ARTS SONORES
TERMINOLOGIES ET DEFINITIONS
Toute tentative de définition, tendant à proposer un sens plus ou moins circonçis, et parfois fluctuant au gré des époques et des jargons, pose problème.
Sujets à polémiques, les expressions définissant des champs de créations des pratiques artistiques, des esthétiques ou des terrains d'expérimentation culturelle sont régulièrement, dans les
écrits ou les rencontres, remises en question.
Le débat autour des terminologies qualifiant une pratique culturelle ou artistique est parfois vif, voire âpre - affaire de spécialistes, de pluristes et/ou de militants aux points de vue aussi
affirmés que divergents.
Les arts sonores, ou la création sonore, puisqu'il faut bien, même de façon approximative les nommer, n'échappent pas à ces questionnements. Des arts Sonnants s'attachant à écrire ou à décrire
autour de ces pratiques, et à si possible donner à la fois de l'information mais aussi, par le biais d'une approche optant pour une transdisciplinarité désormais reconnue, un minimum de cohérence
dans le tissage complexe des territoires sonores, se pose donc régulièrement des questions, tant autour d'un titre générique - Les arts sonores par exemple - que des paraphrases tentant de
l'expliciter.
André Fernandes Avelãs - Headphones Art
Voici pour tenter de poser le sujet de façon large, quelques extraits d'écrits de spécialistes, ou gens de l'information, qui à la fois peuvent commencer de cerner le sujet, mais qui montrent aussi la complexité de la besogne.
Wikipédia - Art sonore
Comme de nombreux genres d'art contemporain, l'art sonore est par nature interdisciplinaire. Il peut utiliser l'acoustique, la psychoacoustique, l'électronique, la musique bruitiste, la
technologie et les supports audio, des sons trouvés ou environnementaux, etc.
Luz María Sánchez
L'art sonore appréhendé comme un espace hybride où se rejoignent arts visuels et musique, ou plus précisément les initiatives d'artistes visuels et de musiciens, est un terme de facture
relativement récente. Malgré l'usage qui en a été fait, ce terme ne peut certainement pas être considéré comme une catégorie en soi ; ce n'est ni un genre, ni un courant, ni un mouvement au sein
de l'art contemporain. Cependant, de même qu'il existe certains auteurs qui défendent l'idée de l'art sonore en tant que branche de l'art conceptuel, il en est d'autres qui, en revanche, ont misé
sur la libre circulation des pratiques esthétiques, admettant ainsi la possibilité d'un espace flexible où finalement les caractéristiques du phénomène sonore prennent toute leur vigueur au delà
des limites du support utilisé. En fait, tout au long du 20ème siècle, des commissaires, des critiques, des compositeurs et des artistes plasticiens se sont intéressés au phénomène sonore et ont
présenté le fruit de leurs recherches dans les espaces dont ils disposaient, musées et galeries, publications, stations radiophoniques - généralement du service publique -, salles de concert et
circuits spécialisés. Ce n'est que pendant les dernières décades du vingtième siècle que l'intérêt pour le phénomène sonore permet de l'identifier comme tel, ce qui, loin de contribuer à la
fragmentation des pratiques esthétiques, a permis la création d'espaces où les différents supports cohabitent, véritables plates-formes hybrides où se distingue le son dans ses multiples
usages.
http://pagesperso-orange.fr/mexiqueculture/nouvelles2-luzmsanchez-fr.htm
LEBLE Christian
«Depuis le début du siècle, on a considéré l'art sonore comme une combinaison entre les arts plastiques et la musique. C'était le postulat avancé notamment par les futuristes comme Marinetti», explique Helga de La Motte Haber, professeur à
l'université de Technologie de Berlin. Sa réflexion historique voudrait prouver que cette conception a coïncidé avec la remise en cause de la séparation du temps et de l'espace en arts distincts.
Mais qu'une fois cette remise en cause effectuée (ce qui fut aussi le fruit de la recherche ethnologique et des comparaisons avec les civilisations extraeuropéennes), il faut admettre que l'art
sonore n'est ni une spatialisation de la musique, ni une sonorisation des arts plastiques.
Article Libération culture - 06/06/1995 à 05h38 - LEBLE Christian
http://www.liberation.fr/culture/0101144588-contemporain-premier-grand-festival-d-art-sonore-le-sound-art-95-dissemine-dans-hanovre-une-trentaine-d-installations-quel-son-fait-il-a-hanovre
Céline Eloy
Depuis deux décennies, une nouvelle catégorie de manifestations artistiques se développe dans le paysage festivalier : les festivals d'art sonore. A mi-chemin entre le concert de musique et la
biennale d'art contemporain, elles offrent aux visiteurs-auditeurs l'occasion de regarder avec les oreilles et d'écouter avec les yeux...
