient jetés sur les pilotes et les avaient dévorés. En souvenir de cet épisode et en guise d’avertissement, les crânes des deux militaires blanchissaient aujourd’hui encore au soleil, au sommet de deux tiges de métal plantées aux abords de la carcasse. Personne n’avait jamais songé à les décrocher. Romuald les avait longtemps utilisés comme « support pédagogique » afin d’expliquer aux plus jeunes les dangers de la vie à l’extérieur du camp. Aujourd’hui encore le cannibalisme était fréquent et il était très risqué pour toute personne inexpérimentée d’errer sans but hors de la protection d’un groupe. Tout cela s’était déroulé il y a quelques décennies. Depuis, les gouvernements, les armées et tous ceux qui en avaient les moyens avaient fui au nord de l’Europe, au delà de la Manche, dans les îles britanniques, au Groenland et en Scandinavie qui bénéficiaient encore d’un climat de type tropical. Ils avaient construit une ligne de démarcation hermétique et jalousement gardée. Une surveillance constante par des drones et des radars sophistiqués empêchaient toute tentative d’intrusion. Bien à l’abri derrière leurs fortifications ils profitaient des lagons coralliens de la Mer du Nord, dilapidant dans l’insouciance les dernières gouttes de pétrole en courses de jet-ski…

Jamel ramassa une poignée de sable chaud et le laissa filer entre ses doigts, imaginant que c’était de l’eau pure et claire. Le vent se levait, il plissa les yeux et tendit l’oreille. Le souffle tiède lui apportait des sons étranges, des éclats de voix, des détonations au loin. Il s’éloigna de l’épave et marcha jusqu’au bord du plateau rocailleux d’ou dépassait un tronçon de route, plongeoir dérisoire au-dessus d’une mer de sable. Il s’allongea tout au bord de la section d’autoroute et sortit ses jumelles. À quelques kilomètres de là, dans les ruines de ce qui avait été autrefois un centre commercial, une bataille faisait rage. Son cœur se serra. Le clan du Carrefour veillait depuis plusieurs générations sur les restes du stock du centre commercial. Oh, bien sûr, cela faisait longtemps qu’il n’y avait plus — officiellement — de nourriture dans l’endroit. En revanche des pièces mécaniques, des vêtements et toute sorte de matériel étaient encore disponibles. Le clan de Jamel et ceux du Carrefour étaient en paix et pratiquaient régulièrement le troc. Il ajusta ses jumelles : les pillards avaient l’apparence caractéristique des clans cannibales qui avaient asservi la ville de Toulouse comme la plupart des grandes agglomérations européennes. Ils étaient maigres, hirsutes, barbus et tatoués. L’armée hétéroclite des agresseurs comptait une cinquantaine d’hommes à pied brandissant des piques et des sections de tuyaux, trois cavaliers munis de fusils d’assaut AK 47, juchés sur des dromadaires et un véhicule à moteur sur lequel était monté une mitrailleuse lourde. Jamel n’était jamais entré dans la ville, mais on racontait que ces gens pratiquaient l’esclavage, élevaient des humains pour se nourrir de leur chair et organisaient régulièrement des expéditions de pillage vers les campements pacifiques situés en zone périphérique. Ceux du Carrefour se défendaient bien, ce n’était pas la première fois qu’ils subissaient ce genre d’attaque et ils étaient eux aussi armés. Cette fois-ci, ils tiendraient… Mais jusqu’à quand ? Les assauts des pillards étaient chaque fois plus fréquents, plus violents et les munitions de plus en plus rares.

Jamel en avait assez vu, il fallait qu’il rentre faire son rapport. Il recula en rampant, rangea ses jumelles et rebroussa chemin en trottinant. Il traversa la plaine aride d’un bon rythme, sans se retourner, franchit le lit asséché de ce qui fut jadis le Canal du Midi et commença l’ascension des collines. Essoufflé, il trébucha dans les cailloux et parvint enfin au niveau d’une paroi rocheuse en pente douce entourée d’éboulis. Il ralentit un peu son allure. Il fouilla du regard parmi les grosses pierres empilées et découvrit ce qu’il cherchait : tapie dans l’ombre d’une grosse pierre la gueule d’une mitrailleuse le fixait. Il dénoua son chech pour que son visage apparaisse en pleine lumière et dit simplement : « C’est moi José, c’est Jamel ».

