Un roman noir assez classique basé sur une histoire plutôt banale. Sherry reçoit les lettres passionnées d'un admirateur inconnu. Elle mène une vie paisible, rangée, à la limite de l'ennui, dans une petite ville de province. Elle a passé la quarantaine, son fils a quitté le nid familial, son mari joue un jeu ambigu en l'encourageant à satisfaire son fantasme. Lorsqu'elle rencontre Bram, le fantasme semble s'incarner sous ses yeux. Elle finit par succomber au désir que cet homme lui inspire.
Comme dans les autres romans de Laura Kasischke, on sent ici la tension larvée, la mort tapie quelque part
qui se manisfeste d'abord par des signes avant-coureurs, des présages. Mais le danger ne se trouve pas forcément là où on croit. Cette fois j'ai trouvé que les images étaient un peu trop
appuyées, les métaphores un peu trop explicites et le dénouement moins inattendu que d'habitude. Mon tort est sans doute de l'avoir lu à la suite de La couronne verte que j'ai adoré et que j'ai
trouvé beaucoup plus subtil et plus original. C'est donc loin d'être mon préféré de cette auteur que j'apprécie beaucoup par ailleurs.
extrait : "Et pourtant, lorsque je le vis, je le sus :
Bien sûr.
C'est toi mon amoureux.
Et comme s'il m'avait attendue, il sourit en me voyant approcher en voiture.
"Vous voilà, dit-il lorsque je baissai ma vitre. Notre tueuse de biches."
J'ouvris la bouche pour parler, mais je ne dis rien. Je ne pouvais que le regarder fixement.
Il avait des dents parfaitement blanches et droites, et des yeux si profonds qu'il était surprenant, presque impossible de les regarder fixement. Vous pouviez trébucher en regardant dans ses yeux-là. La mâchoire carrée, la barbe et la moustache soigneusement taillées -c'était bien ce que je lui avait inventé dans mon imagination-, mais les mains gracieuses, aux longs doigts ces mains propres, étaient tout à fait à lui.
Il portait un montre en or. Au tour du col de son tee-shirt noir, je crus voir briller une chaîne en or. Il avait une unique fossette insistante, du côté droit de son sourire.
"Garez-vous donc madame Seymour. On va vous arranger ça."
A moi pour toujours, Laura Kasischke, Le Livre de Poche, 377 pages.