Comme son appellation l'indique, l'art sonore utilise le son comme mode d'expression à part entière. N'étant plus considéré comme une « plus-value » dans la création, Prenant dès lors une ampleur
considérable, ce matériau devient sculptural avec un volume, une épaisseur, voire une corporalité. En raison de ses origines, il revêt diverses formes empruntées au langage artistique et musical
: concert, performance, théâtre, installation... Une création sonore peut donc aussi bien être une œuvre radiophonique qu'une performance réalisée à partir d'aspirateurs (Pierre Berthet, Expirateurs), une mise en scène de sculptures cinétiques créant
ensemble un orchestre (Pierre Bastien, Sounds can
dance) ou encore une installation employant des globes qui, une fois effleurés, produisent une composition variant selon le toucher des auditeurs (Iula Popa + Yvat + Black Moon, Amusia).
Céline Eloy - Du son pour les yeux
http://culture.ulg.ac.be/jcms/prod_95489/du-son-pour-les-yeux?section=cdu_5043
Bastien Gallet
« Composer des étendues, projeter des images : deux pratiques de
Bastien Gallet
Circuit : musiques contemporaines, vol. 17, n° 3, 2007, p.
Les pratiques sonores ne sont pas des genres musicaux. Elle déterminent moins des langages que des modalités de rapport au son. D’où leur essentielle porosité les unes aux autres et le rôle
essentiel qu’y joue l’expérimentation. L’art sonore n’improvise pas, il expérimente, il explore, arpente, déploie, exhausse les puissances du son. Ses moyens sont moins des instruments que des
dispositifs, ou des instruments devenus dispositifs, hétérogènes, insaturés, excités par des gestes inédits”.
Domaine Musiques - Bastien Gallet.
http://www.domaine-musiques.com/spip.php?article16018
RIVOIRE Annick
Prendre position autour de l'oreille. Affirmer que le son est art et l'acoustique une matière plastique, de celles que les artistes aiment malaxer.
Libération culture - 19/10/2002 à 01h28 - RIVOIRE Annick
http://www.liberation.fr/culture/0101428327-l-enfance-de-l-art-sonore
Installation de Bernard Pourrière
Mais au-delà de ces amorces de définitions, force est de constater que des connotations bien ancrées
chapellisent cet ou ces fameux arts sonores. Pour certains, c'est dés les expériences des futuristes, y compris les musiques d'ameublement de Satie, les lettristes et expériences de Charles Yves
que naissent les arts sonores.
Pour d'autres, il s'agit essentiellement de la période "Sound Art", avec le développement de nouvelles technologies et les influences post rock, minimalistes et autres inclassables underground et
experimental Music, époque post Cage débutant dans les années 50. Ces derniers ont d'ailleurs tendance, à tord ou à raison, à ne pas accepter dans le champ des arts sonores les courants de la
bricophonie, venus pour la plupart des arts forains, encore un vaste champ à identifier, pas plus que de nombreuses expériences de lutherie sauvage ou expérimentale.
L'arrivée ces dernières décennies des arts médiatiques, multimédia et numériques n'arrange rien dans la compréhension de ce que pourraient être les arts sonores, entre média, outils, modes
d'écriture ou nouvel "esthétisme plastique pour l'oreille"...
La simple écriture d'un art sonore au singulier ou d'arts sonores (au) pluriel(s) interroge.
Y a t-il une grande discipline fédératrice, recueillant sous une coupe globalisante des pratiques assez variées, en prenant comme cadre-prétexte et contexte l'usage principal du sonore dans des
œuvres d'art ?
Y a t-il un ensemble d'arts sonores touchant aux musiques expérimentales, à la radiophonie, à l'installation ou au dispositif plastique, à l'environnement , au paysage, à l'écriture de pièces
sonores, qu'elles soient destinées à être lues, performées, improvisées, gravées sur supports, exposées ?
Philippe Baudelot, membre fondateur du RAN (Réseau Arts Numériques), consultant en arts numériques dit que ces derniers, bâtis sur un concept plutôt larges, à cheval entre techniques et modes d'écriture, esthétisme
et outils, sont appelés à se dissoudre petit à petit pour revenir à des notions de domaines et de pratiques.
On reviendrait donc ainsi à l'art de l'écriture, de la forme, de l'image , du mouvement, et donc à l'art des sons. Cette terminologie de "l'art des sons" est en fait déjà utilisée dans certains
textes pédagogiques de l'Education Nationale. Catégorie englogant toute forme musicale, des plus anciennes au plus contemporaines, jusqu'aux expériences bruitistes, plastiques et aux
simples représentations visuelles de modes de production sonore ou du son lui-même, comme une matérialisation chère à certains courants actuels.
A t-on là une appellation plus pratique, plus souple, plus juste, top juste, plus large, trop large...
?
Création sonore, art(s) sonore(s), art(s) des sons ? Le chantier reste ouvert, tant dans l'intitulé de la chose que dans la précision et la définition de ses contenus.
Malgré tout, l'expérimentation sonore continue de plus belle sur le terrain , avec son lot de nouveaux festivals proposant une programmation parfois racoleuse et hétéroclite, des courants qui commencent à rentrer dans Le Réperoire, Le Patrimoine, voire dans un certain académisme convenu, d'autres qui défrichent encore à tours de bras, et vraissemblablement d'autres qui restent à inventer...
Sans doute est-ce là le plus important.