Quelques instants plus tard, une trappe s’ouvrit dans la poussière de la colline et un bras lui fit signe de se hâter. Il se courba et entra dans le souterrain tandis que la porte blindée se refermait dans un bruit sourd qui résonna dans le couloir. Le portier lui donna une tape dans le dos, soulevant un nuage de poussière, et tendit une gourde : « Alors, bonne promenade ? ». Jamel but longuement et s’essuya la bouche du revers de la manche avant de répondre : « Ouvre l’œil José. Les cannibales sont de sortie et ça chauffe dur du côté du clan Carrefour. J’y retournerai ce soir pour savoir comment ça a évolué.» Le gardien rangea sa gourde d’un air inquiet et retourna à son poste.

Le tunnel faiblement éclairé par de petites ampoules électriques vacillantes s’enfonçait en pente dans des ténèbres qui paraissaient sans fond. Jamel en connaissait chaque détail, c’était là qu’il avait fait ses premiers pas, vécu ses premiers jeux d’enfants. Après avoir marché une bonne dizaine de minutes, il se trouva face à une autre porte métallique sur laquelle il frappa trois coups secs. La porte s’ouvrit en grinçant sur une immense salle voûtée pour se refermer aussitôt après l’entrée du jeune homme. La température était moins élevée qu’à l’extérieur mais atteignait tout de même une trentaine de degrés. Il salua d’un geste de la tête Héléna, la femme aux cheveux gris qui l’avait adopté et recueilli. Elle le regarda s’éloigner avec bienveillance. Patrick, le chef de camp, assis derrière une table en bois l’accueillit d’un sourire las : « Alors, qu’est-ce que tu nous ramène ? »

— Pas grand chose chef, j’ai attrapé deux scorpions… » Joignant le geste à la parole, Jamel sortit de sa besace une boîte en plastique transparent où s’agitaient deux beaux spécimens couleur de sable.

— Ok, tu les donneras à la cuisine, ça fera toujours des protéines. Et puis ?

Les pillards assiègent le clan Carrefour, ils ont du attaquer au lever du jour. Mais je pense qu’ils arriveront à les repousser.»

Le chef posa sur Jamel un regard amer, gratta d’une main sa barbe de trois jours et tenta de masquer son inquiétude :

— Oui, ils les chasseront, comme d’habitude… Tu retourneras quand même voir ce soir. C’est tout ?

— Ah, non attendez, il y a aussi ça… » Il fouilla dans le fond de sa besace et posa sur la table l’objet découvert dans le bosquet calciné. « Vous savez ce que c’est, chef ? »

L’homme prit mollement l’objet le tourna dans tout les sens en le regardant d’un air blasé et secoua la tête en signe d’ignorance :

« Aucune idée, tu iras le montrer à Romuald, il te dira, lui… Rien d’autre ?

— Non, rien…

— Toujours pas d’eau ?

— Non, chef, désolé, toujours pas d’eau…»

Jamel comprenait l’inquiétude du chef, la situation devenait dramatique. Même si l’installation photovoltaïque installée il y a plusieurs décennies par Romuald et les anciens alimentait le camp souterrain en électricité et permettait la culture de quelques légumes sous serre, l’eau commençait à manquer. Le puits creusé au fond de la grande salle voûtée atteignait plus de 120 mètres de profondeur et l’eau se faisait de plus en plus rare. Malgré le rationnement, le manque commençait à se faire sentir. La population du clan, vieillissante avait de moins en moins de force pour le combat et la prospection à l’extérieur et une inquiétude sourde était palpable dans toute leur petite communauté. Jamel tomba sur Stella, une jolie jeune fille de son âge qui sortait de la serre, un panier de tomates à la main, un foulard noué sur ses belles boucle brunes. Elle le regarda avec ses grands yeux de gazelle et lui sourit. Il s’approchèrent l’un de l’autre, elle lui passa la main sur le visage : « Je suis contente que tu sois rentré en bonne santé. » Jamel la prit dans ses bras et la fit tournoyer : « En très bonne santé, même et je peux te le prouver si tu as un moment à me consacrer !» Elle se dégagea en riant : « Arrête, tu vas me faire renverser mon panier ! ». Elle le frappa du plat de la main sur l’épaule, ce qui souleva un nuage de poussière. « Va d’abord te laver, espèce de dégoûtant ! » Jamel s’enfuit en riant : « Oui, mais pas avant d’avoir vu Romuald ! À tout à l’heure ma belle… ». Malgré tout, il était heureux et se disait que le chef avait tort de s’inquiéter, que lui et Stella repeupleraient la colonie, et même qu’il n’y aurait pas assez de place pour mettre tous leurs enfants.

