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On y était - Rien & Centenaire

Publié le 16 juillet 2010 par Hartzine

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Rien + Centenaire, Paris, Espace B, 5 juillet 2010

Il s’agit d’une première. Bien qu’à proximité d’une gare pas comme les autres, où l’ensemble de la rédaction d’Hartzine vous a récemment convié le temps d’une soirée Hartzbreaker de haute volée, je n’ai jusque là jamais franchi les quelques ruelles séparant le Métro Corentin Cariou dudit Espace B. Cette salle, aujourd’hui gérée par le label indépendant La Compagnie Générale du Rock, se veut un lieu à la programmation aussi pointue que variée, nichée qu’elle est au fond d’un bar-restaurant tout ce qu’il y a de plus classique. Possible donc de passer devant sans s’arrêter, puis de revenir sur ses pas sans feindre la bonne surprise. Quoi de mieux qu’un vrai comptoir de bar pour assister à de vrais concerts ? Ce n’est pas mon gosier qui vous dira le contraire, d’autant que l’affiche promettait son lot de monts et merveilles : un fleuron du label Clapping Music, Centenaire, et un joyau de l’écurie l’Amicale Underground, Rien. On est entre de bonnes mains.

La rue fourmille et trépigne en attendant l’ouverture des portes. L’ambiance est détendue, une légère brise caresse mes joues tandis que la jactance ne fait nulle part défaut. La salle est au trois quart pleine lorsque le synthé au son granuleux de Centenaire sonne le tocsin. Le groupe est en roue libre, terminant une série de concerts - en trio - qui avait peu ou prou commencé lors du festival Clapping Music en févier dernier (lire le report). Visiblement flattés de jouer devant un public bien plus nombreux que la veille - coincés qu’ils étaient entre un groupe de ska et un groupe de reggae - les trois Centenaire donnent tout ce qu’ils ont dans le buffet et ce malgré une chaleur des plus incommodantes, ayant peu à peu raison de la moitié de l’assistance. Et si Damien Mingus, Aurélien Potier et Stéphane Laporte s’écartent par leur spontanéité revêche des ambiances feutrées d’alors, leurs ritournelles au bon goût noise ne sont pas sans rappeler quelques cousins de label, Clara Clara en tête. Moins étirés qu’auparavant, leurs antiennes se font brutes de décoffrage, la voix de Damien fuyant de temps à autres sa justesse, mais nous laissent malgré tout un peu sur notre faim : d’intense, leur set n’en est pas moins bref. D’autant que pour eux l’heure est à la pause scénique et à la composition acharnée. On a hâte de voir le résultat, pourvu qu’il soit dans la même veine.

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Faut-il aimer pour souffrir ? Certains signes ne trompent pas : lorsque le quatuor grenoblois Rien débute son set, une foule, plongée dans l’obscurité, s’entasse dans une atmosphère d’étuve infernale. En guise d’introduction, une voix vocodée et saccadée, délayant un humour bravache du plus bel effet (Valery Giscard d’Estaing est une salope, allez-y les garçons), souligne l’absence totale de micros sur scène : si Rien peut être présenté comme l’ultime avatar d’un post-rock à cours de formules gagnantes depuis God Speed You! Black Emperor, leurs instrumentations vagabondes, aussi tranchantes que mélodiques, vont nécessairement plus loin qu’une simple quête de cimes pour amateurs gogos de sensations fortes. Jouant en quasi intégralité leur dernier effort, l’Ep #3 (lire la chronique), tout en piochant ici et là dans les plus anciens Requiem pour des Baroqueux (2003) et Il ne peut y avoir de Prédiction sans Avenir (2007), les quatre Rien bâtissent un édifice sonore caréné de rythmiques à la puissance de feu époustouflantes, où les guitares se jouent d’une apesanteur que l’on jure factice l’espace de quelques riffs tourneboulants. Une sourde brutalité se déploie dans un écrin de velours : là où les notes se font cristallines, le revers de manche ne se fait que plus bestial, insurmontable. Devant moi, les têtes vrillent, les corps se dénudent, la sueur se répand en flaque. L’esprit navigue mais le corps parle, et la raison retrouve grâce : même les pores de mes bras suintent d’une transpiration abondante quand j’exhale un souffle chaud continu asséchant aussi vite ma gorge que je ne vide mon verre. Faut-il souffrir pour continuer à aimer ? Ma réponse est négative et je retrouve l’air tiède de l’été peu avant la fin d’un concert légèrement galvaudé par une telle inconvenance thermique. Néanmoins, je n’apprécie Rien qu’à sa trop juste valeur : un néant obnubilant, trou noir extatique d’un quotidien cousu de petits tracas.


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