Il s’enfonça vers le fond de la caverne, en direction de la tente la plus isolée, celle de Romuald. Le doyen de la communauté avait maintenant plus de 90 ans et limitait ses contacts avec les autres. C’était la seule personne qui avait connu les temps d’ « avant » et son savoir était précieux. Il avait éduqué tous les membres du clan, creusé lui même, en compagnie des premiers pionniers le tunnel, la caverne et le puits. Il avait formé la plupart d’entre eux à la culture sous serres, à la production d’énergie et au combat. C’est lui qui avait instruit Jamel pendant ses premières années,  à l’époque où il y voyait encore et où il pouvait se déplacer sans trop de mal. Désormais Jamel faisait partie des seules personnes dont il supportait encore la visite.

Il écarta le rideau de la main : « Bonjour Romuald ». Au fond de la tente une voix chevrotante l’accueillit : « Entre, petit, je t’attendais. Que m’apportes-tu aujourd’hui ? » Le jeune homme s’agenouilla devant la couche du vieillard et lui tendit respectueusement l’objet. Le vieillard le prit entre ses doigts, le soupesa, le fit passer d’une main à l’autre. Quasiment privé de la vue il avait besoin de ce rituel pour redécouvrir les objets. Il appuya sur le poussoir en plastique qui se coinça à l’intérieur du cylindre métallique. Son visage se figea un instant, puis il éclata de rire… « Ha ha ha ! Ton truc, là, c’est… un allume-cigare ! Ha ha ha ! » Jamel ne comprit pas « Un quoi ?

— Un allume-cigare ! » Reprit le vieux. « Figure-toi que non contents de se déplacer en automobile et de dilapider les énergies fossiles à tout va en déréglant le climat, ceux d’avant plantaient de la végétation, en l’occurrence du tabac, pour le seul plaisir de la brûler et d’inhaler la fumée sous forme de cigarettes… Ce qui, au passage, les rendait très malades. Eh bien ce truc, là, cet objet était présent dans les automobiles pour allumer les cigarettes… Ha ha ha ! C’est pathétique. » Alors que Romuald se retournait sur sa couche en ricanant, Jamel rempocha l’objet et prit congé.

Il ne décoléra pas de la journée, bouleversé par ce qu’il venait d’entendre, et toute la tendresse de Stella ne put rien y faire. Le soir venu, il récupéra d’un air sombre le plan de sa mission de reconnaissance auprès du chef du clan et s’engagea dans le tunnel sans dire un mot. La lourde porte blindée se referma dans un bruit sourd et Jamel émergea sous le ciel étoilé. Il serrait dans son poing fermé l’allume-cigare inutile. Il maudissait ceux d’avant, leur inconséquence, leur égoïsme. Pourquoi avaient-ils sciemment hypothéqué l’avenir des générations qui les suivaient ? Pourquoi lui, Jamel, enfant trouvé dans les ruines n’avait il jamais entendu le chant d’un oiseau, le murmure d’un ruisseau, le vent dans les feuilles d’un arbre ? Pourquoi ne verrait-il jamais ses fils courir dans les prés ou se baigner dans un lac ? Pourquoi la majorité de l’humanité était-elle désormais condamnée à retourner à la barbarie en se mourant lentement de faim et de soif ? Le vent lui apporta l’odeur d’un incendie au loin et d’étranges effluves de viande grillée. Le Carrefour était tombé ? Fou de rage, il lança l’objet ridicule le plus loin possible devant lui dans la nuit noire. Tendant l’oreille, il guetta le tintement du métal sur la roche… À la place, c’est un bruit mat et un cri étouffé qui crevèrent le silence. Il tourna les talons, se précipita dans l’abri et verrouilla la porte derrière lui en hurlant : « José ! déclenche l’alarme et passe-moi les grenades : les cannibales sont là ! ».     

F I N

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Et vous savez quoi ? Au Printemps j'ai appris que ma nouvelle avait été refusée !

Je me demande bien pourquoi !!!

Enfin ça vous fera toujours un truc à lire au bureau pendant l'été ;-)

Bonnes vacances.


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